2 février 2014 : Présentation de Jésus au Temple
Abbé Jean Compazieu | 24 janvier 2014
Jésus lumière du monde
Textes bibliques : Lire
Le 2 février, les chrétiens célèbrent la présentation de Jésus au Temple. A l’époque, tous les parents faisaient cet acte d’offrande de leur fils premier né. Mais cette fête d’aujourd’hui n’est pas un simple rappel de l’événement. Il faut surtout y voir une révélation sur le mystère de Jésus. Nous y découvrons le vieillard Siméon qui reconnaît en lui la Lumière du monde. C’est pour cette raison que cette fête est appelée “la Chandeleur”, la fête de la Lumière.
Cette lumière avait été annoncée par le prophète Malachie (1ère lecture). Ce livre jette un regard très critique sur les prêtres de l’époque qui exercent dans le temple de Jérusalem. Il dénonce les magouilles, les fraudes, les injustices. Tout cela ne va pas durer. Le mal ne peut pas avoir le dernier mot. Dieu saura bien envoyer un messager pour remettre les choses à leur place. Bien sûr, le rêve de Malachie se limitait à une restauration et à un retour des valeurs du passé. Plus tard, on verra Jésus qui arrive au temple. Les chrétiens découvriront en lui celui qui est la Lumière du monde. Ils comprendront que le temple que Jésus veut purifier c’est chacun de nous.
La lettre aux Hébreux (2ème lecture) insiste avec force sur le mystère de Jésus. Il est celui qui a voulu partager avec nous “la condition humaine”. Il a voulu être solidaire de nous jusqu’à l’extrême. Il n’a pas échappé à la mort qui fait partie de notre condition. Siméon avait bien entrevu cette issue fatale en prophétisant que l’enfant serait signe de division. Mais cette destinée ne s’est pas arrêtée à la mort. Jésus appartient pleinement à la famille humaine et pleinement à la famille de Dieu ; de ce fait, il est celui qui ouvre les portes du temple céleste. Désormais avec lui et en lui, les frères de Jésus ont accès à Dieu lui-même.
C’est ainsi qu’en ce jour, Jésus nous est présenté comme la “lumière des nations”. C’est important pour nous car nous vivons dans un monde qui perd ses repères. Chaque jour, les médias nous en donnent de tristes exemples. Cela ne sert à rien de se lamenter. Nous avons bien mieux à faire : comme le vieillard Siméon, nous sommes appelés à montrer Jésus au monde. Ces jours-ci, le Cardinal Barbarin disait que nous n’avons pas une obligation de résultat mais une obligation de témoignage. Comme Bernadette de Lourdes, nous ne sommes pas chargés de faire croire mais de dire.
Le principal travail c’est Dieu qui le fait dans le cœur de chacun. La Lumière du monde c’est lui. Comme Siméon, nous pouvons dire : “Mes yeux ont vu ton salut que tu préparais à la face des peuples.” L’Ancien Testament nous a révélé un Dieu qui a fait alliance avec son peuple choisi. Avec la venue de Jésus, cette alliance s’élargit : elle n’est pas offerte au seul peuple élu mais à tous les peuples du monde. Grace au Christ, l’humanité est convoquée pour devenir l’unique peuple de la nouvelle alliance. C’est de cette bonne nouvelle que nous avons tous à témoigner.
Plus tard, Jésus dira : “Je suis la Lumière du monde”. La lumière ça éclaire et ça fait vivre. Une personne qui vivrait en permanence dans une pièce sombre finirait par tomber malade. Le Christ se présente à nous comme cette lumière qui nous montre le chemin, qui éclaire notre conscience et qui nous fait vivre. C’est cette lumière de Dieu qui nous a été transmise au jour de notre baptême. Et c’est pour cette raison que nous la ranimons le 2 février.
Cette fête d’aujourd’hui fait naître en chacun de nous un grand désir de rencontrer Jésus et de nous laisser transformer par la Lumière qui est en lui. Nous le rencontrons dans la liturgie qui nous fait parcourir les étapes de sa vie. Nous le rencontrons aussi dans les sacrements : le baptême qui fait de nous des fils de Dieu, le sacrement du pardon qui nous purifie. Mais par-dessus tout, Jésus vient à nous par l’Eucharistie : “Celui qui mange ma chair et boit mon sang demeure en moi et moi, je demeure en lui.” (Jn 6. 56) Nous avons tous besoin de cette rencontre “source et sommet de toute vie chrétienne” (Concile Vatican II)
Avec Siméon, nous sommes tous invités à prendre l’enfant Jésus dans nos bras pour le contempler et rendre grâce à Dieu. Le Salut qui nous est annoncé en ce jour n’est pas une simple théorie mais quelqu’un. Il est livré entre nos mains de pécheurs. Il attend de nous que nos bras soient grands ouverts pour accueillir son Salut. A la fin de chaque messe, nous sommes envoyés pour le montrer et le communiquer à notre monde. Cette mission nous concerne tous, quel que soit notre âge. Mais la rencontre de Siméon et Anne nous montre l’importance des “seniors” dans la transmission de la foi. Beaucoup d’enfants n’ont entendu parler de Jésus que par leurs grands parents. Nous avons là le visage d’une Eglise dont le renouvellement repose aussi sur les plus âgés de ses membres.
