Homélie du 3ème dimanche de Pâques
Abbé Jean Compazieu | 30 avril 2011
Textes bibliques : Lire
Nous comprenons tous la tristesse et la déception de ces deux disciples de Jésus dont nous parle l’évangile de ce dimanche. Ils l’ont vu arrêté, condamné et mis à mort sur une croix. Ils repartent complètement désemparés par les événements tragiques qu’ils viennent de vivre. Ils avaient tout quitté pour suivre Jésus. Ils comptaient sur lui pour libérer le peuple d’Israël de l’occupation des soldats romains. Mais en quelques heures, tout a basculé ; tout espoir humain est perdu. Ils repartent chez eux pour oublier ce cauchemar.
Quand nous lisons cet évangile, il ne faut pas seulement y voir la belle histoire qui se termine bien. Le plus important c’est d’accueillir le message que saint Luc annonce aux communautés chrétiennes de son temps et à celles d’aujourd’hui. Il faut le dire et le redire : ce récit évangélique nous parle de nous et de notre vie. Chacun d’entre nous est ce deuxième disciple, celui qui n’est pas nommé. Comme lui, nous marchons souvent sur la route en tournant le dos à Jérusalem et à nos espérances. Le doute, la tristesse et le découragement nous accablent ; nous gardons les yeux rivés sur nos problèmes et nos ennuis.
Mais il y a quelqu’un qui cherche à nous rejoindre pour marcher à nos côtés. Comme les deux disciples, nous pouvons lui parler de ce qui nous accable et nous fait souffrir. Déjà le premier Testament affirmait que Dieu est proche de ceux qui l’invoquent. C’est repris d’une manière encore plus forte dans l’évangile. En Jésus Christ, il est “Emmanuel”, Dieu avec nous jusqu’à la fin des temps. Son amour nous est acquis une fois pour toutes et, en ce qui le concerne, rien ne peut nous en séparer. Il attend de nous que nous lui ouvrions la porte de notre cœur et de notre vie.
Le problème, c’est que nous ne savons pas le reconnaître. Il est là, bien présent, mais nous sommes ailleurs. C’est ce qui est arrivé aux disciples d’Emmaüs. Nous pensons aussi à Marie Madeleine. Quand Jésus lui est apparu, elle croyait voir le jardinier. Quant aux apôtres, ils pensaient voir un fantôme. Ces précisions sont très importantes pour nous. Elles nous disent que les yeux du corps ne suffisent pas pour reconnaître le Christ ressuscité. Nous avons besoin d’être conduits au-delà de l’immédiatement visible. Jésus veut nous faire franchir un seuil, nous mener à un acte de foi qui dépasse l’expérience humaine de la vie et de la mort. Pour cela, deux étapes sont nécessaires.
La première, c’est ce qui se passe sur la route : le Christ ouvre nos yeux à “l’intelligence des Ecritures”. C’est en regardant vers Dieu et en écoutant sa parole que la lumière revient et que l’espoir renaît. La Bible ne parle que si on la fait parler. C’est Jésus qui ouvre le Livre pour nous chrétiens d’aujourd’hui. Comme autrefois à Nazareth, il nous redit : “Aujourd’hui, cette Ecriture est accomplie pour vous qui l’entendez” (Luc 4. 21). Cette bonne nouvelle fait renaître l’espérance dans le cœur des disciples. Leur cœur devient “brulant” tandis qu’il leur explique les Ecritures. Ils découvrent que même la mort de Jésus a du sens ; un avenir nouveau s’ouvre pour eux. Nous aussi, nous avons à demander au Seigneur d’ouvrir nos cœurs à l’intelligence des Écritures. Nous n’aurons jamais fini de comprendre ce que Dieu nous dit dans le Livre de sa Parole.
