Homélie de la fête du Saint Sacrement
Abbé Jean Compazieu | 24 mai 2013
Fête du Saint Sacrement
Textes bibliques : Lire
Pour comprendre le sens de cette fête, il faut se rappeler que le mot Eucharistie signifie Action de grâce. Quand nous venons à la messe le dimanche, c’est d’abord pour rendre grâce que Seigneur. Nous lui disons merci pour toutes les merveilles qu’il réalise tout au long de notre vie. La fête de ce jour met à l’honneur la présence réelle de Jésus Christ sous les espèces du pain et du vin consacrés. C’est une occasion pour nous de méditer sur ce cadeau miraculeux qu’est le Corps du Christ offert pour notre salut dans l’Eucharistie. Quand nous entrons dans une église, c’est lui qui nous accueille et c’est d’abord vers lui que nous devons nous tourner et non vers le voisin de droite ou de gauche. En Jésus, c’est Dieu qui est présent pour nous combler de son amour.
La première lecture est là pour nous rappeler que le culte “selon Melkisédek” est d’abord une louange. Cet épisode de la Genèse était une préfiguration de l’hommage que le peuple élu rendrait plus tard à Dieu en reconnaissance de son amour et de sa protection. Nous connaissons le chant : “Tout vient de toi ô Père très bon. Nous t’offrons les merveilles de ton amour.” Il est important que nous apprenions à relire notre vie pour y reconnaître ce que Dieu a remis entre nos mains. Nous pouvons penser à telle joie que nous avons éprouvée dans la semaine, telle rencontre qui nous a aidés à avancer. A travers ces événements, petits ou grands, c’est Dieu qui est là. Nous n’aurons jamais fini de lui rendre grâce.
Quand nous lisons l’Evangile, nous découvrons que toute la vie de Jésus est une action de grâce. En ce jour, notre regard se porte principalement vers le soir du Jeudi Saint ; “Il prit du pain, puis ayant rendu grâce, il dit : Ceci est mon Corps livré pour vous” (2ème lecture). Ce geste manifeste la générosité du cœur de Jésus. Il a su saisir les circonstances les plus douloureuses pour aller jusqu’au bout de l’amour. C’est ce que nous indique le chant : “Le Seigneur nous a aimés comme on n’a jamais aimé.” Quand nous allons communier, nous recevons en nous le dynamisme de l’amour qu’il a manifesté lors de la dernière Cène. L’Eucharistie nous introduit dans le Royaume de l’Amour. Elle nous rend capables de vaincre toutes les circonstances les plus injustes, les plus douloureuses et les plus humiliantes. La joie de Jésus sera dans notre cœur si nous sommes unis à lui.
C’est pour cette raison que la fête du Saint Sacrement doit être pour nous une “école d’action de grâce”. Tout ce que nous sommes et tout ce que nous avons vient de lui, nous l’avons reçu de lui. En dehors de lui, nous sommes comme des sarments secs qui ne peuvent donner du fruit. Au cours de la messe, nous rendons grâce au Seigneur pour l’alliance qu’il a conclue avec nous en son sang. Au jour de notre baptême, nous sommes entrés dans la grande Famille de Dieu ; nous sommes devenus les membres de son Corps. Rien ne peut nous séparer de son amour car il nous considère comme son bien le plus précieux.
L’Evangile de la multiplication des pains nous donne une autre raison de rendre grâce : il nous montre la surabondance des dons de Dieu. Avec cinq pains, il nourrit tout une foule affamée ; plus tard, il donnera la signification de son geste : “Si vous na mangez pas la chair du Fils de l’Homme et si vous ne buvez pas son sang, vous n’aurez pas la vie en vous.” Quand le Christ nous dit : “Prenez et mangez”, c’est sa vie que nous recevons pour la faire nôtre. C’est LE grand événement de la semaine. Il est vraiment dommage que pour des raisons futiles ou par négligence, nous nous privions de l’Eucharistie. Cela montre que nous ne mesurons pas vraiment l’immensité du don que Dieu nous fait.
