Homélie du 2ème dimanche du temps ordinaire
Abbé Jean Compazieu | 7 janvier 2012
Ecouter et suivre le Seigneur
Textes bibliques : Lire
“Parle, Seigneur, ton serviteur écoute.” C’est la prière que le jeune Samuel a apprise de la part du prêtre Eli. C’est un appel à la disponibilité à l’égard de Dieu qui a toujours des choses importantes à nous dire. Samuel a été appelé par son nom. Il en a été de même pour nous au jour de notre baptême. Le prêtre s’adresse à celui qui va être baptisé et lui dit : “… Au nom de la communauté chrétienne, je t’accueille avec une grande joie.” Le Seigneur ne parle pas à une troupe anonyme mais à des personnes bien précises. Chacun est unique à ses yeux. Chacun fait l’objet d’un unique amour.
“Parle, Seigneur, ton serviteur écoute.” Voilà une prière que nous devrions dire le plus souvent possible. Quand nous entrons dans une église, quand nous ouvrons le livre de la Parole de Dieu, le Seigneur est là. C’est lui qui nous accueille. Il a un message de la plus haute importance à nous transmettre. Nous commençons notre prière en nous mettant à l’écoute du Seigneur. C’est un temps de silence et de recueillement car le Seigneur ne parle pas dans le bruit. Trop souvent, on pense que la prière c’est beaucoup de paroles. On oublie alors que c’est aussi un temps d’écoute.
“Parle, Seigneur, ton serviteur écoute.” C’est la prière qu’un adulte a enseignée à un enfant. C’est vrai également pour nous aujourd’hui. Quand nous accueillons des enfants pour le catéchisme, nous essayons de les orienter vers cette attitude d’écoute du Seigneur. C’est aussi la démarche des parents, des grands parents et de toute la communauté chrétienne. Notre mission à tous c’est d’apprendre aux enfants à accueillir la Parole de Dieu. Ils ont besoin du témoignage de notre foi et de notre prière. C’est vrai qu’ils sont souvent un peu excités. Le tourbillon de la vie et le bruit ne favorisent pas toujours cette écoute. Nous en sommes tous là. Nous avons tous besoin de retrouver des lieux qui favorisent le recueillement. Dieu ne parle pas dans le bruit. Pour entendre sa Parole, il faut d’abord faire silence et écouter.
Dans l’évangile, la voix entendue n’est plus une voix sans visage. La personne qui parle c’est Jésus. Jean Baptiste le désigne comme “l’Agneau de Dieu”. Deux disciples se mettent à suivre Jésus. Quand il les voit, il leur dit : “Que cherchez-vous ?”. Cette question, il continue à nous la poser : Que cherchez-vous, vous qui êtes venus dans cette église ? Que cherchez-vous tout au long de vos journées et de vos semaines. Il est important que nous entendions tous cette question. Ils sont nombreux ceux et celles qui ne savent pas bien où ils en sont. Mais le Seigneur s’arrange toujours pour mettre sur leur route les personnes qu’il faut pour les aider à le rencontrer.
Dans l’évangile de ce jour, les deux disciples répondent à la question de Jésus par une autre question : “Maître, où demeures-tu ?” Ce verbe demeurer signifie “habiter quelque part et y rester”. Jésus leur répond : “venez et vous verrez !”C’est ainsi qu’ils se sont mis à le suivre. L’évangile ne nous donne pas de détail. Il nous dit simplement : “Ils l’accompagnèrent et ils restèrent avec lui ce jour-là.” Pour eux, Jésus est un inconnu. La meilleure manière de le connaître c’est d’aller chez lui, de le rencontrer dans sa maison et de rester avec lui dans son quotidien.
Mais quand nous lisons l’évangile de saint Jean, il nous faut aller plus loin. Il voudrait éveiller en nous le désir de savoir où demeure Jésus. Toute vie chrétienne suppose ce désir continuel de demeurer près de lui. Plus tard, ils apprendront de lui qu’il demeure auprès du Père et que le Père demeure en lui. Il existe entre Jésus et son Père une union vitale, un vivre ensemble réciproque. Par la suite, il invitera ses disciples à demeurer en lui. Dans son discours sur le Pain de Vie, il dira : Celui qui mange ma chair et boit mon sang demeure en moi et moi en lui.” C’est pour cette raison que l’Eucharistie est si importante. Nous demeurons dans le Christ et lui demeure en nous pour nous faire vivre de sa vie et de son amour.
Il y a enfin une autre bonne nouvelle que le Nouveau Testament nous révèle d’une manière plus explicite : Jésus est ressuscité. Il est vivant pour toujours auprès du Père. C’est là qu’il demeure éternellement. Un jour, il avait annoncé qu’il partait leur préparer une place. Nous sommes tous appelés à entrer dans cette demeure éternelle que Jésus appelle de Royaume de Dieu. Nous nous y préparons en vivant le grand commandement de l’amour de Dieu et du prochain. Il est absolument essentiel de conserver cette relation d’intimité avec Jésus. La prière est absolument essentielle mais elle ne suffit pas. C’est toute notre vie qui doit être une union intime avec lui.
