Homélie du 32ème dimanche du temps ordinaire
Abbé Jean Compazieu | 31 octobre 2021Elle a tout donné
Textes bibliques : Lire
Les trois textes bibliques de ce dimanche nous parlent du don généreux de ceux qui n’ont rien. Ils nous ont montré le geste de deux pauvres femmes, une païenne et une fille d’Israël. Elles ont donné tout ce qu’elles avaient pour vivre. Voilà deux magnifiques témoignages en ce jour où nous célébrons celui qui a donné sa propre vie pour notre salut et celui du monde entier.
L’Évangile nous présente une veuve très pauvre mais particulièrement généreuse. Cela se passe sur le parvis du temple de Jérusalem. Jésus s’y trouve pour donner un enseignement. Il recommande à tous de ne pas imiter les scribes quand ils pèchent par orgueil et par désir de paraître. Le plus grave c’est qu’ils volent les plus pauvres. Jésus nous met en garde contre tous ces dangers. Le salut qu’il est venu apporter au monde doit nous amener à être vrais avec nous, avec Dieu et avec les autres. Les apparences peuvent tromper les hommes mais Dieu voit ce qu’il y a dans le cœur de chacun.
Jésus s’est assis en face de la salle du trésor et il observe les gens qui déposent leurs offrandes. Il voit des riches qui donnent beaucoup, et c’est très bien. Mais voilà qu’arrive une veuve très pauvre. Elle n’a rien mais elle donne tout. Elle se moque de ce que pèsent ses deux petites pièces. Le plus important est ailleurs : elle aime Dieu ; elle aime le temple où il vit depuis des siècles ; elle respecte les prêtres et les scribes qui parlent de lui. C’est tout son cœur, tout son amour qu’elle met dans le tronc. Alors Jésus affirme qu’elle a donné plus que tous les autres. Son amour pour Dieu pèse bien plus que tout l’or du monde
La première lecture nous parle d’une veuve païenne. C’est chez elle qu’est envoyé le prophète Élie. Elle n’a rien à manger et son enfant va mourir. Quand le prophète lui demande “un petit morceau de pain”, l’épreuve est rude. Ce petit pain ne sera pas pour son enfant, pour qu’il vive encore un petit peu, mais comme celle du temple, elle donne tout.
En écoutant ces deux récits, comment ne pas penser à cette autre veuve, Marie debout au pied de la croix de son fils ! L’admiration de Jésus pour ces femmes vient de ce qu’il est justement celui qui livre sa vie. Il a été dépouillé de ses vêtements. Il vient de donner sa mère à son disciple et, à travers lui, à chacun de nous. “Lui qui était dans la condition de Dieu, n’a pas jugé bon d’être traité à l’égal de Dieu. Mais au contraire, il se dépouilla lui-même en prenant la condition de serviteur”. (Philippiens 2, 6-7)
Ce qui est étonnant dans l’Évangile de ce jour, c’est la première place donnée aux petits, aux exclus, à ceux qui sont les derniers en ce monde. Par contre, Jésus a des paroles très dures contre certains scribes qui ne cherchent qu’à être bien vus sur les places publiques, dans les synagogues et les dîners. Ils dévorent les biens des veuves au lieu de leur venir en aide. C’est d’autant plus grave qu’elles sont réduites à la misère. En agissant ainsi, ils trahissent leur fonction.
C’est aussi pour nous que cet évangile a été écrit et proclamé : Méfiez-vous de ceux qui cherchent les premières pages dans les journaux, les succès dans les sondages, les grands discours à la télévision. Cet orgueil n’est pas seulement le lot des scribes du temps de Jésus. Il nous menace tous plus ou moins. La tentation de rechercher les premières places est toujours bien présente. C’est toujours agréable de recevoir des éloges et d’attirer l’admiration des autres. Mais le plus important c’est le regard de Dieu. Il voit mieux que nous ce qu’il y a dans le cœur de chacun. Ce qui fait la valeur d’une vie c’est notre amour de tous les jours pour tous ceux et celles qui nous entourent. Georges Guynemer disait : “Tant qu’on n’a pas tout donné, on n’a rien donné.”
