Homélie du 3ème dimanche du temps ordinaire
Abbé Jean Compazieu | 14 janvier 2012
La Bonne Nouvelle pour tous
Textes bibliques : Lire ici
L’évangile de ce dimanche nous montre Jésus qui prêche la bonne nouvelle du Royaume de Dieu. Il passe au bord de la mer. Ce n’est pas par hasard qu’il choisit cet endroit. Dans le monde de la Bible, la mer représente celui des forces mauvaises. On la supposait peuplée de monstres marins. C’est là que Jésus va annoncer la bonne nouvelle de l’évangile. Pour lui, il est urgent de sortir les hommes de l’univers de la mort. Son grand projet c’est de rassembler tous les hommes sur la montagne (symbole de la présence de Dieu). C’est là que Dieu donne rendez-vous à son peuple pour leur dire tout l’amour qu’il leur porte.
Le même Jésus continue à vouloir sauver tous les hommes de tous les temps. La fête de l’Epiphanie nous a rappelé qu’il est venu pour tous, y compris pour les étrangers. Pour remplir sa mission, il n’hésite pas à aller les chercher dans tous les lieux de perdition. Il veut les libérer de la haine, de la violence, de l’égoïsme et de tout ce qui les entraîne à leur perte. Nous sommes son bien le plus précieux et il veut tous nous combler de son amour. Plus tard, il dira qu’il n’est pas venu pour condamner le monde mais pour le sauver. Il ne parle pas de la colère de Dieu face à l’humanité coupable. Il ne vient pas pour “remettre les hommes à leur place” mais pour leur annoncer qu’ils sont fils de Dieu. Il vient allumer en eux le feu de la joie et de l’amour.
La tâche est immense. Pour embraser le monde de son amour, il fait appel à des hommes et des femmes. L’Evangile nous raconte la vocation des quatre premiers apôtres. Marchant au bord de la mer, il aperçoit des pêcheurs. Plus tard, ils découvriront que leur mission sera d’être des “pêcheurs d’hommes”. Cette pêche ne sera pas une capture mais un sauvetage. Il s’agit de sortir les hommes de leur perdition symbolisée par la mer. L’important c’est de ramener tous les hommes à la vraie vie. Pour cette mission ont donné leur vie pour le salut du monde.
Le même Jésus continue à passer dans notre vie. Il nous rejoint dans toutes les situations, y compris les pires. Il nous redit à tous : “Venez à ma suite… Je rendrai votre vie belle et féconde… ” C’est ainsi que des hommes et des femmes sont devenus des témoins de l’Evangile. Ils ont consacré toute leur vie à cette mission. Ils n’ont pas eu peur d’affronter l’indifférence, la haine et les persécutions. Ils avaient la ferme conviction que rien ne pouvait les séparer de l’amour du Christ. Nous aussi, nous sommes tous appelés. Cet appel pressant c’est celui de l’amour. Pour répondre à cet appel, il nous faut sortir de nos petits bonheurs, de nos biens, de nos manques. L’important c’est de tendre vers ce qui est à venir.
La première lecture nous raconte le témoignage de Jonas. Il est appelé par Dieu pour annoncer à la ville de Ninive que son péché entraînera sa destruction. Ninive est en Irak ; ce pays était déjà le pire ennemi d’Israël. Il l’avait écrasé d’une manière implacable. Or voilà que Dieu se préoccupe aussi du sort de Ninive. Il demande à Jonas de porter un ultimatum à cette ville. Après de nombreuses aventures, le prophète y va avec le peur au ventre. Il annonce à cette ville que dans quarante jours, elle sera détruite. “Les gens de Ninive crurent en Dieu. Ils annoncèrent un jeûne, et tous, du plus grand au plus petit, prirent un vêtement de deuil.” Jonas pensait assister à la destruction de Ninive. Mais Dieu renonce à son projet. Il ne veut pas la mort du pécheur. Ce qu’il veut, c’est qu’il se convertisse et qu’il vive. Le bonne nouvelle est pour tous, y compris pour nos pires ennemis. Comme Jonas, nous devons apprendre à les regarder avec le regard de Dieu, un regard plein d’amour.