Seigneur, nous te prions : tu nous appelles en cette Eucharistie à devenir tes disciples. Fais-nous grandir dans la fidélité à ta Parole et nous serons porteurs de ta bonne nouvelle maintenant et toujours. Amen
Sources : Bible de la liturgie, Revues liturgiques (Signes et Feu Nouveau), Lectures bibliques des dimanches (Albert Vanhoye), actualité de la semaine
Merci beaucoup à vous pour ce partage fraternel. Agréable journée dominicale à vous!
Je suis prêtre catholique béninois.
Merci André et bon dimanche au Bénin
j’ai parfois le sentiment d’être née trop tôt…Mais je rends aussitôt grâce d’avoir vécu assez longtemps pour sentir le vent de l’Esprit “monter “( je suis au bord de la mer) et ébranler nos vieilles habitudes…Oui, il y des Samuel de tout âge ! mais nous faisons beaucoup de bruit, trop de bruit souvent, pour l’entendre.Cet appel du Père à ses enfants, cet appel au service, au partage, à l’union de tous entre nous et en LUI;;;puissions-nous avoir la disponibilité de Samuel et dire aussi “: me voici ” ! Bon dimanche !
Je crois que tu dis, Père Jean, qu’il faut savoir se taire pour écouter le Seigneur. Je reconnais que je lui parle souvent tout au long du jour mais je ne l’écoute jamais. Par contre, j’ai bien chaud au coeur. Ce qui me donne la véritable impression que Dieu habite en moi.
Je prie chaque jour le Seigneur, mais comme tu le dis, Jean, ça ne suffit pas. Je crois à la religion catholique et il serait MALHONNETE de ma part de ne pas appliquer ses préceptes.
Alors, Seigneur, je chante tes louanges car tout va bien pour ma famille. Bien sûr, l’entreprise de Jean-Yves ferme mais son employeur va lui faire une belle lettre de recommandation. J’espère, de tout coeur, qu’elle pourra servir.
Je demande à avoir encore une plus grande foi pour être une meilleure disciple.
Christiane
Où demeures-tu ?
Cette question posée à Jésus par cette poignée d’hommes le fréquentant depuis quelque temps, peut paraître cocasse et saugrenue. Et pourtant, elle n’est pas dénuée de sens et d’intelligence. Essayons d’entrer dans cette interrogation, de la décrypter afin d’en saisir au mieux, le sens et la portée compte tenu de la situation sociale, politique et religieuse de l’époque.
Les apôtres ont quitté beaucoup de leurs sécurités pour répondre à l’appel lancé par Jésus : « Viens et suis moi ». Soulignons au passage leur foi un peu béate et primaire ou peut être leur manque de réalisme face au lendemain…Il faut assurer ses arrières !
Les apôtres se sont lancés dans une aventure sans trop voir les tenants et les aboutissants liés à la réponse positive apportée à l’appel de Jésus. Ils se sont lancés dans l’aventure de la foi, dans une aventure comme les grands héros de la foi symbolisés dans cette figure emblématique d’Abraham… Un appel, une réponse, un engagement, une marche à la suite de Jésus.
Les voilà donc tout donnés à ce Jésus. Cet homme cristallisant la vie des apôtres sort d’une bourgade, on dirait aujourd’hui d’un « trou » et, ce milieu géographique n’a rien pour donner notoriété et poids quant à son projet évangélique. Qui plus est, son inscription géographique en Galilée, ne peut lui apporter bonne renommé ; La région « Galilée » signifiant « carrefour des païens ».On est loin de Jérusalem, ce centre culturel et religieux où se côtoient les docteurs de la loi, les spécialistes de la religion. Nazareth, un trou perdu d’où ne peut sortir aucune éminence grise, aucune compétence en matière de religion. De plus, il était habituel à cette époque de voir des gourous se lever ça et là et de prêcher la nouveauté.
L’origine de Jésus, fils du charpentier Joseph et de Marie femme sans notoriété, cela ne donne pas de poids sur une carte de visite et ne redore pas le blason de Jésus, fils de deux illustres inconnus.
Jésus, socialement, culturellement, religieusement part battu et ne pourra faire l’unanimité des urnes…. La majorité de ses concitoyens pense que son action ne sera qu’un coup d’épée dans l’eau et avortera en peu de temps. On le prend pour un illuminé venant allumer un feu de paille : « Que peut-il sortir de bon de Nazareth, n’est-ce pas le fils du charpentier et de Marie ». On n’hésite pas à dire qu’il a perdu la raison. Quand quelqu’un dérange aujourd’hui on n’a vite fait de dire qu’il perd la tête et, c’est bien ce qui est avancé quant à la personne de Jésus. Pour la majorité, Jésus n’a pas le profil d’un leader religieux.