Ces textes bibliques rejoignent l’Évangile des béatitudes : “Heureux les pauvres de cœur. Ils sont proclamés heureux, non à cause de leur misère mais parce que le Royaume des cieux est à eux. La considération et la reconnaissance des hommes ne sont rien par rapport u don de Dieu.
Pour bien comprendre toute la portée de cet Évangile, nous nous tournons vers la croix du Christ. Nous comprenons alors qu’il a tout donné jusqu’au bout. Et il continue à se donner pour chacun de nous. La lettre aux hébreux nous rappelle que la Passion du Christ a changé l’histoire. En lui, tous les hommes sont sauvés. Cet évangile nous appelle donc à apprendre à vivre sous le regard de Dieu et non celui des hommes. Il nous provoque surtout à réviser le critère de notre générosité : Ce qui prime ce n’est pas la quantité de ce que nous donnons mais le dépouillement effectif de ce à quoi nous tenons le plus. En donnant, on a parfois l’impression de perdre, de se perdre. Donner c’est gagner pour la vie éternelle.
En célébrant cette Eucharistie, nous nous tournons vers le Seigneur par l’intermédiaire de Marie, la femme pauvre qui a donné toute sa vie à Dieu pour nous ; demandons-lui le don d’un cœur pauvre, mais riche d’une générosité joyeuse et gratuite.
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- Désormais vous trouverez plusieurs approches sur l’Évangile du jour (textes et audio) : https://puiseralasource.org/evangile-et-parole-du-jour/
Sources : Revues Fiches dominicales et Feu nouveau – Homélies pour l’année B (Amédée Brunot) – Ta parole et ma joie (Joseph Proux) – Homélies de l’année liturgique B (Simon Faivre) – Reste avec nous quand vient le soir (Lorette Lepage) – guide Emmaüs des dimanches et fêtes (Jean-Pierre Bagot)
« Jésus s’était assis dans le Temple en face de la salle du trésor, et regardait comment la foule y mettait de l’argent. Beaucoup de riches y mettaient de grosses sommes. Une pauvre veuve s’avança et mit deux petites pièces de monnaie. » (Mc 12:41)
Jésus est ému par ce beau geste de la femme : « Cette pauvre veuve a mis dans le tronc plus que tout le monde. » (Mc 12:43) Deux piécettes données expriment un don immense ! Un presque rien, mais c’est tout ce qu’elle possède… Quel contraste entre la discrétion de la pauvre veuve qui s’éclipse pour apporter sa modeste contribution et les offrandes somptuaires des vaniteux qui s’affichent ! « Car tous, ils ont pris sur leur superflu, mais elle, elle a pris sur son indigence : elle a tout donné, tout ce qu’elle avait pour vivre. » (Mc 12:44) Le don qu’elle fait semble bien dérisoire à côté des flots d’argent de ces riches vantards. C’est son cœur qu’elle met dans le panier quand les autres se contentent d’y poser leur superflu, ne les privant guère. Le geste discret mais sublime de cette femme illumine sa grandeur d’âme. Quelle générosité ! Le don en toute discrétion ! C’est ce que Dieu aime. « Quand tu fais l’aumône, ne fais pas sonner la trompette devant toi, comme les hypocrites qui se donnent en spectacle dans les synagogues et dans les rues, pour obtenir la gloire qui vient des hommes. Amen, je vous le déclare : ceux-là ont reçu leur récompense. » (Mt 6:2)
La générosité ne se mesure pas à l’abondance de don. Elle n’est pas dans les éclats de publicité où chacun se montre. Ce qui compte ce n’est pas ce que nous donnons mais notre manière de donner ! L’altruisme. Une ouverture de cœur en toute simplicité. Jésus nous renvoie à notre attitude dans nos rapports sociaux. Tout ce qui est clinquant nous séduit et attire notre attention. Tout ce qui est humble et discret reste souvent dans l’oubli… Jésus nous invite à regarder au-delà de ce qui se voit. Ne nous arrêtons pas aux apparences, si belles soient-elles, mais appliquons-nous plutôt à découvrir la beauté cachée au fond des cœurs. Ne sommes-nous pas dans de nombreuses circonstances comme ces riches, pleins de vanité et d’hypocrisie. On aime se mettre sur le devant de la scène. On veut paraître bien plus que ce qu’on est réellement ! Nous échafaudons une certaine mise en scène pour nous mettre en valeur… Le faux semblant et le tape-à-l’œil nous tentent, même inconsciemment. En aidant les autres, nous arrive-t-il parfois de rechercher la louange et l’admiration ? Notre cœur est-il centré sur Dieu seul ? La charité est-elle la seule intention qui nous guide ?