Dans certains pays, les chrétiens font des dizaines de kilomètres à pieds pour prendre part à la célébration eucharistique. Un jour, l’un d’entre eux disait : “Nous avons faim de messe.” Pendant ce temps, d’autres chrétiens qui vivent près de l’église ne se dérangent pas et s’installent dans l’anorexie. En ce jour, nous sommes invités à accueillir dans la joie ce merveilleux cadeau de Dieu. Rendons-lui grâce pour la merveille de son Eucharistie. En elle, il y a de quoi faire de l’Eglise “un seul Corps” (Saint Paul). Que cette nourriture sanctifie notre vie de tous les jours et nous conduise aux joies éternelles.
Chaque dimanche, nous nous sommes rassemblés pour nous nourrir de la Parole et du corps du Christ. Le Curé d’Ars disait que nous n’en sommes pas dignes mais nous en avons besoin. Il s’agit d’une nourriture absolument essentielle. Comme les juifs au temps de Jésus, nous avons peut-être du mal à comprendre. Mais comme Pierre, nous pouvons dire : “A qui irions-nous, Seigneur, tu as les paroles de la vie éternelle.” Soyons dans la joie chaque fois que débute une Eucharistie. Et surtout, ne nous y habituons pas.
En célébrant cette Eucharistie, nous nous tournons vers toi Seigneur. Aide-nous à entrer plus pleinement dans ce mouvement de don total de nous-mêmes avec toi et par toi. Que notre don soit de plus en plus à la mesure du tien, toi qui as tout donné de lui-même pour notre vie et pour la gloire du Père.
Sources : Revues Signes, Feu Nouveau, Pour célébrer l’Eucharistie (Feder), Lectures bibliques des dimanches (Vanhoye), missel communautaire (Rebré)
Commentaires de l’évangile du jour :
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Bonsoir mon Père.Je suis ravie de pouvoir parler avec vous de ce sujet,car vous connaissez mon problème de santé qui parfois me joue des tours.Je bénis le Seigneur pour Sa grande miséricorde et je proclame haut et fort que si nous l’aimons et que nous lui faisons confiance Il ne reste pas insensible a nos prières ,a nos larmes et a nos amertumes.D’ailleurs,Il n’aime pas nous voir souffrir et tristes.Dans cet homélie je comprends bien ce que je n’ai pas pu partager avec Jésus,car ce repas Il nous l’offre avec tant d’amour;mais en luttant pour rester présente a ce Festin,c’était comme ne pas y participer.Et a force de lire les évangilles ,prier des neuvaines,tout Lui offrir et surtout ne pas perdre confiance en Lui doucement je m’y suis rendue,la peur au ventre a cause de cette phobie ,mais confiante.J’ai parlé au prètre ,me suis confessée et il m’a prit mes mains dans les siennes en me disant”venez quand vous sentez que vous allez bien”.J’étais enfin délivrée de cette culpabilité qui me rongeait et avec le “don de la patience” j’y parviens assez souvent ,plus ou moins en forme mais lorsque le prètre me donne l’hostie ,une joie indescriptible m’envahit et je crie “victoire”!C’est bien le Seigneur qui m’a aidé et dans mes jours sombres je prie de plus belle et je Lui demande pardon.Alors a toutes celles et ceux qui n’ont pas mon handicap ,je les supplie d’avoir confiance en Lui et de parler de toute notre vie comme a un “psychiatre”.Vous verrez la peur ne vous envahira plus ,et la messe deviendra le plus beau rendez-vous d’Amour.Noubliez pas qu’Il a donné Sa viepour nous sauver!Merci aussi mon père car vous m’avez fait comprendre que je ne devais pas garder cela au fond de moi et avoir confiance.Chaleureusement,et merci pour vos homélies !
