24ème dimanche du temps ordinaire (C)
Abbé Jean Compazieu | 4 septembre 2022
Qui suis-je pour que Dieu me prenne sur ses épaules ?
Homélie
Textes bibliques : Lire
Dans la Bible et dans la liturgie, nous trouvons des formules qui sont répétées trois fois : le Kyrie, le Sanctus, l’Agnus. Pierre qui avait renié Jésus doit s’y prendre à trois fois pour accueillir son pardon. Et aujourd’hui, nous avons trois paraboles de la miséricorde qui sont intimement liées. Ces répétitions veulent donc souligner l’importance du message. Ces trois paraboles nous disent la joie et la conversion : “ce qui était perdu est retrouvé”.
Jésus se trouve se trouve devant des gens qui viennent à lui pour l’écouter. D’autres ne sont là que pour récriminer : “Tu te rends compte, il va chez des gens de mauvaise vie ! Pourquoi s’intéresser à eux ? Ils ne valent pas la peine qu’on aille s’occuper d’eux… Ils sont irrémédiablement perdus…” Alors Jésus élève la voix pour qu’on l’entende bien. Et il se met à leur parler en paraboles.
Un homme avait cent brebis. Un soir, il s’aperçoit qu’il lui en manque une, celle qui est un peu folle et qui n’en faisait qu’à sa tête. Il laisse là le troupeau et part à sa recherche. Il finit par la trouver prise dans les épines. Rentré fou de joie à la bergerie, il invite ses amis pour faire la fête car la brebis perdue est retrouvée. Une femme perd une pièce d’argent, sans doute une des rares qu’elle possédait. Elle part à sa recherche : quand elle l’a retrouvée, elle invite ses amies pour faire la fête car la pièce est retrouvée.
Le plus jeune des fils demande sa part d’héritage et quitte la famille. Il se perd, il s’égare, il jouit des plaisirs faciles de la vie. Mais un jour, il a tout perdu ; il décide alors de revenir vers son père. Et le père invite ses amis à faire la fête car l’enfant perdu est retrouvé.
“Cet homme fait bon accueil aux pécheurs”. Jésus regarde un à un ceux qui récriminent contre lui. Il voudrait leur faire comprendre que le Père est semblable à ce berger. Son bonheur c’est d’avoir retrouvé sa brebis, c’est un fils qui se convertit, un fils qui revient vers son Père. Tout cela est pour lui un trésor inestimable ; chaque enfant de Dieu est unique. Chacun a autant d’importance que tous les autres. Les pécheurs qui reviennent vers lui sont le trésor de Dieu, sa préférence, même ceux qui ont commis le pire. Ceux qui se croient justes ne le comprennent pas. Il est difficile pour eux d’accepter que ceux qui ont péché puissent se retrouver avec eux enfin réunis.
Tout cela n’est autre qu’une question de pardon Nous pensons tous à ceux qui se sont fourvoyés dans des idéologies qui les ont poussés vers la violence. Il faut savoir que certains ont reconnu leurs égarements et se sont convertis à Jésus Christ. Rien n’est impossible pour Dieu. La miséricorde c’est cette faculté d’accueillir la demande de pardon de l’autre et de pardonner.
La première lecture nous révèle à sa manière la miséricorde de Dieu, plus grande que les infidélités de son peuple. Dieu demeure toujours fidèle à ses promesses. Toute la Bible nous met en face des infidélités de son peuple mais surtout du pardon et de la miséricorde de Dieu. C’est cela l’histoire de l’alliance entre Dieu est son peuple : un partenariat pour œuvrer ensemble à une cause commune.
Mais il nous faut aller plus loin : si Dieu offre son pardon, il offre aussi sa confiance. Saint Paul en est un bel exemple : lui qui était un grand pécheur a été pardonné ; et surtout, il a été chargé de mission ; il a reçu un ministère ; il est devenu un grand témoin de la foi. Cela, nous le voyons aussi dans notre monde d’aujourd’hui : des gens qui persécutaient les chrétiens se convertissent et se mettent à témoigner de leur rencontre avec Jésus Christ. Ce qui est impossible aux yeux des hommes est toujours possible pour Dieu.
Dieu ne veut qu’aucun ne se perde. S’il a envoyé son Fils, c’est pour aller à la rencontre des hommes. Il est venu chercher et sauver ceux qui étaient perdus. Sa miséricorde est bien plus grande que tous les péchés de ce monde. Dieu veut croire à la capacité de chacun de se convertir. Il n’enferme personne dans son passé. Il nous prend par la main pour nous sortir des chemins de perdition et nous conduire vers la vraie vie.
Ces trois paraboles nous disent l’amour démesuré de Dieu. Il est comme ce berger qui abandonne son troupeau pour aller à la recherche de la brebis folle. Il est comme ce père qui a les bras grands ouverts pour accueillir son fils perdu. Chaque retrouvaille est source d’une grande joie. Nous devons nous réjouir de ce visage de miséricorde de Dieu, de sa patience, de son immense bonté toujours à la recherche de ce qui est perdu.
Comme le frère aîné de la parabole, certains se révoltent de ce qu’ils considèrent comme une injustice. Mais Dieu dira : “Toi mon enfant, tu es toujours avec moi, et tout ce qui est à moi est à toi”. En ce jour, nous faisons nôtre les paroles de ce chant : “Dieu nous accueille en sa maison, Dieu nous invite à son festin, jour d’allégresse et jour de joie, Alléluia”
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Pour aller plus loin : Préparons dimanche
Sources : Revues Signes et Fiches dominicales – Missel dominical des dimanches et fêtes des trois années – Célébrons dimanche, Assemblées de la prière – l’Évangile de la miséricorde (Cardinal Christoph Shönborn)
« Les publicains et les pécheurs venaient tous à Jésus pour l’écouter. Les pharisiens et les scribes récriminaient contre lui : ‘Cet homme fait bon accueil aux pécheurs, et il mange avec eux !’ » (Lc 15:2) L’attitude de Jésus va à l’encontre du puritanisme des hommes de Loi. Ils sont scandalisés de voir Jésus, un homme juste, se mélanger avec les pécheurs. Alors, par trois petites paraboles, Jésus leur fait voir la démesure de l’Amour de Dieu !