Les origines de Jésus, sa naissance un peu bizarre, sa manière d’être, de parler, de faire des entorses à la religion juive sont autant de points donnant peu de crédit à l’aventure qu’il engage.
Il est aisé de comprendre les apôtres et le sentiment d’inquiétude et parfois de découragement porté en eux; qui plus est, ils n’ont pas compris le projet évangélique de Jésus. Ils ont répondu à son appel, voyant en Jésus le libérateur du joug mis en place par les romains. Hélas au fil des jours, leur espérance est déçue et se rétrécit comme une peau de chagrin. Voilà la première erreur stratégique des disciples quant à la personne de Jésus.. On peut comprendre cette erreur stratégique compte-tenu de la situation politique d’oppression à cette époque. Aurions-nous été plus intuitifs ?
« Où demeures-tu ? ». L’interrogation est forte et ne se situe pas seulement au niveau de la localisation géographique quant à la requête. . Par le mot « demeure », il faut entrevoir la question des apôtres plus sous cet aspect : qui es-tu, quelle est ta mission, explique un peu ce que tu veux faire de nous, on ne comprend rien. On a répondu à ton appel, donne-nous des projets, du concret, des objectifs pour reprendre le langage de nos contemporains !
Les paroles, les actes de Jésus, ses longs silence de prière, son approche des pauvres et des exclus, ses critiques face à la religion ne peuvent qu’engendrer cette question : « où demeures-tu ?». Les apôtres ont besoin d’aller plus loin dans la connaissance du mystère même de l’être de Jésus, dans la connaissance de ce qui anime Jésus ; ils veulent surtout savoir ce que Jésus a envie de faire de « leur peau ». On ne quitte pas ses sécurités sans un minimum « d’assurance vie ». On peut faire confiance mais, il faut un minimum de clairvoyance. S’engager gratuitement peut tenir d’une totale inconscience.
En ce début de troisième millénaire, cette question reste d’actualité au sein de notre monde en quête de bonheur, de liberté, d’amour et de vérité. L’homme reste habité par des questions fondamentales, il appartient au même terreau d’humanité, il est issu de la même glaise que les hommes d’hier et que ceux de demain.
Ces questions interpellent l’homme dans la consistance de sa vie, dans son projet de vie et de sa quête du bonheur. Question d’hier, question d’aujourd’hui, question de demain
Au temps des ordinateurs super puissants, au temps de la conquête de l’espace, au temps des découvertes prodigieuses de l’infiniment petit comme de l’infiniment grand, la quête du sens de l’existence demeure : l’homme ne peut exister s’il n’injecte pas du sens à sa vie : il lui faut trouver du « signifiant ». C’est le sens qui rend possible l’existence et, le sens est à l’homme un ressort permettant de se tenir debout, d’avancer et d’exister.
Les progrès scientifiques, culturels et économiques et sociaux ne sont pas des chemins de réponse à cette question du sens de la vie. Ils peuvent être contingents au sens de la vie mais aussi un frein à cette question du sens de la vie en occultant même la question.
« Où demeures-tu ? »…Quelle est ta demeure ? Ces questions nous renvoient dans nos propres retranchements, dans ce jardin intime et, on se le cache parfois à soi-même et souvent aux autres. On sait bien ce qui est tordu dans nos vies, on préfère se le cacher pour refuser la lumière mettant en relief ce qui nous trahi mais fait la vérité de notre être.. On préfère faire la sourde oreille et ne pas accueillir la parole car, elle risque de nous atteindre comme un glaive et de nous faire saigner.
Et pourtant, jour ou l’autre, il faut à chacun faire émerger ce qui le fait vivre, donner un nom au sel apportant saveur à sa vie, donner un nom au feu qui réchauffe et, reconnaître la source de la lumière éclairant sa route.
Chacun est invité à regarder ce qu’il y a dans son cœur et la vraie demeure à construire pour chacun est dans son propre cœur.
– Ce cœur peut être fermé et incapable de s’ouvrir à l’autre.
– Ce cœur peut être ouvert se donnant pour chartre les béatitudes.
– Ce cœur peut avoir la couleur de celui du jeune homme riche de l’évangile. Un cœur durci par l’argent, un cœur habillé de tristesse : « là où est ton cœur, là aussi est ton trésor ».
– Ce cœur peut être celui de la samaritaine en quête d’eau vive, capable de faire la vérité sur sa manière de vivre et d’être capable de reconnaître sa vie mouvementée, capable d’être à l’écoute d’une eau qui pourrait étancher sa soif
– Ce cœur peut être celui de Zachée mis à nu par Jésus dans sa condition de pécheur et décidé à changer totalement le cap de sa vie ; un cœur vrai sans fioriture, sans masque.