FÊTE DU SAINT SACREMENT – Année C – Dimanche 2 juin 2013 – Evangile de Luc 9, 11-17
L’EUCHARISTIE, MULTIPLICATION DE L’AMOUR
De Moïse à Elie, d’Isaïe à Jean-Baptiste, les prophètes ont proclamé la Parole de Dieu, se sont donnés à leur mission jusqu’à en mourir, mais nul d’entre eux n’a jamais eu l’’idée de se donner à manger à ses disciples. Comment Jésus, et lui seul, a-t-il osé dire : « Mangez : ceci est mon corps ….»? Comment ses disciples n’en ont-ils pas été épouvantés ? Comment tout au contraire ont-ils fait de la réitération de cet acte le rite constructeur de leur communauté – car on dira : « L’Eucharistie fait l’Eglise » ? Comment Saül de Tarse, qui avait hurlé de rage en apprenant que certains de ses compatriotes célébraient ce rite, en est-il devenu l’apôtre intrépide ? En 56, il écrit à la communauté de Corinthe qu’il a fondée en 51-52 (20 ans à peine après le Golgotha) : « Je vous ai transmis ce que j’ai reçu ». Cette pratique n’est pas de son invention, comme s’il avait voulu copier certains repas des religions païennes : il l’a acceptée de l’Eglise qui, dès son origine, célébrait donc l’Eucharistie. Elle voulait refaire l’acte ultime de Jésus : « la nuit qu’il fut livré, le Seigneur Jésus prit du pain… ». Dans sa Passion, il paraîtra un « objet » que les puissants se passent de l’un à l’autre : son Repas prouvait à ses disciples qu’en réalité il était « sujet » libre. Donc manger son Pain et boire à sa Coupe, c’est « faire mémoire de lui…proclamer la mort du Seigneur jusqu’à ce qu’il vienne ». Le souvenir du crucifié devient partage aujourd’hui de sa Vie pour l’ouverture à un avenir de Gloire. Ainsi est scellée, et sans cesse commémorée, « le premier jour de chaque semaine » (1 Cor 16, 2), « la Nouvelle Alliance ». La Croix passée devient Repas présent pour une espérance future.
L’Eucharistie est sacrement de la FOI, elle provoque une communauté d’AMOUR qu’elle guide sur le chemin de l’ESPERANCE. La mémoire actuelle de Jésus passé lance à la rencontre de Jésus Seigneur.
L’EUCHARISTIE ANTICIPEE
Ce dernier repas de Jésus avec les siens a été précédé par la convivialité vécue naguère sur les chemins de Galilée et surtout par un certain jour où, avec eux, il a nourri une foule – geste tellement mémorable qu’il est le seul « miracle » qui soit narré par les 4 évangélistes. Luc ne cherche pas à nous persuader de la réalité historique d’un scoop. L’intérêt profond de cette scène est de nous aider à comprendre le mystère de l’Eucharistie dont elle est le signe prémonitoire évident.
Pour cela, il est important de commencer la lecture un peu plus haut.
Ayant réuni les Douze, il leur donna de guérir les maladies. Il les envoya proclamer le Règne de Dieu et faire des guérisons. Ils partirent, allant de village en village (……….)
A leur retour, les apôtres racontèrent à Jésus tout ce qu’ils avaient fait. Il les emmena et se retira à l’écart du côté de Bethsaïde. L’ayant appris, les foules le suivirent. Jésus les accueillit : il leur parlait du Règne de Dieu à la foule et il guérissait ceux qui en avaient besoin.
Le jour commençait à baisser. Les Douze s’approchèrent de lui : « Renvoie cette foule ; ils pourront aller dans les villages des environs pour y loger et trouver de quoi manger ». Jésus leur dit : « Donnez-leur vous-mêmes à manger ! ». Ils répondent : « Nous n’avons pas plus de 5 pains et 2 poissons – à moins d’aller nous-mêmes acheter de la nourriture pour tout ce monde ! » (Il y avait bien 5000 hommes). Jésus leur dit : « Faites-les asseoir par groupes de 50 ». Ils obéirent et firent asseoir tout le monde.
Jésus PRIT les 5 pains et les 2 poissons et, levant les yeux au ciel, il les BENIT, les ROMPIT et les DONNA aux disciples pour qu’ils les DONNENT à tout le monde.
Tous mangèrent à leur faim et l’on ramassa les morceaux qui restaient : cela remplit 12 paniers.