Nous vivons dans un monde qui est souvent indifférent à la présence de Dieu. Nous te prions Seigneur, envoie ton Esprit Saint : qu’il fasse de nous des témoins de la Lumière, des apôtres de Jésus auprès de tous ceux qui attendent leur délivrance. Amen
Sources : Revues Signes, Feu Nouveau, Dimanche en Paroisse, Prions en Eglise – Lectures bibliques des dimanches (A vanhoye)
FETE DE LA PRESENTATION – Année A – Dimanche 2 février 2014 – Evangile de Luc 2, 22-40
LE GRAND ÂGE OUVRE LES YEUX DU CŒUR
La fête de la PRESENTATION DU SEIGNEUR AU TEMPLE paraît tellement importante qu’elle supplante la liturgie du 4ème dimanche ordinaire.
LE RACHAT DES PREMIERS-NES
Quand arriva le jour fixé par la loi de Moïse pour la purification, les parents de Jésus le portèrent à Jérusalem pour le présenter au Seigneur, selon ce qui est écrit dans la Loi : « Tout premier-né de sexe masculin sera consacré au Seigneur ». Ils venaient aussi présenter en offrande le sacrifice prescrit par la loi du Seigneur : un couple de tourterelles ou deux petites colombes.
Les parents de Jésus observent fidèlement les 3 rites prescrits par la Loi. Le nouveau-né a été circoncis le 8ème jour (2, 21). Le 40ème jour, la mère se présente au temple pour le rite de purification rituelle (Lév. 12, 1) (non parce qu’il y a eu péché mais écoulement de sang) : pauvre, elle ne peut offrir l’agneau prescrit mais seulement deux colombes (Lév 12, 8).
Il est nécessaire également de « racheter » l’enfant car « tout premier-né de sexe masculin est consacré au Seigneur » (Ex 13,2). Subtilement Luc parle plutôt de « présentation » – pratique facultative de dévotion. La suite de l’histoire montrera que Jésus est de soi consacré, on ne le rachète pas à son Père ; au contraire c’est lui qui s’offrira pour le rachat, la libération de son peuple.
Le prêtre de service a accompli sa tâche sans rien remarquer ; le sacerdoce juif ne reconnaît pas le Fils qui entre, pour la première fois, dans la Maison de son Père. De même, plus tard, Jésus ne sera pas reconnu par les grands prêtres.
Ce sont deux simples laïcs, âgés, qui, les premiers, vont percer le secret de cet enfant.
LE PROPHETE PLUS LUCIDE QUE LE PRETRE
Or, il y avait à Jérusalem un homme appelé Syméon. C’était un homme juste et religieux, qui attendait la Consolation d’Israël, et l’Esprit Saint était sur lui. L’Esprit lui avait révélé qu’il ne verrait pas la mort avant d’avoir vu le Messie du Seigneur. Poussé par l’Esprit, Syméon vint au Temple. Les parents y entraient avec l’enfant Jésus pour accomplir les rites de la Loi qui le concernaient. Syméon prit l’enfant dans ses bras, et il bénit Dieu en disant :
« Maintenant, ô Maître, tu peux laisser ton serviteur s’en aller dans la paix, selon ta parole.
Car mes yeux ont vu ton salut, que tu as préparé à la face de tous les peuples :
lumière pour éclairer les nations païennes, et gloire d’Israël ton peuple. »
Sur la vaste esplanade du temple remplie de monde, le jeune couple rencontre tout à coup un vieil homme qui chemine lentement, perdu dans ses prières. Il s’arrête et demande à porter le bébé : « Oh qu’il est beau ! Il ressemble à son père ( ??? en effet !)…Comment s’appelle-t-il ? ». Marie répond : « IESHOUAH » – ce qui est un prénom mais signifie aussi SALUT !
Du coup Syméon laisse éclater sa joie : oui, ce petit pauvre inconnu, c’est le Messie attendu depuis des siècles, c’est celui qui réalise les promesses. J’ai tant prié pour qu’il vienne nous apporter le « salut » ! Maintenant je peux mourir en paix : cet enfant est notre avenir.