Comme les apôtres et comme Jonas, nous sommes tous appelés par le Seigneur. Bien sûr, tous n’ont pas à quitter leur métier pour aller annoncer l’Evangile. Mais nous sommes tous appelés à suivre Jésus. Tout au long de notre vie, nous sommes appelés à prendre des décisions importantes. Quand cela arrive, nous devons chercher à connaître à à accomplir ce que Dieu attend de nous. Tout cela, nous le faisons à la lumière du grand commandement que Jésus nous a laissés : “Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de toute ton âme et de toute ta force.” Plus tard, il nous recommandera de ne pas nous laisser “envahir par les soucis de la vie, les séductions de la richesse et autres convoitises” qui étouffent la Parole de Dieu et l’empêche de produire du fruit.
Ne perdons pas de vue ce qui est au cœur de la mission. Avec Jésus et comme lui, nous avons à “crier” l’Evangile, à enseigner et à guérir les cœurs. Dieu veut se faire connaître de tous les hommes et les rassembler tous dans son Royaume. Nous sommes dans la semaine de prière pour l’unité des Eglises. En communion avec tous les chrétiens des différentes confessions, nous nous tournons ensemble vers le Christ. C’est autour de lui et non autour de nos certitudes que doit se construire cette unité de ses disciples. C’est absolument indispensable si nous voulons que notre témoignage porte du fruit.
En ce jour, nous entendons la supplication du Seigneur :
“Allez-vous en sur les places et sur les parvis!
Allez-vous en sur les places y chercher mes amis,
Tous mes enfants de lumière qui vivent dans la nuit,
Tous les enfants de mon Père séparés de Lui,
Allez-vous en sur les places
Et soyez mes témoins chaque jour.”
Sources : Bible de la Liturgie ; Feu Nouveau ; Lectures Bibliques des dimanches (Albert Vanhoye) ; Avec Saint Marc (Claire Patier)
ADAP : Lire ici
Dans l’unité ! – 3ème Dim. ord. 2012 – 22 janvier – Providence
Le temps dit « ordinaire » dans lequel nous sommes présentement dans la liturgie n’a rien d’un temps de repos. Chrétiens nous ne faisons pas du surplace. Déjà dans l’Ancien Testament (1ère lecture) nous voyons le prophète Jonas invité par le Seigneur à se rendre à Ninive, grande ville païenne en dehors d’Israël. Il aura comme mission de proclamer : « Encore 40 jours et Ninive sera détruite ». Sa prédication est écoutée et « aussitôt, les gens de Ninive crurent en Dieu » Convertis ils jeûnèrent et « prirent des vêtements de deuil ». Devant cette réaction « Dieu renonça au châtiment dont il les avait menacés »
Que dire ? Que le Seigneur est le Dieu des juifs mais aussi des païens. Il sait les écouter, comme les juifs, et leur conduite de vie n’est pas sans influencer sa propre attitude. C’est valable pour chacun de nous !
« Fais-nous connaître tes chemins, Seigneur » Le chant du Psaume 24 est une invitation à écouter la Parole de Dieu et à la mettre en pratique ! « par ta vérité, enseigne-moi » ; « ton amour est de toujours » ; « montre aux pécheurs (que nous sommes) le chemin. Jésus dira : « Je suis le Chemin, la Vérité et la Vie ». En cette semaine de prière pour l’unité des chrétiens notre chemin ne serait-il pas de prier et œuvrer non seulement pour l’unité des chrétiens – c’est important – mais aussi pour celle de toutes les nations, et toute l’année ?
St Paul (2ème lecture) invite à adopter des attitudes de vie « pour un temps limité » (celui de notre séjour ici-bas). Elles sont souvent contraires à celles vécues par la plupart « car ce monde tel que nous le voyons est en train de passer » et l’on veut profiter de la vie ! Est possible, à la fois une crainte, devant tout ce qui se dégrade, les événements catastrophiques, tout ce qui peut révolter les âmes des justes, tout ce qui meurt, la mort sans échappatoire. Heureusement à la fois une joie indicible, celle du monde nouveau, du monde de Dieu, monde vers lequel nous marchons, où nos péchés sont pardonnés par Jésus et son Eglise, espérance réconfortante ! L’unité des cœurs, source de joie !
