13 octobre : Homélie du 28ème dimanche du temps ordinaire
Abbé Jean Compazieu | 5 octobre 2013L’Évangile pour tous.
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Nous entrons aujourd’hui dans la semaine missionnaire mondiale ; cette année, elle a pour titre : “L’Evangile pour tous, j’y crois.” C’est au nom de cette conviction que des prêtres, des religieux et religieuses et des laïcs sont partis dans différents pays du monde. Ils y ont été envoyés pour annoncer l’Evangile à ceux qui ne le connaissent pas. Et c’est au nom de cette même conviction que des prêtres ont quitté leur pays (Afrique, Inde, Madagascar…) pour venir nous évangéliser. C’est cela “l’Evangile pour tous”.
La 1ère lecture va dans ce sens. Le peuple d’Israël a été le premier bénéficiaire de cette annonce de la Parole de Dieu. Mais dans le 2ème livre des Rois, nous découvrons que ce trésor est offert à tous, y compris aux étrangers. C’est ce qui se passe avec Naaman, un général Syrien. Cet homme ne connaissait pas le Dieu d’Israël ; mais il a eu foi en Elisée, le prophète. Et cette foi a été le point de départ de sa guérison et de sa conversion. Il décide alors de quitter les idoles pour ne plus adorer que le Dieu unique d’Israël.
Bien avant la venue de Jésus, les croyants comprenaient que Dieu aime aussi les étrangers. Sur la montagne du Sinaï, Dieu avait fait alliance avec un peuple précis. Mais le choix de ce peuple n’est pas un privilège. C’est le point de départ d’une grande mission. Il s’agit pour lui de faire connaître et aimer Dieu à tous les autres, y compris aux étrangers. Le Seigneur Dieu n’est pas seulement le roi de son peuple mais aussi celui de toute la terre. Il veille sur tous. C’est de cela que nous avons tous à témoigner. En tant que chrétiens baptisés et confirmés, c’est notre mission et notre responsabilité.
Dans la seconde lecture, nous découvrons saint Paul qui a quitté son pays pour annoncer l’Evangile aux païens. Au moment où il écrit sa lettre, il est en prison ; il est exclu de la société. Son message dérangeait beaucoup. Ceux qui l’ont arrêté croyaient pouvoir enrayer la diffusion de l’Evangile qu’il annonçait. Mais, dit Paul, “on n’enchaine pas la Parole de Dieu”. Le témoignage des martyrs est source de conversions. En voyant leur foi courageuse, des étrangers se sont convertis à Jésus Christ. Le même Seigneur nous envoie : il veut que tous les hommes soient sauvés et il fait appel à nous pour participer à cette mission.
Dans l’Evangile, nous découvrons Jésus au cours de sa montée à Jérusalem. C’est là qu’il va livrer son corps et verser son sang pour nous et pour la multitude. Sur sa route, il rencontre dix lépreux qui le supplient d’avoir pitié d’eux. Ces hommes étaient des exclus car la lèpre les rendait impurs. Ils ne devaient avoir aucun contact avec qui que ce soit. La loi qui était faite pour sauver était devenue une loi pour exclure (et aussi exclure du salut). Jésus rétablit cette fonction première de la loi. En se montrant au prêtre pour faire constater leur guérison, ces hommes pouvaient être réintégrés dans leur communauté.
Sur les dix lépreux, seul le samaritain est revenu à Jésus. En tant que samaritain, il restait un exclu ; il ne pouvait donc pas se présenter au prêtre. Mais il revient à Jésus en glorifiant Dieu à pleine voix. Sa foi ne l’a pas simplement guéri : elle l’a sauvé. Il peut maintenant retourner auprès des siens pour témoigner de la bonne nouvelle : Jésus Christ est le Sauveur de tous les hommes, y compris de ceux qui ne font pas partie de son peuple.