– Ce cœur est celui de Marie, cette femme du « OUI » et du « sans refus » à la volonté de Dieu : Marie femme de la disponibilité, de la simplicité, de l’humilité.
Le mystère du cœur est le mystère de la vraie richesse. Voilà le bon indicateur pour déceler nos priorités. Il faut à chacun l’audace de l’honnêteté pour regarder son cœur à la lumière de la vérité. Il devient alors possible d’apporter réponse à cette question : « Où demeures-tu ? »
La demeure où Jésus veut nous conduire passe par le chemin de la pauvreté et de l’humilité. Chacun est invité à faire des choix quant aux pseudo-valeurs proposées par nos sociétés dites modernes et évoluées. Le vrai bonheur n’est pas dans cette recherche effrénée de « l’avoir » mais dans cette lente conquête de plus d’humanité, dans cette naissance sans cesse à faire à un amour prenant de plus en plus un peu visage de Jésus.
Le chemin conduisant à la vraie demeure de Jésus est celui de la « métanoïa », c’est à dire celui de la conversion, d’un retournement intérieur à opérer sans cesse. C’est le chemin du dépassement qui conduit à la liberté intérieure. Engagé sur cette voie, se construit la vraie demeure, se construit la demeure appelée par Thérèse d’Avilla, « la demeure intérieure ».
« Où demeures-tu ? ». Toute la vie du Christ est une réponse à cette question. La vraie demeure du Christ, c’est d’être dans le cœur de son Père et d’essayer de faire sa volonté : « Je ne suis pas venu dans le monde pour faire ma volonté mais celle de mon Père qui m’a envoyé ».
La vraie demeure du Christ c’est de vivre en plénitude sa filiation à son Père « source de toute paternité » dans une totale liberté où il se laisse habiter par l’amour de Dieu offert sans cesse en pure gratuité.
Le Dieu de Jésus-Christ est un Dieu « visiteur » de l’homme. Ce Dieu veut planter sa tente au milieu de nous dans nos cœurs. Il veut revivre avec nous, son peuple, l’expérience menée au temps de la marche inaugurée avec Abraham.
Le Christ, comme dans un « boom-rang » nous revoie cette question : « Où demeures-tu ? ».
– La maison de notre existence, les lieux de notre vie sont-ils comme le sable se dérobant en nos mains chaque fois que nous voulons le serrer ?
– La maison de notre existence est-elle faite de plaisirs éphémères n’ayant pour durée que l’immédiateté du moment ?
– La maison de notre existence n’a-t-elle pour façade que la notoriété et le « paraître ».
– La maison de notre existence n’est-elle pas une tour d’ivoire fermée aux autres où les murs de l’égoïsme en font une forteresse ?
Ces questions sont personnelles et la vraie réponse est personnelle. Point de construction de cette demeure intérieure sans la purification de l’être. En entrant dans le mystère de la parole de Dieu fait chair : j’accède au mystère d’un amour et il me dépasse, cet amour féconde ma vie, cet amour m’invite à sa table sans s’imposer et je devien son hôte.
Notre vraie demeure c’est d’être habité par la présence de Dieu, présence s’offrant en toute gratuité : « je frapperai à sa porte, j’entrerai chez lui et nous ferons notre demeure ».
Le mystère de la vraie demeure à construire passe par le chemin de la mort. Il faut creuser les fouilles de cette demeure pour y couler de solides fondations. Creuser des fouilles, c’est accepter de se laisser questionner sur le terrain où l’on veut bâtir sa demeure. C’est accepter de se laisser creuser et de faire l’expérience du vide voir de l’absurde pour rebondir et apporter une réponse. Alors la vraie parole peut jaillir, celle du psalmiste : « Dans ma misère, je crie vers Toi Seigneur ».
Le Christ en laissant ses bras crucifiés invite chacun de nous à ouvrir les siens et non à les croiser. Le Christ n’a jamais croisé les bas sur la croix : Il les a ouverts. Creusons en nous les profondeurs de nos manques et nous faisant accéderons à celui qui est source de la vraie vie, à celui qui est source intarissable, à celui qui peut étancher notre soif. Nous pourrons répondre à cette question : « Où demeures-tu ? »
Construire sa demeure, c’est laisser place au Dieu de Jésus-Christ, c’est cohabiter avec lui dans un échange d’amour, être capable du silence pour entendre sa parole.
A cette question : « Où demeures-tu ? », la réponse est dans le cœur de l’homme faisant sa demeure dans le cœur de Dieu.