La deuxième étape se passe à la maison. Elle commence par cette prière : “Reste avec nous !” Une rencontre aussi bouleversante, on ne va pas l’interrompre parce qu’on est arrivé à un carrefour. L’inconnu qui est devenu le Maître va devenir le compagnon avec qui on partage le pain. Alors, leurs yeux vont s’ouvrir et ils pourront le reconnaître. Ils savent définitivement que Jésus crucifié est vivant. Cette bonne nouvelle, ils ne peuvent la garder pour eux. Ils se mettent en route pour partager leur foi toute neuve.
Si saint Luc nous raconte longuement cette rencontre des disciples d’Emmaüs avec le Ressuscité, c’est pour nous parler de nous. Comme les disciples, nous sommes souvent englués dans les ténèbres. L’actualité vertigineuse de ces derniers mois nous laisse bien désemparés. Tous les jours, on nous parle de guerres, de violences et de crises. Alors, nous avons du mal à donner du sens à ce que nous avons à vivre. Pour parvenir à la lumière de la foi, nous avons besoin d’être éclairés et réchauffés par la Parole de Dieu et de l’Eglise. Nous avons également besoin d’être fortifiés par la Pain eucharistique. Cette rencontre avec le Christ vivant nous pousse à nous lever pour annoncer cette bonne nouvelle à tous nos frères.
L’Eucharistie, c’est toi, Seigneur, qui continues à rester avec nous. Lorsque l’avenir nous semble bouché, tu viens nous ouvrir un chemin d’espérance. Donne-nous ton Esprit Saint pour continuer notre route et porter aux autres le joyeux message de ta présence fidèle. Amen
D’après diverses sources
http://preparonsdimanche.puiseralasource.org/
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PU
Seigneur nous te présentons tous ces jeunes qui sont désespérés par les souffrances qui les accablent; donne-leurs la foi et le courage de continuer avec persévérance à espérer qu’un jour leurs souffrances se transformera comme une joie avec toi à leurs coté .
Dieu qui est vraiment ressuscité écoute et prends pitié !
Merci Rosette, de tout mon cœur.
LE CHRIST RECONSTITUE SA COMMUNAUTÉ
D’où vient que cette page célèbre des disciples d’Emmaüs nous touche à ce point ? N’est-ce pas parce que nous percevons qu’il y a là davantage que le récit d’un événement lointain ? Car si Luc tait le nom du second marcheur, n’est-ce pas pour inviter le lecteur à se reconnaître dans le compagnon de Cleophas ? Serions-nous les acteurs de la scène ?…
Ce chef d’œuvre de Luc est admirablement composé en 5 parties qui correspondent l’une à l’autre : DISPERSION DE LA COMMUNAUTE
PARTAGE SUR LES ECRITURES
INVITATION HOSPITALITE « RESTE AVEC NOUS »
PARTAGE DU PAIN
RECONSTITUTION DE LA COMMUNAUTE
1. DISPERSION
« Le 3ème jour après la mort de Jésus, deux disciples faisaient route vers un village appelé Emmaüs, à 2 heures de marche de Jérusalem, et ils parlaient de tout ce qui s’était passé »
Ces deux jeunes gens avaient été éblouis au passage de Jésus : « Quelle parole de feu ! Quelle puissance pour faire des miracles ! » Et ils s’étaient mis à le suivre, sûrs qu’il allait sauver le pays de la détresse. Ah l’entrée des rameaux, l’enthousiasme populaire ! …Et puis patatras ! En quelques heures : complot des autorités, arrestation, condamnation, croix ! Echec épouvantable. Ce Jésus, avec son utopie de la non violence, nous avait trompés. Rien d’autre à faire que de rentrer à la maison. A Emmaüs, le lieu où jadis un vrai chef, Judas Maccabée, avait remporté la victoire par les armes (1 Macc 3, 40…). La croix de Jésus a donc eu un effet centrifuge : l’échec a émietté la communauté des disciples, effondrés par l’issue horrible et inattendue.