Emporté par l’Esprit, Syméon fait aux parents une révélation qu’ils ignoraient encore : Jésus sera la Gloire d’Israël mais en même temps il sera « « Lumière pour tous les peuples ». Car l’élection d’Israël n’est pas un privilège qui entraîne le rejet des autres peuples : toute vocation est une grâce-pour-les-autres. Le Messie est juif mais il est le Libérateur de toute l’humanité.
Le père et la mère de l’enfant s’étonnaient de ce qu’on disait de lui.
A l’Annonciation, Marie était « bouleversée : elle ne comprenait pas le sens de la salutation » (1, 29), elle posait des questions avant de murmurer son oui ; à la Visitation, la salutation de sa cousine l’avait surprise ; à Noël, elle avait vu survenir dans la nuit quelques jeunes bergers mystérieusement prévenus et, étonnée, « elle retenait les événements et les gardait dans son cœur » (2, 19). Et voici maintenant un vieil inconnu, rencontré par hasard, qui lui donne une nouvelle révélation avant d’évoquer le drame futur. Marie, comme nous, marche sur le chemin de la foi : tout n’est pas dit, n’est pas su au premier abord. La révélation est reçue progressivement, parfois au hasard des rencontres, au fur et à mesure que le croyant accepte l’événement qui le bouscule, « l’étonne » et le fait réfléchir.
Dieu ne parle pas seulement dans les églises !
ORACLE A MARIE
Syméon les bénit, puis il dit à Marie sa mère : « Vois, ton fils qui est là provoquera la chute et le relèvement de beaucoup en Israël. Il sera un signe de division. – Et toi-même, ton cœur sera transpercé par une épée. – Ainsi seront dévoilées les pensées secrètes d’un grand nombre. »
Prophétie qui transperce le cœur de Marie. Cet enfant que Dieu lui a donné, le descendant de David qui aura son trône pour toujours (1, 32) et qui sera la Gloire d’Israël, ne sera pas admis par tous. Car ce roi n’exercera aucune coercition: il proposera le message de l’amour, appellera à une conversion coûteuse et beaucoup resteront sceptiques. Certains même – et parmi les plus haut placés – seront exacerbés, furieux devant les prédications et les agissements de ce pauvre Galiléen et leur haine provoquera sa mort ignominieuse. Quelle tristesse pour Marie, quel désarroi, quelle souffrance ! Au Golgotha, ce n’est pas que son fils qui sera percé d’un coup de lance : elle aussi sera « transpercée ». Mais le dessein de salut s’accomplira et Jésus deviendra, de cette façon, « Gloire d’Israël et Lumière du monde ».
Jésus fera vite l’expérience de cet échec devant certains, il dira qu’il est venu apporter la division au sein même des familles (12, 51) et il préviendra ses apôtres qu’ils auront à vivre le même déchirement.
LA FEMME PROPHETESSE
Il y avait là une femme qui était prophète, Anne, fille de Phanuel, de la tribu d’Aser. Demeurée veuve après sept ans de mariage, elle avait atteint l’âge de quatre-vingt-quatre ans. Elle ne s’éloignait pas du Temple, servant Dieu jour et nuit dans le jeûne et la prière.
S’approchant d’eux à ce moment, elle proclamait les louanges de Dieu et parlait de l’enfant à tous ceux qui attendaient la délivrance de Jérusalem.
Luc se plaît toujours à souligner la présence et le rôle des femmes, égales des hommes, capables comme eux de recevoir l’Esprit et de remplir la fonction de prophète. Anne est un modèle : le grand âge et la faiblesse sont l’occasion de s’adonner davantage à la prière et non de se perdre dans les commérages et les distractions futiles. La vieillesse ne rend pas inutile, ne met pas sur la touche : elle offre la vocation de « priant », elle permet une recherche de Dieu que les soucis du monde et les travaux ne rendaient pas possibles à ce point. Anne, comme Syméon, loue Dieu et en outre, elle se met à parler de Jésus à l’entourage : première messagère faisant honte à nos silences gênés.
LA JEUNESSE CACHEE DE JESUS
Lorsqu’ils eurent accompli tout ce que prescrivait la loi du Seigneur, ils retournèrent en Galilée, dans leur ville de Nazareth. L’enfant grandissait et se fortifiait, tout rempli de sagesse, et la grâce de Dieu était sur lui.
Luc a bâti son « évangile de l’enfance » sur le parallélisme de la vie des deux enfants, Jean et Jésus.
Il termine en notant que Jean grandissait; pour Jésus il ajoute qu’il est « tout rempli de sagesse et la grâce de Dieu était sur lui » ; et tandis que Jean part dans les déserts (1, 80), Jésus demeure dans son village, dans la société. Le bourgeon est décrit : il s’agit d’attendre sa floraison. C’est le temps de la patience avant l’entrée en action.