Tout l’Évangile de ce dimanche est éclairé par la joie des retrouvailles ! C’est la joie du berger qui retrouve sa brebis égarée. « Réjouissez-vous avec moi, car j’ai retrouvé ma brebis, celle qui était perdue ! » (Lc 15:6) C’est la joie de la femme qui retrouve sa pièce d’argent. « Réjouissez-vous avec moi, car j’ai retrouvé la pièce d’argent que j’avais perdue ! » (Lc 15:9) C’est surtout le bonheur d’un père quand il retrouve son fils difficile. « Mangeons et festoyons, car mon fils que voilà était mort, et il est revenu à la vie ; il était perdu, et il est retrouvé. » (Lc 15:23-24) Fous de joie, ces trois personnages invitent leurs amis pour faire la fête. « Je vous le dis : C’est ainsi qu’il y aura de la joie dans le ciel pour un seul pécheur qui se convertit, plus que pour quatre-vingt-dix-neuf justes qui n’ont pas besoin de conversion. » (Lc 15:7) Ces trois paraboles nous dévoilent le cœur de Dieu. Un amour débordant ! Chacun de nous est unique à ses yeux. Chacun a autant d’importance que tous les autres.
« Si l’un de vous a cent brebis et qu’il en perd une, n’abandonne-t-il pas les quatre-vingt-dix-neuf autres dans le désert pour aller chercher celle qui est perdue, jusqu’à ce qu’il la retrouve ? » (Lc 15:4) Dieu ne veut pas qu’un seul de nous soit perdu. Sa miséricorde est bien plus grande que toutes nos fautes. Jésus accueille les gens mal vus par ceux qui se croient exempts d’erreurs. Il établit une relation profonde et amicale en mangeant avec eux. Il va à la rencontre de ceux qui sont loin de Dieu. Jésus ne cautionne pas le péché, mais il montre aux pécheurs le chemin de conversion : une immersion dans la miséricorde divine. Son cœur, comme celui du père de l’enfant prodigue, ne s’épuise pas à aimer et à pardonner. Il croit en la capacité de chacun à se relever, à se convertir, à reprendre le bon chemin. Il n’enferme personne dans son passé. L’épisode de la rencontre de Jésus avec Marie-Madeleine dans l’Évangile de Luc (7:36-50) le souligne amplement. Le pardon accordé par Jésus à cette femme pécheresse a été un scandale pour les invités à la table de Simon le pharisien. « Ce ne sont pas les gens bien portants qui ont besoin du médecin, mais les malades. Je ne suis pas venu appeler des justes, mais des pécheurs. » (Mc 2:17) leur dit-Il. Une image éclairante !
Malgré cela, l’image d’un Dieu qui juge et punit reste encore très vivace dans l’esprit de nombreuses personnes. Un Dieu qui fait peur ! Cette image a fait tant de mal ! Beaucoup se détournent de la foi à cause de cette interprétation inappropriée de la Parole de Dieu. Certes, la réalité du châtiment est clairement exprimée dans les Écritures mais l’Évangile de ce dimanche souligne avec force l’Amour miséricordieux de Dieu. Particulièrement, la parabole du ‘fils prodigue’ fait ressortir cet amour inconditionnel : l’immense joie d’un père qui retrouve son fils dilapidateur, en même temps, il ne tient pas rigueur à l’aîné pour sa jalousie envers son frère. Le comportement du fils aîné représente exactement l’attitude des hommes de Loi. Ceux-là n’ont pas compris la gratuité de l’amour divin. À leurs yeux, il y a une incompatibilité totale entre Dieu et les pécheurs. Ils préconisent l’hostilité envers les fautifs alors que Jésus se rapproche d’eux. Dieu nous offre non seulement son pardon mais aussi sa confiance. Il nous aime tel que nous sommes et malgré nos faiblesses. Dans sa lettre à Timothée, saint Paul témoigne : « Je suis plein de gratitude envers celui qui me donne la force, le Christ Jésus notre Seigneur, car il m’a estimé digne de confiance lorsqu’il m’a chargé du ministère, moi qui étais autrefois blasphémateur, persécuteur, violent. Mais il m’a été fait miséricorde, car j’avais agi par ignorance, n’ayant pas encore la foi ; la grâce de notre Seigneur a été encore plus abondante, avec elle la foi, et avec l’amour qui est dans le Christ Jésus. » (1 Timothée 1:12-14) Et dans sa seconde lettre aux Corinthiens, il nous recommande avec insistance de nous tourner vers Dieu malgré nos erreurs : « Au nom du Christ, laissez-vous réconcilier avec Dieu. » (2 Cor 5:20) Un bel exemple de conversion !
Dieu a fait preuve de miséricorde, de grâce et de pardon à chacun de nous. À notre tour, soyons indulgents envers nos proches. Saint Jean nous rappelle cet amour fraternel : « Bien-aimés, puisque Dieu nous a tellement aimés, nous devons, nous aussi, nous aimer les uns les autres. Dieu, personne ne l’a jamais vu. Mais si nous nous aimons les uns les autres, Dieu demeure en nous, et, en nous, son amour atteint la perfection. » (1 Jn 4:11-12)
Nguyễn Thế Cường Jacques