Ainsi encore combien de baptisés, jeunes militants des mouvements d’action catholique, ont tourné le dos à l’Eglise qui les décevait tout le temps ? De beaux discours sans effet. Des liturgies soporifiques. Des croyants endormis. Et le mal partout triomphant. Che Guevara n’avait-il pas raison ? …
2. PARTAGE DES ÉCRITURES
En ce lendemain de shabbat et de Pâque, beaucoup de gens se pressent sur les routes. Un homme arrive à hauteur des deux disciples.
« De quoi causiez-vous en marchant ? – Tu es bien le seul à ignorer les événements des derniers jours – Quoi ? – Ce qui est arrivé à Jésus de Nazareth. C’était un prophète puissant mais les chefs des prêtres et nos dirigeants l’ont livré, fait condamner à mort, crucifié….Nous, nous espérions qu’il serait le libérateur d’Israël. Voici déjà le 3ème jour. A vrai dire, nous avons été bouleversés par quelques femmes : au tombeau, elles n’ont pas trouvé le corps de Jésus. Elles racontaient même qu’elles ont eu une apparition : des anges leur ont dit qu’il est vivant ! Quelques compagnons sont allés au tombeau, ont trouvé tout comme les femmes avaient dit. Mais lui, ils ne l’ont pas vu ».
L’Eglise parle toujours de résurrection, des pèlerins vont vénérer le tombeau à Jérusalem, on nous montre un soi-disant « saint suaire » Mais on ne voit rien ! Peut-on croire toutes « ces bonnes femmes » qui gazouillent dévotement des alléluias dans des églises presque vides ? N’est-ce pas complètement débile de croire pareilles fadaises ? La modernité se doit de rejeter ces superstitions d’un autre âge.
(Le voyageur leur dit) Vous n’avez donc pas compris ? Comme votre cœur est lent à croire tout ce qu’ont dit les prophètes ! Ne fallait-il pas que le Messie souffrit tout cela pour entrer dans sa gloire ? » Et en partant de Moïse et tous les prophètes, il leur expliqua dans toute l’Ecriture ce qui le concernait.
Qu’il est dommage que Luc ne transcrive pas cette leçon d’exégèse du Seigneur ! Comment a-t-il expliqué aux disciples qu’il était le Messie authentique ? Pour le deviner, nous avons les Evangiles et les Lettres des Apôtres : truffés de citations des Ecritures juives, on y voit comment les premiers disciples (juifs) se sont convertis à une nouvelle lecture. Non plus polarisée sur l’attente d’un Messie triomphant, d’une victoire fulgurante sur les ennemis, d’une indépendance nationale. Mais attentive à des passages peu connus, à l’écoute d’un autre message, à la redécouverte de la Pâque comme mystère de mort et de résurrection.
Si Jésus n’avait pas correspondu aux Ecritures, jamais ils ne se seraient convertis.
Ce livre que nous appelons « Ancien Testament » n’est pas périmé : l’Eglise a compris qu’il fallait le conserver, qu’il contenait bien les racines de notre foi. « Agneau pascal, Alliance, Amour de Dieu et du prochain, Exode… » : impossible de comprendre le Nouveau Testament sans l’Ancien.
3. L’INVITATION
Les trois voyageurs ont cheminé pendant des kilomètres, les deux jeunes interrogeant sans cesse l’inconnu, stupéfaits de découvrir des aspects auxquelles ils n’avaient jamais pensé. Il faut longtemps pour changer d’avis, pour quitter son désespoir et retrouver le vrai sens des Ecritures.
Mais peu à peu leur cœur froid « se réchauffe » : la révélation allume en eux un feu nouveau. Plusieurs heures de dialogue ont passé : tout à coup là-bas leur village.
Quand ils approchèrent du village où ils se rendaient, Jésus fit semblant d’aller plus loin.
Mais ils s’efforcèrent de le retenir : « Reste avec nous : le soir approche et déjà le jour baisse ».
Il entra donc pour rester avec eux.