Raphaël D, dominicain
Fête de la Présentation- Année A
« Lumière pour éclairer les nations » : c’est par cette appellation que Syméon désigne le petit bébé que Joseph et Marie viennent présenter au Temple, pour respecter les obligations de la Loi juive. Mais que voulons-nous dire, quand nous affirmons que le Christ est lumière ?
Il ne s’agit pas d’une simple formule poétique. Pour le croyant, il s’agit d’une réalité vitale. Le contraire de la lumière, c’est l’obscurité, la nuit, l’incompréhension totale, l’absence de sens. L’Ecriture nous présente, par la bouche de Syméon, le Christ comme celui qui donne sens à notre vie, celui qui permet d’y voir clair et de savoir où on va. Jésus lui-même déclare : « Celui qui me suit ne marche pas dans les ténèbres ».
C’est important, particulièrement de nos jours, où beaucoup pensent que la vie humaine, aussi bien la vie personnelle que l’existence même de notre humanité, est régie par le hasard, n’a pas de sens bien défini, et souvent est considérée comme absurde. Si je peux dire sincèrement que « ma lumière et mon salut c’est le Seigneur », c’est que je sais où je vais. Je sais aussi que « mon chemin c’est toi, Seigneur ! » Que faire, aujourd’hui, pour que le Christ soit vraiment « lumière pour éclairer les nations » ?
D’abord laisser le Christ faire la lumière en nous-mêmes. « Ainsi seront dévoilées les pensées secrètes d’un grand nombre » : le Christ, révélant Dieu, nous amène à nous révéler nous-mêmes. A la lumière de sa parole qui, pour reprendre les termes de la Lettre aux Hébreux, est « plus tranchante qu’aucune épée à double tranchant. Elle pénètre jusqu’à diviser âme et esprit, articulations et moelles.» Me voici donc, une fois de plus, mis au pied du mur pour un choix : ou me boucher les yeux et rester dans la nuit et le non-sens, ou m’ouvrir à la Lumière. Il faut me prononcer pour ou contre. Accueillir ou refuser. Dire oui ou non. C’est chaque fois la même chose avec Dieu, avec ses dons. Ils sont toujours épreuve de la foi. C’est pour cela que, très clairvoyant, Syméon prédit : « il provoquera la chute et le relèvement d’un grand nombre.» Il sera « un signe de division ». Jésus lui-même, parlant de lui et de son destin, se comparera, reprenant les termes mêmes du psaume 118, à « la pierre qu’ont rejetée les bâtisseurs ».« Celui qui tombera sur cette pierre sera brisé », ajoute-t-il. Mais sur cette pierre, celui qui fait confiance peut s’appuyer pour bâtir son existence. La lumière du Christ est un feu purificateur « pareil au feu du fondeur », écrit le prophète Malachie. C’est pourquoi je crois que le vrai disciple du Christ sera toujours un « empêcheur de tourner en rond », parce que la lumière qu’il a reçue, comme un feu qui purifie. Ou bien tu te « coules dans le moule », tu ne fais pas de vagues ; ou bien ta conduite » interpelle » et tu risques d’être incompris, haï, méprisé.
Cette prophétie de Syméon, prononcée en termes redoutables, ne doit cependant pas nous faire oublier que cette fête de la lumière est d’abord une fête de la joie. Le Christ, notre lumière, notre soleil, non seulement nous éclaire, mais nous illumine. Il est le salut. Certes, le Christ met en lumière nos propres conflits intérieurs, mais c’est pour nous permettre de les surmonter. Pour nous permettre de nous réconcilier avec nous-mêmes et avec les autres. Par sa résurrection, le Christ a « libéré ceux que la peur de la mort retenait toute leur vie dans l’esclavage », comme le proclame la Lettre aux Hébreux.
Ouvrez l’avenir ! Quelle belle fête que celle que nous célébrons aujourd’hui. Les parents qui offraient leur enfant étaient tournés vers le passé : l’obligation de satisfaire à un rite ancestral. Les vieillards, eux, ouvrent l’avenir. Plus question de rites ni de prêtres : s’ouvrent des perspectives nouvelles. Mais ces perspectives ne peuvent être appréciées que dans la foi, car la conclusion du récit est surprenante : on retourne à Nazareth, et tout se poursuit dans l’humilité d’une vie toute ordinaire. Décidément, les signes que fait celui qui a été présenté comme la « lumière des nations » sont bien discrets et vraiment peu spectaculaires. Il en est de même aujourd’hui.
Les homélies sur kerit.be