PROCLAMER LE REGNE DE DIEU. Surtout ne pas omettre le début : Jésus parle. « Au commencement est la Parole ». L’action essentielle de Jésus dès son baptême a été de parler, d’annoncer la Bonne Nouvelle : écoutez, faites-moi confiance, Dieu m’a envoyé pour inaugurer son Règne sur terre. N’attendez pas des apparitions fulgurantes, décidez-vous en toute liberté, rompez avec le mal, commencez à vivre comme je vous l’enseigne, soyez le changement que vous rêvez pour le monde. Ne croyez pas les sages « à qui on ne la fait pas », les blasés qui reviennent de tout et ne vont nulle part, les prudents qui se résignent (surtout au malheur des autres).
Donc le repas de Jésus est d’abord Parole reçue, accueillie, « mangée » parce qu’elle fait vivre. Une des erreurs monstrueuses de l’Eglise a été, pendant des siècles, de rendre la proclamation de la Parole – lectures et homélie – facultative : ne parlait-on pas d’ «avant-messe » ? Et, malgré la rectification du concile Vatican II, on en paie encore les conséquences : beaucoup de chrétiens trouvent banal d’arriver en retard à la célébration et ils ne prêtent guère attention à l’enseignement. Tous les peuples savent pourtant que tout repas commence par un échange de paroles. La messe n’est pas un self-service !
GUERIR LES CORPS. En appui à cette Parole, Jésus opère des guérisons. Non pour prouver sa puissance et presser à la conversion mais parce que le Royaume de Dieu n’est pas une réalité évanescente, et que l’homme est corps et âme et qu’une piété désincarnée serait signe d’une religion aliénante.
Donc la prédication doit être accompagnée par une charité thérapeutique mais celle-ci n’est pas le tout. Jésus ne vide pas les hôpitaux car la bonne santé n’est pas la solution finale ainsi que le montre notre la société où les exploits de la médecine n’empêchent pas les dépressions, les suicides, les adductions aux alcools et aux drogues. Donner une pièce, un vêtement, un médicament n’est qu’un préalable à plus.
PARTAGER LE PAIN. De prime abord le fait étonne, éveille le scepticisme : y avait-il urgence de nourrir ces gens – qui d’ailleurs ne demandaient rien ? N’est-ce pas une légende ? Mais une lecture attentive perçoit comment ce récit prophétise le dernier repas de Jésus et les Eucharisties célébrées par les premières communautés.
Merveille de l’Eucharistie, du Partage du Corps et du Sang du Seigneur. Véritable « communauté de consommation » où le convive reçoit dans la mesure où il a donné, où la Parole de Vie devient Pain partagé afin que s’accomplisse, de dimanche en dimanche, la communion en Christ. Donc la communion fraternelle.
Raphaël D., dominicain
Eucharistie 2013 – 2 juin
C’est encore une fête importante que l’Eglise nous fait célébrer ce dimanche, celle de l’Eucharistie ! Elle est intitulée « Le Saint-Sacrement du Corps et du Sang du Christ », ce qui nous met en relation avec Jésus Christ, auquel nous chrétiens, nous donnons notre foi et notre amour. En avons-nous bien perçu la grandeur et l’importance pour toute notre vie, et même celle de l’humanité ? La liturgie vient donc nous instruire et nous aider à « Vivre l’Eucharistie !»
Commençons cette approche par l’Evangile (Luc 9, 11b-17) « Jésus parle du règne de Dieu à une foule ». Déjà bien connu, comprenons la suite. Il n’est pas là pour parler de la pluie ou du beau temps, mais de Dieu dont il sait l’importance dans la vie. Ailleurs il parlera de l’Eucharistie. La foule (d’environ 5000 hommes) est rassemblée en un lieu désert. Il est bon, pour réfléchir, peser ses paroles, de sortir de chez soi, d’aller à l’écart. D’autres raisons peuvent aussi guider la foule : « il guérissait ceux qui en avaient besoin », et qui sont nombreux. Nous pensons surtout aux maladies corporelles, mais nous savons qu’il chasse les démons, guérit des possédés, ressuscite des morts, disons surtout des morts dans leur cœur, non aimés ou sans amour pour autrui. Nombreux les dénués d’un cœur qui sache aimer, et auxquels l’Eucharistie peut en donner la force.