On parle parfois de « l’auberge d’Emmaüs » : il est plus probable que les disciples invitent l’inconnu à entrer dans leur maison puisqu’ils se rendaient dans ce village. Il s’agit du moment clef du récit. La conversation en chemin n’a pas roulé sur des détails mais sur l’essentiel : la recherche de la vérité, la découverte de la libération de l’homme. Et l’inconnu a ouvert des horizons insoupçonnés, il a apporté une lumière.
La quête de la vérité ne se réduit pas à des échanges impersonnels ou futiles, au choc d’arguments contradictoires. L’interprétation des Ecritures pousse à inviter, à offrir l’hospitalité, à ouvrir sa maison.
Et Luc écrit merveilleusement : « il entra pour rester avec eux ». Effectivement cette « demeure » va se réaliser, mais d’une façon insoupçonnée.
4. LE PARTAGE DU PAIN
Quand il fut à table avec eux, il prit le pain, dit la prière de bénédiction, le rompit et le leur donna. Alors leurs yeux s’ouvrirent et ils le reconnurent. Mais il disparut à leurs regards.
Tout repas commence toujours de la même façon : le père prend la galette de pain posée sur la table, il l’élève en rendant grâce à Dieu à qui l’on doit la nourriture, il la rompt en morceaux qu’il offre à chacun. Or ici très curieusement c’est l’invité qui prend l’initiative ! C’est lui le président du repas.
« Prendre – Bénir – Rompre – Donner » : les 4 actions que Jésus faisait chaque jour avec ses disciples, qu’il fit notamment le dernier soir en symbolisant sa « pâque », sa présence dans ce pain, en se donnant à ses frères pour sceller l’alliance éternelle avec eux. « Leurs yeux s’ouvrent et ils le reconnaissent ». Car on ne connaît pas bien Jésus si on le regarde comme un chef à suivre, un homme parmi l’humanité en route, un professeur qui enseigne. Encore faut-il l’inviter, lui ouvrir sa maison, attendre de lui le Pain de Vie.
« Il disparut à leurs regards ». Il faut passer du VOIR au CROIRE. D’un Jésus que l’on acclame et que l’on suit à un Seigneur qui vous habite. D’une ECOUTE à un MANGER. « Reste avec nous » : la prière de Cléophas est exaucée d’une façon qu’il n’aurait pu imaginer. Si les disciples ne voient plus Jésus, ce n’est pas parce qu’il s’est éloigné mais PARCE QU’IL LES HABITE. Ils l’avaient invité dans leur maison : maintenant ils découvrent qu’ILS SONT EUX – MÊMES SA DEMEURE.
5. LA COMMUNAUTÉ RECONSTITUÉE.
Alors ils se dirent l’un à l’autre : « Notre cœur n’était-il brûlant en nous tandis qu’il nous parlait sur la route et qu’il nous faisait comprendre les Ecritures ? ». A l’instant même, ils se levèrent et retournèrent à Jérusalem. Ils y trouvèrent réunis les onze Apôtres et leurs compagnons qui leur dirent : « C’est vrai ! Le Seigneur est ressuscité ! Il est apparu à Simon Pierre ! ». A leur tour, ils racontèrent ce qui s’était passé sur la route et comment ils l’avaient reconnu quand il avait rompu le pain.
La rencontre du Seigneur – Parole de Lumière et Pain de Vie – ne fige pas les croyants dans le ravissement d’une extase ni ne les enferme dans un oratoire chaleureux pour jouir en paix de sa grâce. Au contraire, elle les relève, les met debout, les re-suscite, les fait sortir, les fait courir. Elle les renvoie vers ceux qu’ils avaient quittés.
Dans la nuit, les deux amis foncent vers Jérusalem, cette ville où se dresse le gibet d’ignominie et où les autorités cherchent peut-être les disciples du crucifié. Peu importe le danger. Il faut à tout prix, d’abord, retrouver les frères et les sœurs. L’Eglise dynamitée par la croix se reconstitue dans la nouvelle de la Résurrection. Avec Pierre, elle accueille tous ceux et celles qui se sont laissés rencontrer par le Christ, qui ont accepté de relire avec lui les Ecritures, qui ont aspiré à sa présence, qui ont mangé son Pain offert.