Voilà un message de la plus haute importance pour nos communautés chrétiennes : beaucoup s’y sentent exclus : pensons à tous les lépreux de notre temps, les personnes qu’on dit anormales, les marginaux, les petits, ceux qui dérangent notre vie bien tranquille. Mais l’Evangile nous dit que la Bonne Nouvelle est pour tous. Elle s’adresse en priorité aux pauvres, aux prisonniers, à tous ceux et celles qui sont tombés bien bas. Le monde les méprise. Mais ils sont tous très importants aux yeux de Dieu. Il tient à chacun comme à son bien le plus précieux. Il compte sur chacun de nous pour le leur dire.
Chaque dimanche, nous nous retrouvons à l’église. L’Eucharistie que nous y célébrons nous purifie. Elle rassemble des hommes différents en un seul peuple. Elle nous rend ouverts pour ceux qui voudraient y entrer. Nous faisons nôtre cette supplication de la Prière Eucharistique N° 3 : “Ramène à toi, Père très aimant, tous tes enfants dispersés”. Oui, donne-nous de ne pas faire obstacle à ta volonté de rassembler tous les hommes mais d’y adhérer par toute notre vie. Amen
Message du pape François pour la Journée Missionnaire Mondiale 2013
Sources : Revues Feu nouveau, Signes, Dimanche en paroisse – Pour la célébration de l’Eucharistie (Feder et Gorius) – Missel communautaire – Numéro spécial de Prions en Eglise.
Merci pour l homelie et les deux videos. J ai beaucoup a faire car tout mon environnement est agnostique. Seigneur, multiplie mes actes d amour envers les miens pour que ma foi soit cohérente. Par contre ma famille est unanime, le pape François est très bien.
28ème dimanche ordinaire – année C – 13 octobre 2013 – Evangile de Luc 17, 11-19
LA RECONNAISSANCE EST PLUS QU’UN MERCI
De façon assez similaire, Marc, Matthieu et Luc ont raconté qu’aux premiers temps de sa mission, Jésus avait, par un simple contact de la main, purifié un lépreux rencontré sur la route (Matth 8, 1 ; Marc 1, 40 ; Luc 5, 12). Mais Luc est le seul qui, en outre, rapporte une autre rencontre de ce genre de malade : quelle est la richesse de cette scène supplémentaire qui constitue l’évangile de ce dimanche ? S’agit-il seulement d’une leçon de gratitude ?
10 LÉPREUX « PURIFIÉS SUR PAROLE »
Tout d’abord un mot sur cette maladie. A l’époque, le mot « lèpre » désigne toute grave infection dermatologique qui se signale par des taches, des pustules, des suintements et qui se manifeste comme hautement contagieuse. D’où la terreur provoquée par cette affection qui exige l’exclusion, la mise à l’écart de celui qui en est atteint. Les « lépreux » sont chassés de leur famille et de leur entourage, ils sont des parias avec lesquels il faut éviter tout contact. Souvent ces malheureux se regroupent et errent en implorant, de loin, quelque soutien. La lèpre n’est pas seulement une maladie, mais une « impureté » peut-être due à un châtiment de Dieu : aussi sa guérison est-elle appelée une « purification » qui doit être constatée par un prêtre du temple de Jérusalem et authentifiée par des sacrifices. Ce rituel obligatoire permet alors au malade de réintégrer la société (cf. « Lévitique 14 »).
Jésus, marchant vers Jérusalem, traversait la Samarie et la Galilée.
Comme il entrait dans un village, dix lépreux vinrent à sa rencontre.
Ils s’arrêtèrent à distance et lui crièrent : « Jésus, maître, prends pitié de nous. »
En les voyant, Jésus leur dit : « Allez vous montrer aux prêtres ».
En cours de route, ils furent purifiés.