« Celui qui aime son frère demeure dans la lumière, qui n’aime pas demeure dans la mort ». 1Jn 2/10
« Celui qui demeure dans l’amour, demeure en Dieu et Dieu demeure en lui ». 1Jn 4/16
René FRENEL 10/1/2012
2ème Dimanche – année B – 15 janvier 2012 – Evangile de Jean 1, 35-42
L’AGNEAU DU PASSAGE DANS LA VIE
Après les fêtes de la naissance de Jésus, nous le retrouvons déjà aujourd’hui à son baptême. Rien n’est dit de l’intervalle (de -5 à + 28). Quand donc va-t-il sortir de son silence et commencer sa mission ? Suite à un appel. En effet, un jour, parvient la nouvelle : un certain Johanan (Jean) vient de surgir et sa parole de feu rallume l’espérance d’un peuple opprimé et assoiffé de liberté. Serait-il un envoyé de Dieu, un prophète ? Comme beaucoup d’autres, Jésus décide de se rendre en Judée et là-bas, au bord du Jourdain, sa vie va basculer. Jean l’évangéliste souligne fortement le témoignage public de Jean-Baptiste.
TEMOIGNAGE DU BAPTISTE ET 1ères VOCATIONS.
« Jean se trouvait de nouveau avec deux de ses disciples. Posant son regard sur Jésus qui marchait, il dit : « Voici l’agneau de Dieu ». Les deux disciples entendirent cette parole et ils suivirent Jésus.
Celui-ci se retourna, vit qu’ils le suivaient et leur dit : « Que cherchez-vous ? ». Ils lui répondirent : « Rabbi (c.à.d. Maître), où demeures-tu ? ». Il leur dit : « Venez et vous verrez ». Ils le suivirent, ils virent où il demeurait et ils restèrent auprès de lui ce jour là.
C’était vers la 10ème heure (4 ou 5 heures du soir) »
« L’AGNEAU DE DIEU QUI ENLEVE LE PECHE DU MONDE». Désignation essentielle que la liturgie nous fait proclamer au moment de la communion eucharistique. Il importe donc de l’expliquer car là se cache le « mystère pascal », cœur de notre foi. L’image de l’agneau fait référence à deux événements clefs.
1. L’AGNEAU DE LA PAQUE.
L’événement fondateur d’Israël est la libération des Hébreux, esclaves en Egypte, laquelle a eu lieu la nuit de la fête de pessah (pâque) où l’on immolait et partageait un jeune agneau afin de marquer le début d’une année nouvelle et demander la protection des troupeaux. Dorénavant, le vieux rite des bergers est muté en fête de la libération des esclaves. Car l’exode s’est opéré sans combat : c’est, dit-on, grâce au sang de cet agneau qu’Israël a pu sortir et devenir un peuple libre (lire Exode 12). C’est pourquoi tout Israélite est tenu de célébrer la Pâque chaque année jusqu’à la fin du monde.
Mais à présent, avec Jésus, va avoir lieu une seconde et définitive transfiguration de la fête: à Pâque, Jésus, victime innocente, sera rejeté et mis à mort mais son sang (qui représente le don total et volontaire qu’il fait de lui-même) permettra non seulement à Israël mais à toute l’humanité (le monde) d’être libérée de l’esclavage du péché. Jésus est l’Agneau qui ouvre les portes de la prison du mal et crée un nouveau peuple par-delà toute frontière.
A la fin de son évangile, Jean indiquera que la prophétie s’est bien réalisée : Jésus sera crucifié juste au moment de la fête de la Pâque et les soldats ne lui ont pas brisé les jambes. Or précisément le livre de l’Exode disait de l’agneau : « Pas un de ses os ne sera brisé » (Ex 12, 46 ; Jn 19, 36).
Jean Baptiste reconnaît donc son impuissance personnelle. Comme tous les prophètes et moralistes, il ne pouvait que dénoncer les péchés et exhorter à la conversion. Certes il allait, lui aussi, payer de sa vie son audace à admonester le roi mais son martyre ne pourrait rien changer à la vie de ses disciples, pas plus que les martyres du père Kolbe ou de Martin Luther King. Ces hommes peuvent bien être des figures remarquables devant lesquelles on s’incline, des modèles admirables que l’on peut tenter d’imiter : mais ils nous demeurent extérieurs.
Il en est tout autrement avec Jésus. S’il peut être désigné comme « l’agneau de Dieu qui ôte le péché du monde », c’est parce qu’il est autre. Jean avait témoigné : « J’ai vu l’Esprit, tel une colombe, descendre et demeurer sur lui…J’ai vu et j’atteste qu’il est le Fils de Dieu » (1, 32-34). Donc par son amour jusqu’à la croix, Jésus peut « baptiser dans l’Esprit de Dieu » (1, 33), purifier les croyants de leurs péchés et les introduire dans la Vie de Dieu, la Vie éternelle. Son amour crucifié a la puissance d’opérer la Pâque c.à.d. de nous faire passer de l’esclavage sous le péché à la liberté des enfants de Dieu.