« C’est vrai ! ». Et chacun peut raconter sa propre histoire, son cheminement, ses épreuves, ses appels, ses découragements, ses doutes et puis, enfin, son ouverture dans la lumière.
CONCLUSION
Cette page magnifique de Luc nous montre comment nous pouvons et devons encore aujourd’hui évangéliser.
Dans notre vieille Europe, des multitudes de baptisés se sont détournés de l’Eglise. Parfois parce qu’elle s’est bloquée dans le légalisme, les rites désuets, un vocabulaire incompréhensible ; parfois aussi, hélas, à cause de la conduite scandaleuse de quelques responsables. Et puis le monde court tellement vite : le christianisme n’a-t-il pas fait son temps ? Ne va-t-on pas vers un consensus religieux relativisant les dogmatismes de jadis ? Les nouvelles générations ne marquent plus d’intérêt pour cette Eglise ringarde, ce catéchisme indigeste, ces cérémonies ennuyeuses. Et toutes les brocantes regorgent de crucifix désormais inutiles.
Que faire ? Non s’habituer à cette dérive, non se plaindre du malheur du temps, non maudire ces gens qui s’éloignent. Mais, comme Jésus, les rejoindre sur leur route. Tout bonnement, comme des citoyens du monde, partageant soucis et responsabilités, venir à leur hauteur. Sans reproches, sans réponses toutes faites. En se mêlant avec intérêt à leur conversation : « De quoi discutez-vous en chemin ? »…
Toujours il y aura un moment où l’on tombera sur le problème du mal, sur le scandale de la souffrance et de la détresse des hommes, sur la philosophie, sur les religions. Aborder la question Jésus. Qu’en est-il de lui ? « Qui dites-vous que je suis ? » : il continue à poser cette question essentielle à chacun.
Alors il y a les Ecritures, cette Bible dont on n’a que de vagues souvenirs, des épisodes enfantins….Quelle est cette histoire ?…Savons-nous montrer la merveilleuse révélation progressive du Messie Seigneur ? Connaissons-nous suffisamment la Bible que pour pouvoir discuter, tenter de prouver que la foi se justifie, qu’elle n’est pas une antique tradition pieuse, une consolation facile.
« Notre cœur était tout brûlant lorsqu’il nous ouvrait les Ecritures » : Quelle joie d’ouvrir l’écrin, de faire entendre une parole actuelle, d’aider à comprendre, de manifester le Christ.
Jusqu’à ce que se murmure la demande : « Reste avec nous ». Ouvrir son cœur, sa porte à l’autre. Se rendre au repas de fête où l’Hôte offre un Pain tout simple mais riche de toute la Vérité perçue dans les Ecritures.
Ne plus exiger des visions, des apparitions, des preuves. Devenir soi-même la preuve, le signe que l’on a fait la rencontre décisive, que l’on a hâte de retrouver Pierre et les autres.
Certes ce sont tous des lâches, des pécheurs mais ils rayonnent de joie
parce qu’ils ont reçu le pardon,
parce qu’ils ont compris l’histoire de leur vie,
parce qu’ils sont ensemble le Seigneur,
parce qu’ils témoignent qu’une humanité neuve est possible.
Libérée du mal et communiant à la Vie de Dieu.
Emmaüs : notre mission.
Raphaël D
3ème Dimanche de Pâques
L’actualité vient de nous faire vivre deux événements fortement médiatisés. Vous conviendrez ici que je m’attache tout particulièrement à ce que signifie la Béatification de Jean Paul II, un Pape excellemment apôtre de Jésus Christ. Il a prêché dans le monde entier sa résurrection, salut pour l’humanité d’hier, d’aujourd’hui et demain, et cela jusqu’à l’extrême de son existence terrestre. Son retentissement est plus important pour nos vies que celle d’un mariage princier.