L’Évangile de ce dimanche est une invitation au partage, même avec le peu que nous possédons. Nous connaissons tous nos limites et quelquefois un quotidien difficile. Nos obligations familiales et professionnelles sont parfois lourdes à porter ! Mais chacun de nous a toujours quelque chose à offrir aux autres. La générosité ne se limite pas uniquement au don en nature. Elle se présente également sous différentes formes d’aide et d’attention au prochain. Savoir ouvrir autant son cœur que son porte-monnaie… Le bénévolat par le don de son temps et de sa personne. Notre attitude positive, même anodine, peut illuminer un chemin. Un ‘petit rien’, s’il est l’expression d’une amitié sincère ou d’un amour vrai peut changer une vie. Un sourire qui déride une âme affligée. Un regard apaisant qui remonte le moral. Une poignée de main qui réchauffe le cœur. Un mot qui redonne confiance. ‘Bonjour’, ‘Merci’, ‘Pardon’, ‘Je t’aime’… Autant de mots simples et de gestes ordinaires qui donnent une saveur à la vie ! En plus de la joie du service, c’est la joie de la rencontre et de la vie fraternelle. Épanouissons-nous et apportons de la joie en rendant service. Soyons généreux et ouverts aux autres ! Jésus nous dit de le vivre en toute discrétion, sans le montrer, pour que ce soit réellement par Amour. Non pas pour être bien vu ou pour recevoir la gratitude des autres. Donner sans rien attendre en retour. C’est cela l’Amour !
Ne nous disons surtout pas que nous sommes trop pauvres pour donner, trop timides pour aller vers les autres, trop nuls pour leur proposer nos services. N’hésitons pas à offrir le meilleur de nous-mêmes pour améliorer le quotidien de nos proches. Selon la disponibilité et les compétences de chacun, nous avons notre place et notre part de contribution à la vie communautaire. Il y a forcément un service que nous pouvons rendre, une petite chose qui peut faire plaisir à quelqu’un. Dans toutes nos actions, soyons discrets et sincères. Quelles que soient les circonstances, soyons vrais, simples et accueillants. Ouvrons nos mains et notre cœur. N’attendons pas d’avoir plus pour ne donner que du superflu. À trop attendre, nous risquerions bien de mourir sans avoir rien fait de bien !
Saint Jacques nous rappelle que la charité est au cœur de la foi chrétienne : « Mes frères, si quelqu’un prétend avoir la foi, sans la mettre en œuvre, à quoi cela sert-il ? Sa foi peut-elle le sauver ? Supposons qu’un frère ou une sœur n’ait pas de quoi s’habiller, ni de quoi manger tous les jours ; si l’un de vous leur dit : ‘Allez en paix ! Mettez-vous au chaud, et mangez à votre faim !’ sans leur donner le nécessaire pour vivre, à quoi cela sert-il ? Ainsi donc, la foi, si elle n’est pas mise en œuvre, est bel et bien morte. » (Jacques 2:14-17) Avoir le cœur sur la main. Seul l’amour peut nous permettre de construire un monde meilleur. Le fait d’être généreux et désintéressé laisse une empreinte sur les autres autant que sur nous.
Nguyễn Thế Cường Jacques