Donner à Jésus ce titre d’agneau pascal n’est pas une invention tardive de Jean et son Eglise. Déjà Paul écrivait à l’Eglise de Corinthe qu’il avait fondée en 50-52: « Purifiez-vous du vieux levain pour être une pâte nouvelle…Car le Christ, notre pâque, a été immolé » (1 Cor 5, 7). Il veut dire : Ne vous laissez pas entraîner par de vieux démons puisque vous avez été entièrement renouvelés par le sacrifice de Jésus, le véritable agneau pascal. Et au début du 2ème siècle, l’Apocalypse nous transmettra les premières et magnifiques acclamations liturgiques adressée au Christ, Agneau devenu Seigneur :
« A Celui qui nous aime,
Qui nous a délivrés de nos péchés par son sang,
Qui a fait de nous un royaume, des prêtres, pour Dieu son Père :
A Lui Gloire et Pouvoir pour les siècles des siècles. Amen » (Apo 1, 5-6) — (cf.4, 8-14…….)
2. LE SERVITEUR SOUFFRANT.
D’autre part, l’image de l’agneau renvoie à la page la plus stupéfiante de l’Ancienne Alliance. Après la destruction de Jérusalem, l’incendie de son temple et la déportation du peuple en Babylonie (- 587), en plein cœur du désastre, l’auteur anonyme d’Isaïe 40-55 raconta une curieuse vision. Il avait vu un homme déchiré, horriblement défiguré (Isaïe 51, 13 à 53,12) :
«…Homme de douleurs, tordu de souffrances… Nous l’estimions humilié, frappé par Dieu mais il était broyé à cause de nos perversités. Dans ses plaies se trouve notre guérison…Brutalisé, il s’humilie ; il n’ouvre pas la bouche comme un agneau traîné à l’abattoir. Il est retranché de la terre des vivants à cause de la révolte de son peuple…… Si tu fais de sa vie un sacrifice de réparation, il verra une descendance, il prolongera ses jours et la volonté de Dieu aboutira. Ayant payé de sa personne, il verra une descendance….. Juste, il dispensera la justice, lui, mon Serviteur, au profit des multitudes, du fait qu’il a supporté leurs perversités parce qu’il s’est dépouillé jusqu’à la mort, parce qu’il a porté les fautes de tous et que pour les pécheurs, il est venu s’interposer ».
Qui donc est ce Juste accablé de souffrances indicibles ? Le peuple le considère d’abord comme un maudit, un réprouvé de Dieu ; mais on comprend qu’au contraire, lui, le seul Juste, s’offre pour le pardon de la multitude. Il est écrasé, on le tue mais il reste muet comme l’agneau conduit à la boucherie, c.à.d. il ne se révolte pas. Et mieux encore, du fond de sa détresse, il intercède pour les foules, il s’offre pour que les péchés des foules soient pardonnés. Il fait de sa « passion » subie la plus haute « action » d’amour. Et Dieu accepte son sacrifice. C’est pourquoi il verra une descendance infinie.
Qui est ce « Serviteur de Dieu » ? Les premiers chrétiens l’ont vite identifié à Jésus qui, condamné injustement, crucifié horrible à voir, se taisait et s’offrait –nouvel agneau – pour le salut du monde.
Ainsi Luc raconte que, lisant cette page d’Isaïe, un ministre africain demeurait perplexe mais « partant de ce texte, le diacre Philippe lui annonça la bonne nouvelle de Jésus » (Actes 8, 32-35)
Et la 1ère Lettre de Pierre presse ses lecteurs de ne jamais oublier la merveille dont ils bénéficient : « Ce n’est pas avec de l’argent que vous avez été rachetés de la manière insensée de vivre de vos ancêtres, mais par le sang précieux, comme d’un agneau sans défaut et sans tache, celui du Christ… » (1 Pi 1, 17-20)
JESUS ET LE MYSTERE PASCAL
Vers la fin du 1er siècle, alors qu’Israël attendait que Dieu réitère les merveilles de l’Exode, Jean rédige un nouvel évangile qui montre comment la vie de Jésus est la « Pâque » véridique et définitive dont l’antique Exode était une parabole préfigurative :
La Loi (Jean-Baptiste) avoue son impuissance à libérer du péché.
A la fête de Pâque, Jésus s’offre, muet, comme le nouvel agneau.
Il ouvre une brèche dans la mer du Mal, il entraîne les disciples à « passer de ce monde au Père ».
Il révèle son Nom : « Je Suis » (8, 58).
Il scelle la Nouvelle Alliance. Il donne sa Loi : « Aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés ».
Il conduit son peuple : « Je suis le Bon Berger…J’appelle mes brebis et je les fais sortir ». (Jn 10)
Dans la nuit, « Je suis la Lumière du monde : celui qui me suit aura la lumière de la vie »(8,12)
Il leur donne la nouvelle manne : « « Je suis le Pain de vie : au désert vos pères ont mangé la manne et ils sont morts. Celui qui mange ma chair a La Vie éternelle » (Jn 6).