L’Evangile (Luc 24, 13-35) nous rapporte l’apparition de Jésus ressuscité à deux disciples en marche vers leur village, Emmaüs. Ils discutent sur ce qu’ils viennent d’être témoins à Jérusalem. Sur leur chemin un inconnu s’approche d’eux, Jésus lui-même, non reconnu dans son état de ressuscité. Il les interroge : « De quoi discutiez-vous en marchant ? » Ils parlent de « Jésus de Nazareth, prophète puissant par ses actes et ses paroles » ; « Les chefs des prêtres et les dirigeants l’ont livré , l’ont fait condamner à mort et l’ont crucifié » ; « Et nous qui espérions qu’il serait le libérateur d’Israël ! » (un libérateur politique bien sûr) Ils lui signalent qu’après le troisième jour de cet événement ils ont été bouleversés par le témoignage de « quelques femmes de notre groupe » : leur visite au tombeau de Jésus de très bonne heure, la disparition du corps, une apparition d’anges « qui disent qu’il est vivant » ; visite confirmée par des compagnons s’étant rendus au tombeau, mais « lui, ils ne l’ont pas vu ».
Alors Jésus leur parle : « Vous n’avez donc pas compris ! Votre cœur est lent à croire. Ne fallait-il pas que le Messie souffrit tout cela pour entrer dans sa gloire ? » Commentant les Ecritures Jésus explique ce qui le concernait. Près du village où ils arrivent Jésus semblant continuer sa route, ils lui disent : « Reste avec nous : le soir tombe et le jour baisse ». A table avec eux Jésus « prit le pain, dit la bénédiction, le rompit et le leur donna ». « Alors leurs yeux s’ouvrirent et ils le reconnurent, mais il disparut à leurs regards » (c’est le rappel de l’Eucharistie célébrée avec ses disciples la veille de sa mort). Aussitôt ils repartent à Jérusalem : « Notre cœur n’était-il pas brûlant en nous .. lorsqu’il « nous faisait comprendre les Ecritures » (Quel bon catéchiste ont-ils eu ! Que cela nous incite à prendre connaissance de l’Evangile et à nous instruire pour une bonne compréhension ) A Jérusalem, ils retrouvent les apôtres qui leur diront : « C’est vrai, le Seigneur est ressuscité et il est apparu à Simon-Pierre » Ils donnent leur propre témoignage.
Les autres textes de la liturgie mentionnent la transformation de vie des disciples de Jésus après les témoignages de sa résurrection.
La 1ère lecture relate le discours de Pierre à Jérusalem le jour de la Pentecôte. Il témoigne de Jésus (qui l’a choisi comme chef des Apôtres). Miracles, prodiges et signes ont marqué sa route missionnaire. « Vous l’avez fait mourir en le faisant clouer à la croix par les païens » mais « Dieu l’a ressuscité » Et Pierre mentionne le Psaume de David, cité dans les lectures, prédisant ce qui est arrivé.
« Tu m’as montré, Seigneur, le chemin de la vie » … chemin à prendre nous-mêmes dans la foi pour connaître résurrection et vie de joie éternelle.
En 2ème lecture St Pierre cite quelques lignes qui doivent aussi nous faire chaud au cœur. « Vous invoquez comme votre Père celui qui ne fait pas de différence entre les hommes », – et nous savons la place que tiendront en Jésus et Marie les pauvres, les humbles, les petits, les souffrants. « Ce n’est pas l’or et l’argent qui sauvent. Ils seront détruits » (Quelle place ils tiennent présentement dans notre monde !) ; c’est le sang précieux du Christ, l’Agneau sans défaut et sans tache »
Joyeux de croire en Jésus ressuscité, soyons « super joyeux » de le recevoir vivant dans l’Eucharistie. Que notre messe dominicale voit notre fidélité pour un rassemblement dans l’amour de la communauté chrétienne. Marie saura nous y aider !