Les 12 apôtres sont là. Comme le soir tombe ils demandent à Jésus le renvoi de la foule pour trouver de quoi manger. « Donnez leur vous-mêmes à manger » leur dit Jésus. Il appelle la collaboration humaine à ce qu’il va décider. L’Eucharistie n’existe qu’avec une coopération des hommes, ainsi le veut le Seigneur.
« Nous n’avons pas plus que 5 pains et 2 poissons » Pour nourrir une foule, l’humanité, la seule solution humaine ne suffit pas. A méditer pour ceux qui veulent se passer de Dieu : le vrai et définitif bonheur ils ne le connaîtront pas. « Faites les asseoir » Pour la célébration eucharistique gestes et positions sont utiles, surtout d’être ensemble dans un lieu adapté, l’église le plus souvent.
Jésus prend les pains et les poissons, « levant les yeux au ciel » (regard vers le Père) « les bénit, les rompit » et demande à ses disciples d’en distribuer à tout le monde (on peut encore penser à l’Eucharistie). « Tous mangèrent à leur faim » et on ramasse ce qui reste : « cela remplit 12 paniers » Dieu possède le pouvoir de combler tout cœur humain, même au-delà de ce qu’il peut espérer. Ce sera le rôle de l’Eucharistie de nourrir les cœurs d’un amour aux limites exceptionnelles, incommensurables. Avec elle l’amour prend racine en nous dans l’Esprit Saint.
Le livre de la Genèse (1ère lecture) parle de Melkisedek, « roi de Salem et prêtre du Dieu très haut » Il fait « apporter du pain et du vin » à Abraham rentrant d’une « expédition victorieuse contre quatre rois » Il bénit ensuite Abraham qui lui fait hommage du dixième de tout ce qu’il a pris. Cet épisode s’éclaire avec Jésus, roi et prêtre de l’humanité, et pain et vin avec l’Eucharistie.
Le Psaume 109 a fait chanter : « Tu es prêtre à jamais, Christ et Seigneur » et indique : « Tu es prince, éblouissant de sainteté » ; « prêtre à jamais selon l’ordre du roi Melkisedek ». Jésus est le Messie attendu, Seigneur, Dieu du ciel et de la terre.
St Paul (2ème lecture) transmet ce qu’il a reçu de la tradition : « la nuit même où il était livré, le Seigneur Jésus prit du pain, puis, ayant rendu grâce, il le rompit et dit : « Ceci est mon corps, qui est pour vous. Faites cela en mémoire de moi ». « Après le repas, il fit de même avec la coupe en disant : Cette coupe est la nouvelle Alliance en mon sang. Chaque fois que vous en boirez, faites cela en mémoire de moi ». En consommant ce pain et ce vin « vous proclamez la mort du Seigneur, jusqu’à ce qu’il vienne ». La nouvelle Alliance a valeur éternelle et définitive.
Ainsi est instituée l’Eucharistie ! Elle traduit l’amour infini de Dieu, plein de tendresse, qui se prolonge jusqu’à la fin de ce monde dans la simplicité du pain et du vin transfigurés en son corps et son sang, re-présentés dans l’acte d’amour sur la croix et sa résurrection, victoire sur le péché, tout mal, et même la mort. Tous concernés, savons-nous témoigner d’un véritable amour en retour ? Semblable à celui du Christ ? D’un amour pour tous et toutes, fussent des ennemis ; d’un amour répandant joie et service, surtout aux plus faibles, aux pauvres ? La participation à la célébration eucharistique sera action de grâce et volonté d’aimer.
Que Marie nous aide à conformer nos cœurs dans ces sentiments !