L’Evangile (Marc 1, 14-20) situe Jésus, après l’arrestation de Jean Baptiste, à son retour en Galilée. Il y proclame la Bonne Nouvelle : « Les temps sont accomplis, le règne de Dieu est tout proche. Convertissez-vous et croyez à la Bonne Nouvelle »
La vie de notre monde tel que nous le connaissons n’a donc rien de définitif. Il est appelé à disparaître, mais pour voir lui succéder un monde parfait, celui que Jésus inaugurera à la fin des temps. A nous de nous y préparer par notre conversion et notre foi en sa parole et en sa promesse.
C’est dans cette perspective qu’il appelle quelques pêcheurs du lac de Galilée : « Venez derrière moi. Je ferai de vous des pêcheurs d’hommes ». Jésus appelle à le suivre parce qu’il est le Chemin, et cela concerne toute l’humanité. Cependant il invite plus spécialement ces pêcheurs pour une tâche précise : devenir pêcheurs d’hommes. Notons qu’il choisit comme apôtres des gens simples mais généreux de cœur. Laissant leurs filets ou leur barque « ils partirent derrière lui ».
En un temps où chez nous ils sont encore rares ceux qui laissent tout pour être apôtres en son Eglise – ce qui n’est pas le cas en d’autres pays et continents – il est bon de prier pour leur nombre croissant et pour leur sainteté – pourquoi pas dans notre propre famille – en suivant Jésus comme guide afin de parvenir au Royaume de l’Amour.
Que Marie, notre Mère du ciel, intercède pour chacun de nous et pour l’humanité entière, afin de rejoindre avec son Fils et tous les saints notre Père des cieux. Auprès de Lui l’unité sera parfaite et sans obstacles, même la mort aura disparue !
3ème DIMANCHE – année B – 22 janvier 2012 – Evangile de Marc 1, 14-20
ENFIN UNE BONNE NOUVELLE !!!
Après les fêtes éclairées par les évangiles de Matthieu, Luc et Jean, nous retrouvons aujourd’hui celui de Marc que nous allons suivre tout au long de cette année. A sa manière rapide, il a commencé son livre en racontant que Jésus de Nazareth, venu se faire baptiser par Jean et remontant de l’eau, a fait une expérience spirituelle. Bouleversé, au lieu de rentrer chez lui, il s’est enfoncé dans la solitude afin de réfléchir à la mission qu’il venait de recevoir. Or tout à coup la nouvelle se répand : Jean a été arrêté ! En effet l’historien juif Flavius Josèphe rapporte que la foule était très exaltée en écoutant la prédication de Jean ; aussi, craignant une révolte, le roi l’avait enfermé dans la forteresse de Machéronte (« Antiquités juives » chap.18). Marc racontera plus tard pour quelle raison le roi fit décapiter le prophète (Marc 6, 17). Cette fin de la mission du prophète suscite le commencement de celle de Jésus.
LA MISSION ESSENTIELLE DE JESUS
Après l’arrestation de Jean Baptiste, Jésus partit pour la Galilée proclamer la Bonne Nouvelle de Dieu ; il disait : « Les temps sont accomplis, le Règne de Dieu est tout proche : convertissez-vous et croyez à la Bonne Nouvelle ».
Au contraire de son maître qui s’était posté en Judée, dans le désert, à l’écart, et qui attendait que les pèlerins convergent vers lui, Jésus retourne dans sa province et il ne cessera de circuler dans cette Galilée appelée « district des nations » parce que, située à la frontière du Liban et de la Syrie, sillonnée par des routes commerciales, elle était fortement imprégnée d’influences païennes. C’est en plein monde, là où les gens vivent, où la civilisation hellénistique bâtissait ses villes nouvelles, ses gymnases, ses théâtres, ses cirques, ses commerces, c’est au cœur de cette société mêlée que l’Evangile va retentir.