Il les désaltère par son Esprit : « Celui qui a soif, qu’il vienne à moi et qu’il boive » : il désignait ainsi l’Esprit (Jn 7, 38)
Il fait d’eux le Nouveau Sanctuaire : « « Détruisez ce temple : en 3 jours, je le relèverai ». Il parlait du temple de son corps » (Jn 2).
Il est le successeur de Moïse, le nouveau Josué (Jésus en hébreu) qui introduit son peuple dans la Terre Promise. « Celui qui croit le Fils a la Vie éternelle » (Jn 3,36)
LES PREMIERS DISCIPLES
Parmi les disciples de Jean-Baptiste, peu acceptent de le quitter : car il est plus facile de rester à une religion de lois et devoirs. Seuls deux s’en vont : André et un anonyme. Peut-être toi, lecteur ?
Ils ne demandent pas à Jésus « ce qu’il faut faire » : ils se mettent à le suivre et ils désirent « demeurer avec lui ». Ce chemin les conduira à la croix. Mais alors l’Esprit les comblera.
Heureux ceux qui partent chaque dimanche pour partager « la manne de l’Agneau » et « demeurer » avec lui. Il les sauve de la prison et, au vent de l’Esprit, il les emmène vers le Père.
Raphaël D
Interrogations ! – 2ème Dim. ord. 2012 – 15 janvier
Chaque dimanche, même en temps dit ordinaire, la liturgie dominicale nous offre, en Eglise, idées, renseignements et l’occasion de vivre plus intensément avec le Seigneur notre Dieu. En Jésus, il vient à notre rencontre tout en traçant le chemin pour le contacter.
Que nous est-il dit en ce dimanche ?
Avec le prophète Samuel (1ère lecture) la rencontre comprend normalement des étapes. Le jeune Samuel, qui couche dans le Temple, entend un appel du Seigneur. « Me voici » Il s’en réfère au prêtre Eli, qui répond ne pas l’avoir appelé. Cela à trois reprises. Alors Eli comprend que l’appel vient de Dieu et engage Samuel à répondre à un nouvel appel : « Parle, Seigneur, ton serviteur écoute ». L’appel se produit. Le texte du livre de Samuel signale : « Samuel grandit. Le Seigneur était avec lui et ses paroles n’étaient pas sans effet. »
L’écoute de Dieu n’est pas automatiquement perçue, ni par l’intéressé, ni même par le responsable religieux le plus proche. Des étapes, souvent intérieures et en esprit, se déroulent, avant l’adhésion à la Parole divine. N’est-ce pas ce qui advient pour bien des appels du Seigneur ?
C’est ce que note le Psaume 39 : la rencontre attend une réponse. « Me voici, Seigneur, je viens faire ta volonté » Percevant dans l’appel du Seigneur un amour incommensurable, comment, à l’image de Marie à l’Annonciation, ne pas répondre comme nous l’avons chanté ? « Dans ma bouche il a mis un chant nouveau » ; « louange à notre Dieu » ; « j’ai dit ton amour et ta vérité à la grande assemblée »
Tout appelé, disciple du Seigneur, ne peut que répercuter l’amour dont il est l’objet et faire connaître le Christ qui en est l’auteur. N’est-ce pas la vocation de son Eglise, et donc de tout chrétien ?
St Paul (2ème lecture) relève des obligations pour la rencontre et leur pourquoi. « Fuyez la débauche » ; « Dieu a ressuscité le Seigneur et nous ressuscitera nous aussi ». Nous sommes membres du Christ ; « un seul esprit avec le Christ ». « La débauche, un péché contre le corps lui-même ». Notre corps est temple de l’Esprit Saint ; « le Seigneur a payé le prix de notre rachat », et nous savons jusqu’au don de sa vie sur la croix. « Rendez donc gloire à Dieu dans votre corps » … ce qui implique une conduite de vie hors du péché de toute catégorie ! Mais qui n’est pas pécheur ?
L’Evangile (Jean 1, 35-42) nous montre Jean Baptiste, sur les bords du Jourdain, avec deux de ses disciples. Au sujet de « Jésus, qui allait et venait, il dit : « Voici l’Agneau de Dieu ». Les deux disciples vont à Jésus qui leur demande : « Que cherchez-vous ? » – « Rabbi (Maître) où demeures-tu ? – Venez et vous verrez ». Ils voient où il demeure « et restèrent auprès de lui ce jour-là » Puis l’un des deux, André, dit à Simon son frère : « Nous avons vu le Messie (le Christ) » et il l’amène à Jésus, lequel dit à Simon : « Tu es Simon, fils de Jean, tu t’appelleras Képha (ce qui veut dire : pierre) ».