Commentaire de la 1ère lecture par Soeur Claire
Saint-Sacrement C
L’évangile nous montre souvent Jésus à table : repas de noces à Cana, repas chez des publicains et des pécheurs (par exemple chez Matthieu), repas avec des pharisiens, comme chez Simon où une femme vient lui baigner les pieds de ses larmes ; repas intimes, chez Lazare, Marthe et Marie. Repas où Jésus est l’invité, repas où c’est Jésus qui invite… Il y a toujours des repas. Mais de tous ces repas, le plus grand, le plus significatif est un repas de fête, le repas de la Cène, le dernier repas. Il fut peut-^tre (les spécialistes sont divisés sur ce point) un seder, le repas pascal.
On y fêtait le mémorial de la libération d’Egypte, et on se conformait, dans toutes les familles, à un certain nombre de rites. Jésus est fidèle à la tradition. Comme tous les chefs de famille, il refait les gestes des ancêtres, prononce les formules de bénédiction que tout le monde prononçait, partage le pain comme tout le monde ; il fait circuler les coupes rituelles. Mais voilà que subitement tout bascule. Rompant le pain, Jésus déclare que ce pain, c’est son corps livré ; faisant circuler la coupe, il annonce que c’est son sang versé pour la multitude que ses invités vont boire. Il n’est plus question du passé. Ou plus exactement, l’événement passé atteint ici son point culminant. La libération de l’esclavage d’Egypte n’était que signe d’une libération et d’une alliance universelle, qui sera scellée quelques heures plus tard sur la croix.
Comment le Christ a-t-il pu, pressentant très bien ce qui allait lui arriver, rendre grâce à Dieu ? Il fallait en être arrivé à un incroyable degré d’intimité avec le Père pour pouvoir, à ce moment-là, dire merci.
Ce que Jésus a fait ce soir-là, nous le faisons nous aussi chaque dimanche. On dit : “Je vais à la messe”. Mais il y a quantité de mots pour désigner la messe. Les orthodoxes parlent de « Divine Liturgie ». Les protestants, eux, disent « La Sainte Cène ». C’est le mot latin qui veut dire : le repas du soir. Nous catholiques, nous disons « La Messe ». C’est aussi un mot latin, le même mot que « mission » : il indique, plus que le repas fraternel, sa conclusion. Tout le monde, après s’être rassemblé, se disperse et part en mission : il s’agit de vivre ce qu’on a célébré. Voilà donc déjà trois aspects d’une même réalité. Aujourd’hui on emploie plus volontiers un quatrième mot, « Eucharistie ». C’est un beau mot, puisque justement il signifie « merci. » Peut-être un jour tous les chrétiens arriveront à se mettre d’accord pour désigner d’un seul mot l’assemblée dominicale et dire simplement « nous allons dire merci ».
Mais pourquoi avons-nous, chaque dimanche, à dire merci ? Mais pour Jésus Christ. Pour ce don qu’il nous fait de son corps et de son sang, c’est-à-dire de sa vie. C’est lui qui a l’initiative, pas nous. On dit souvent d’une messe : « c’était une belle messe » : les gens ont bien chanté, l’organiste a bien joué, les lecteurs ont bien lu, le prêtre bien parlé, les acolytes se sont bien tenus, il y avait beaucoup de monde… On croirait bien que tout dépend de nous. En fait, même si rien de tout cela n’existait, l’Eucharistie serait toujours réussie, parce qu’elle est don de Dieu aux hommes. Comme le raconte Pasqualini dans son beau livre sur le Goulag chinois, le vieux prêtre déporté qui, en cachette, seul, derrière un repli du terrain, consacre le pain et le vin, célèbre l’Eucharistie. C’est le don de Dieu.
Nous avons simplement, d’abord, à accueillir le Don de Dieu, à le mettre dans nos vies, pour, ensuite, le restituer dans notre vie quotidienne. C’est-à-dire que si je mange le Corps du Christ, c’est pour lui ressembler. Pour entrer dans sa vie, ses gestes d’accueil, de relation vraie avec les frères, d’écoute des petits, de lutte pour la justice. C’est tout cela, l’Eucharistie. « Deviens ce que tu reçois », écrivait saint Augustin. Témoignons de Jésus Christ vivant par nos actes et par toute notre vie, ce soir, demain, cette semaine, et tous les jours de notre vie.
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