Jésus n’attend pas que les gens viennent à lui : c’est lui qui va vers eux.
Il ne va pas se plaindre de la décadence ni vitupérer contre les mœurs relâchées ni menacer les pécheurs des châtiments éternels. Dans les rues et près des boutiques, à côté des ateliers d’artisans ou sur le rivage du lac, il ANNONCE LA BONNE NOUVELLE. Dans un monde gangrené par le mal, parcouru de « mauvaises nouvelles », il proclame la joie de l’Evangile. Quelle audace !
« Proclamer » : le message de Jésus se dit, se répète, se colporte, se répercute. Trop souvent nous confondons l’évangélisation avec nos activités : rites, pèlerinages, bonnes œuvres, constructions. Marc insiste : la première chose que Jésus fait et qui restera son action fondamentale, c’est de parler, de « prêcher » ! (Oh le vilain mot, si dévalué aujourd’hui – parce qu’il a servi de paravent à de la piété fade, un galimatias incompréhensible, une éloquence ampoulée !). Pourtant « une nouvelle » se dit, s’énonce, se lance. Brève, percutante, libératrice. ——- Que dit Jésus ? 4 choses.
« LE KAÏROS (mot grec qui désigne un moment grave) EST ACCOMPLI ». La Bible n’est pas un catéchisme, un code moral ou rituel mais une histoire. Si Dieu demeure un mystère indicible, il est certain pour les acteurs bibliques qu’il est en train de réaliser un projet au creux de notre histoire. Nous ne sommes pas des pantins manipulés, nous disposons même d’une énorme force de résistance au dessein de Dieu. Mais quoi que fassent les hommes, Dieu agit dans un seul but : nous libérer du mal et nous conduire à la communion amoureuse avec Lui. Au cadran de l’histoire, telle que Dieu la lit et non telle que les hommes politiques l’imaginent selon leurs idées, le moment (le kaïros) a sonné. Aucun éclat ne le manifeste. A Rome, l’empereur s’imagine maître absolu du monde. Mais là-bas, en Galilée, un ancien artisan de village se met à circuler et à lancer à tous vents la Bonne Nouvelle. Pointe alors l’aurore du nouveau monde ! Plus rien d’égal ne surviendra dans la suite.
« LE REGNE DE DIEU S’EST APPROCHE ». Israël avait toujours cru obtenir la grandeur grâce à un roi de génie. Las, tous se succédèrent et tous échouèrent. D’ailleurs depuis plus de 5 siècles, Israël n’avait plus de souverain mais un des derniers prophètes avait annoncé :
« Le Seigneur mon Dieu arrivera…Ce sera un Jour unique…Alors le Seigneur se montrera le Roi de la toute la terre.
En ce jour-là, le Seigneur sera unique et son Nom unique » (Zacharie 14, 8-9).
Le pauvre Jésus du minuscule village de Nazareth, seul, démuni de tout, sans moyen de puissance, proclame : Moi aujourd’hui je vous l’annonce : Dieu vient, avec moi, instaurer son règne maintenant sur cette terre des hommes. Il ne transforme pas le monde par un coup de baguette magique, il n’anéantit pas le mal, ne supprime pas la souffrance, n’ « angélise » pas les hommes. Car son règne n’a d’autre puissance que celle de l’amour et l’amour ne s’impose pas, il s’offre.
Ainsi donc, du côté de Dieu, tout est fait : en Jésus le Règne divin commence en vérité, ici et maintenant. Rien ni personne ne pourra lui imposer un délai ni encore moins le contrecarrer. Encore faut-il que l’homme l’accueille. Comment ?