3e dimanche de Pâques A
Trois choses importantes. Pour reconnaître le Ressuscité, il faut d’abord confronter notre existence avec ce que nous dit l’Écriture ; ensuite, il faut le partage du pain (l’Eucharistie) ; enfin il faut une communauté fraternelle rassemblée.
Vous êtes venus dans cette église avec vos petits – et vos grands – soucis, peut-être de grosses peines ; peut-être de grandes souffrances. Et peut-être, pour beaucoup, l’avenir apparaît comme fermé, comme il l’était pour les deux disciples. Et vous ne voyez pas trop quel sens a votre existence. Beaucoup de nos contemporains sont ainsi. Prenons donc le récit de Luc pour ce que l’évangéliste a vraiment désiré faire : non pas tant prouver la résurrection du Christ, que davantage encore démontrer comment chacun de nous peut faire l’expérience de cette résurrection dans sa vie personnelle.
Un étranger se joint aux disciples sur le chemin du retour à la maison. Tout espoir est anéanti, et la vie, momentanément transfigurée puis défigurée, doit reprendre son cours normal. Loin d’abonder dans leur déception, ou de tenter quelque consolation, l’Inconnu va reprendre les Écritures et leur en expliquer le sens. Après quoi, il prolongera son séjour pour refaire le geste de l’eucharistie. Mais c’est la réflexion des disciples qui doit avant tout nous retenir : « Ne sentions-nous pas nos cœurs brûler alors qu’il nous parlait ? » Le mot de Pierre nous revient ici : « Nous tenons plus ferme la parole prophétique : vous faites bien de la regarder comme une lampe qui brille dans un lieu obscur, jusqu’à ce que le jour commence à poindre et que l’astre du matin se lève dans vos cœurs. » Et il ajoute : « Sachez-le : aucune parole d’Écriture n’est objet d’explication personnelle. Ce n’est pas d’une volonté humaine qu’est jamais venue une prophétie, c’est poussés par l’Esprit que des hommes ont parlé de la part de Dieu. » (2 Pi. 1, 19-21) Cette partie du récit de Luc nous projette en pleine célébration liturgique des débuts de l’Église : « Ils se montraient assidus à l’enseignement des apôtres, fidèles à la communion fraternelle, à la fraction du pain et aux prières. » (Ac. 2 :42)
Par la suite, l’invitation des deux disciples sur la route d’Emmaüs est pleine de délicatesse : « Reste avec nous, car le soir tombe et le jour déjà touche à son terme. » (Lc. 24 : 29) Lequel d’entre nous pourrait demeurer indifférent à pareille invitation et ne pas la faire sienne? ” Le soir tombe, le jour déjà touche à son terme. « Serait-il un tant soit peu superflu de ne point profiter de la fin du jour pour éclairer ces longues heures de travail, d’inquiétudes, de problèmes insolubles ou d’un affreux vide pour ne pas prendre un moment pour ouvrir le Livre, cette lampe qui brille dans un lieu obscur jusqu’à ce que le jour commence à poindre et que l’astre du matin se lève dans nos cœurs. » « Une fois à table avec eux, Jésus prit le pain, dit la bénédiction, puis le rompit et le leur donna. » Luc a certes rappelé intentionnellement tant le souvenir de la multiplication des pains que de la Dernière Cène. Si l’assemblée liturgique peut être et doit demeurer le lieu par excellence de la compréhension des Écritures, l’Eucharistie en constitue le sceau, l’authentification. « Leurs yeux s’ouvrirent et ils le reconnurent. »
Et immédiatement, ne pouvant supporter de rester seuls, ils courent dans la nuit retrouver la communauté des frères, l’Église, image d’un monde fraternellement réconcilié.
Il n’y a pas trente-six moyens de trouver un sens à votre vie et à l’aventure de l’humanité. Il y a, tout ensemble et la Bible et l’Eucharistie et la communauté fraternelle.
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