Tout ce passage évangélique nous conduit à voir que la rencontre avec Jésus peut susciter des devoirs plus précis. Il en est ainsi pour celui qui deviendra le chef des apôtres, le premier Pape. Il en est ainsi pour tout prêtre ou consacré à servir le Seigneur d’une manière plus intense. N’en est-il pas ainsi, hâtons-nous de le dire, pour tout disciple, tous chrétien authentique, qui ne peut aimer Dieu valablement sans aimer parallèlement ses frères et sœurs humains à l’imitation de Jésus ?
Appel, rencontre, écoute de Dieu, réponse humaine, quel magnifique chemin nous est tracé pour parvenir au Père qui nous a tant aimés puisqu’il nous a donné son Fils, né de Marie, choisie pour être notre mère sur ce chemin. En perspective, avons-nous choisi le Royaume de l’Amour ?
Deuxième dimanche dans l’année B
Les lectures de ce dimanche nous parlent de la rencontre avec Dieu grâce à des intermédiaires. Ainsi en va-t-il du vieux prêtre Éli qui apprend à l’enfant Samuel à écouter la Parole de Dieu. De même, Jean-Baptiste désigne à ses disciples « l’agneau de Dieu »!. L’un et l’autre, montre le chemin. Mais l’un comme l’autre s’efface pour voir leurs disciples, comme de dos, entrer dans la relation indicible avec Dieu. Ils les introduisent au seuil, puis se retirent sur la pointe des pieds…
Telle est bien notre mission de baptisé : conduire discrètement et respectueusement les autres au seuil du sanctuaire de leur cœur profond, là où Dieu demeure. Inutile donc de chercher au dehors Celui qui nous est plus intime à nous-mêmes que nous-mêmes. C’est ce qu’avoue saint Augustin dans ses célèbres « Confessions » :
« Bien tard je t’ai aimée, ô beauté si ancienne et si nouvelle,
Bien tard je t’ai aimée !
Et voici que tu étais au-dedans, et moi au-dehors… » (Confessions, livre 10)
C’est désormais là, au plus profond de nous-mêmes que Dieu nous est présent. Après la lecture de saint Augustin et des évangiles, la jeune juive hollandaise Etty Hillesum écrivait en 1941, deux ans avant da mort à Auschwitz : « Il y a en moi un puits très profond. Et dans ce puits, il y a Dieu. Parfois, je pensais à l’atteindre. Mais le plus souvent des pierres et des gravats obstruent ce puits et Dieu est enseveli. Alors il faut le remettre au jour ».
Comment remettre au jour cette source cachée, cette fontaine scellée ? Déjà en repassant dans notre cœur les lectures de ce jour. La première, à travers le récit de la vocation de Samuel, nous montre que c’est parce qu’il avait un cœur qui écoutait que Samuel put entendre la Parole de Dieu.
Dans la seconde, saint Paul parle du lien mystérieux qui unit l’aventure intérieure à notre manière de vivre. On ne peut approcher Dieu sans mettre notre vie concrète en harmonie avec notre recherche spirituelle.
Dans son Evangile, enfin, saint Jean montre que c’est en interrogeant Jésus, en scrutant sa Parole, et en nous mettant à sa suite, que nous pourrons découvrir ce lieu où Il demeure dans le sein du Père et que nos pouvons atteindre, en Lui, en plongeant au centre de notre être.
Connaissez-vous l’héroïsme et la souffrance du poète Charles Péguy ? Il s’est converti, mais sa femme, qu’il a épousée civilement et avec qui il a eu quatre enfants, ne veut pas en entendre parler. Pour communier, il devrait se marier à l’église et faire baptiser ses enfants. Ses amis, comme le philosophe Jacques Maritain, lui disent : « Enfin, ta femme, tu n’as qu’à la forcer ». Mais Péguy répond : « Ma femme dit : Non ! Ce sera non ! Je la respecte ». En plus, à ce moment-là, il tombe amoureux d’une autre femme : Blanche. Et ses dévots amis osent lui dire : « Tu n’as qu’à changer ! Pour l’Eglise, vous n’êtes pas mariés ! » Pétrifié de douleur, Péguy tient bon et reste fidèle. Il rompt avec Jacques Maritain, par respect pour son épouse. Il meurt au début de la bataille de la Marne, en septembre 1914. Plus tard, sans aucune pression, madame Péguy, athée et fille d’une compagne de Louise Michel (la Commune de Paris, 1871), se convertira en 1925 et fera baptiser leurs enfants. Charles Péguy aura été le vrai précurseur de l’infiniment respectueuse rencontre entre le Christ et Charlotte Baudouin, son épouse. Ayons la même délicatesse… (http://www.revue-resurrection.org/Peguy-et-Maritain-le-conflit-de)
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