« CONVERTISSEZ-VOUS ». L’appel n’est pas réservé à une certaine catégorie de gens plus mauvais que les autres. Il s’adresse à tous sans exception. Chacun et chacune – même les plus observants des pharisiens, les plus pieux des grands prêtres – est invité à se détourner de ses façons de voir, de penser, d’imaginer, de faire, d’espérer. La conversion (« teshouvah » en hébreu ; « metanoïa » en grec) est une notion capitale dans la bible : elle ne signifie pas un simple remords, un époussetage de l’âme, une vague résolution, un projet de se rendre meilleur car l’homme ne peut pas « se faire » pour devenir citoyen du Royaume de Dieu. Mais il lui est demandé de se détourner pour se retourner dans une autre direction.
« ET CROYEZ A LA BONNE NOUVELLE ». C’est une vraie question de confiance car tout contredit cette annonce: le mal qui paraît omniprésent, le passé qui prouve que toutes les tentatives du bonheur de l’humanité ont avorté, notre égoïsme qui s’affirme incurable…et même, pour nous aujourd’hui, l’Eglise qui serine ses sempiternelles fredaines et qui présente le visage lamentable d’une organisation qui échoue sans cesse à faire ce qu’elle dit. Il faut CROIRE, oui, faire confiance. Jésus va opérer ce que David et Isaïe, Platon et Aristote, Cyrus et Alexandre le Grand n’ont jamais réussi à faire. Vous en doutez ? Thérèse de Lisieux rongée par la tuberculose dans son minable carmel de Lisieux, le père Damien mourant de la lèpre à Molokaï, Maximilien Kolbe écroulé dans le blockhaus d’Auschwitz, Soljenitsyne cassant des cailloux dans le froid glacial du goulag sibérien, tous CROYAIENT A LA BONNE NOUVELLE. Non par un miracle soudain, une guérison immédiate. Mais JESUS ETAIT LA ET DIEU AVEC LUI.
APPEL DES 4 PREMIERS DISCIPLES
Passant au bord du lac de Galilée, Jésus voit Simon et son frère André en train de jeter leurs filets (c’était des pêcheurs). Il leur dit : « Venez derrière moi : je ferai de vous des pêcheurs d’hommes ». Aussitôt laissant là leurs filets, ils le suivent. Un peu plus loin, il voit Jacques, fils de Zébédée, et son frère Jean qui étaient dans leur barque et préparaient les filets. Jésus les appelle aussitôt. Alors laissant dans la barque leur père avec ses ouvriers, ils partent derrière lui ».
On reste perplexe devant cette obéissance immédiate que rien n’explique. Mais l’évangile de Jean nous a éclairés la semaine passée : tous ces hommes étaient des disciples de Jean-Baptiste, ils se connaissaient et là ils ont rencontré Jésus. Baptisés dans le Jourdain, ils sont rentrés chez eux et ont repris leur métier. Maintenant l’heure est venue : oseront-ils croire à l’appel, faire confiance à ce charpentier ?
La mission à remplir est gigantesque : « pêcher les hommes ». Car les hommes se noient (dans les soucis et les chagrins), ils barbotent (dans les futilités), ils coulent (dans la dépression), ils s’abîment (dans le désespoir), ils perdent pied (dans le déluge des mauvaises nouvelles). Il faut d’urgence les sortir des flots, les redresser, les replacer sur le roc solide de la foi, leur permettre de respirer le souffle de l’Esprit.
On ne s’érige pas en sauveur : on doit apprendre à le devenir. Non par des cours de relaxation ou des méthodes transactionnelles, mais « en suivant Jésus », en mettant ses pas dans les siens, donc en lisant l’Evangile, en regardant, en écoutant celui-là seul qui rend capables de poursuivre cette tâche. « Je ferai de vous… ». On n’exerce pas ce « métier » à temps partiel, en y consacrant quelques moments de loisirs. Les pêcheurs sont tenus à une « conversion » radicale : abandonner leur profession, leurs outils, leurs parents, leur milieu pour partir sans rien, sans connaître la destination, sans savoir de quoi on vivra ni ce qu’on aura à dire et à faire. L’essentiel est là : être avec Jésus.
Jésus n’exigera pas de tous ce détachement total : la majorité des premiers disciples seront des gens engagés dans les responsabilités familiales et professionnelles et qui auront à vivre les exigences de l’Evangile dans leur état de vie. Mais il fallait au préalable et il faudra toujours, des « apôtres » dont la mission sera d’être, à la suite de Jésus, les hérauts de la Bonne Nouvelle.
N’est-ce pas la 1ère fonction à rétablir dans notre Eglise ?…
Raphaël D
Troisième dimanche dans l’année B
La liturgie de ce troisième dimanche nous adresse un vigoureux appel à la conversion. La première lecture nous présente un petit extrait d’un conte mettant en scène le prophète Jonas et les habitants de Ninive. Jonas, tournant le dos à la cité vers où il est envoyé, s’enfuit d’abord sur la mer. Pour les Hébreux, pour la mentalité biblique, la mer représente le monde du mal et de la mort. Revenu, non sans peine, de ses aventures maritimes, le prophète finit par obéir à Dieu et se rend enfin à Ninive. C’est la capitale des Assyriens, les pires ennemis d’Israël. Pourtant ces païens se convertissent et leur ville n’est pas anéantie. « Comment n’aurais-je pas pitié de Ninive, la grande ville, où, sans compter une foule d’animaux, il y a plus de cent vingt mille petits enfants qui ne distinguent pas leur droite de leur gauche ? » C’est sur ces mots que se conclut ce merveilleux petit chef d’œuvre d’humour et de miséricorde.
« Les temps sont accomplis, le règne de Dieu est tout proche. Convertissez-vous et croyez à la Bonne Nouvelle. » Ainsi commence la prédication de Jésus. Elle se fait en Galilée, terre de carrefour. Territoire étiré entre le Mont Carmel qui domine la Méditerranée et le lac de Kinnereth (- 212 mètres) où plongent les collines verdoyantes, la « Galilée des nations » est le premier endroit où Dieu, en Jésus, vient à la rencontre des hommes pour les faire passer d’un monde à l’autre. Ce n’est pas sur le sommet d’une montagne, lieu par excellence des révélations bibliques que Dieu vient rejoindre les hommes, mais au bord de la mer de Galilée, symbole du péché et de la mort. Dans l’eau, les hommes ne savent pas vivre. Ils y meurent. Sortis des eaux, ils sont sauvés. Dieu, en Jésus, vient arracher l’humanité à l’abîme où elle s’enfonce.
Et pour ce faire, il commence par appeler des pêcheurs. Des travailleurs de la mer, et qui sont donc eux aussi atteint par le mal qu’elle figure Ils sont comme nous, des pécheurs avec les pécheurs. Mais Jésus leur dit qu’ils seront maintenant pêcheurs d’hommes. Leur mission sera de sortir les hommes de la mort et de leur donner la vie.
Mais pour cela, ils sont invités à une grande radicalité. Simon et André sont invités à renoncer à l’univers matériel, à leur métier, à la possession, pour oser la confiance : « aussitôt, laissant là leurs filets, ils le suivirent ». Nous aussi, nous sommes conviés à changer de chemin, à adopter une autre mentalité, à laisser un autre, Dieu, gouverner notre vie.
Quant aux deux fils de Zébédée, Jacques et Jean, ils laissèrent père, ouvriers et famille et « partirent derrière lui. » Ils sont amenés à se libérer des liens affectifs pour tout ordonner à l’amour de Jésus.
« Le temps est limité », ajoute l’apôtre Paul. « Que ceux qui ont une femme soient comme s’ils n’en avaient pas, ceux qui pleurent comme s’ils ne pleuraient pas, ceux qui font des achats comme s’ils n’en faisaient pas. » Se tourner vers Dieu et croire à la Bonne Nouvelle de Jésus nous introduit dans un monde nouveau, celui d’un lien personnel avec Dieu, auquel tout le reste – métier, gagne-pain, relations – est paisiblement ordonné.
Que les paroles du psaume que nos venons de chanter guident notre prière et notre action : « Seigneur, enseigne-moi tes voies, fais-moi connaître ta route. Dirige-moi par ta vérité, enseigne-moi, car tu es le Dieu qui me sauve » (Psaume 24).
Les homélies sur kerit.be