Luc rappelle sans cesse cette montée de Jésus vers Jérusalem : ici commence la dernière section qui aboutira, par Jéricho, à l’entrée dans la capitale. Les notations des lieux traversés restent imprécises car l’important n’est pas de reconstituer l’itinéraire exact pour que, plus tard, des chrétiens l’empruntent. Le chemin de tout disciple n’est pas de faire un pèlerinage en « terre sainte » (sic) : le seul vrai pèlerinage, c’est la vie du disciple qui renonce à lui-même, porte sa croix chaque jour et suit Jésus c.à.d. cherche à vivre comme il l’a enseigné (9, 23)
Tout à coup, sur le chemin, surgit un petit groupe de ces malheureux mutilés dans leur chair et « excommuniés » par leur peuple. Sans doute ont-ils entendu parler de ce Jésus qui opère des guérisons : selon la règle, ils s’arrêtent et de loin ils interpellent Jésus par le nom que, jusqu’à présent, les disciples étaient seuls à lui donner : « Maître ! ». Alors que naguère Jésus s’était approché du lépreux solitaire pour le toucher et le purifier sur le champ, ici, sans les guérir, il demande à ces pauvres hommes de le croire sur parole : « Allez au temple et montrez que vous êtes purifiés » !???…
Exigence énorme : toutefois, sans un mot, les lépreux obéissent….et effectivement, en route vers Jérusalem, ils constatent qu’ils sont guéris. On imagine leur joie folle, leur course en avant pour gagner Jérusalem, se précipiter dans le temple, se montrer aux prêtres et accomplir les sacrifices prescrits.
Mais neuf seulement vont jusqu’au bout : l’un d’eux rebrousse chemin et, au lieu d’aller au temple de Dieu, il revient en arrière vers Jésus.
UN LÉPREUX ÉTRANGER « SAUVÉ ».
L’un d’eux, voyant qu’il était guéri, revint sur ses pas, en glorifiant Dieu à pleine voix.
Il se jeta la face contre terre aux pieds de Jésus en lui rendant grâce. Or, c’était un Samaritain.
Alors Jésus demanda : « Est-ce que tous les dix n’ont pas été purifiés ? Et les neuf autres, où sont-ils ? On ne les a pas vus revenir pour rendre gloire à Dieu ; il n’y a que cet étranger ! »
Jésus lui dit : « Relève-toi et va : ta foi t’a sauvé. »
Si, au point de départ, Israël était un petit peuple uni, très vite les tribus du nord avaient fait sécession, avaient construit une nouvelle capitale, Samarie, et un temple concurrent de celui de Jérusalem : aussi entre Judéens et Samaritains, l’animosité était grande. Précisément c’est un homme du nord, ne fréquentant pas le temple de Jérusalem, qui, se voyant guéri, revient sur ses pas en extériorisant son allégresse.
Luc aime signaler que la Bonne Nouvelle provoque des manifestations spectaculaires de joie : à Bethléem, après la découverte de l’enfant, les bergers « chantent la gloire et les louanges de Dieu » (2, 20) ; le paralytique guéri retourne « en rendant gloire à Dieu » et la foule l’imite (5, 25-26) ; idem à Naïn (7, 16) ; idem la femme redressée (13, 13) et l’aveugle de Jéricho (18, 43). Lorsque les apôtres sortiront du cénacle après avoir reçu l’Esprit-Saint, ils seront tellement joyeux qu’on les croira ivres (Ac 2, 13) et la première communauté prendra ses repas avec allégresse (Ac 2, 46)….
Qu’avons-nous fait aujourd’hui de la folle joie chrétienne ? Pourquoi nos assemblées sont-elles à ce point figées ? La liturgie nous affirme que Dieu nous parle et nous pardonne, que son Fils se donne à nous comme Pain de Vie, et nous demeurons amorphes. On nous dit : « Le Seigneur est avec vous »…et nous demeurons cois, silencieux, sans réaction.
Notre ancien lépreux « rend gloire à Dieu à pleine voix … il se prosterne à terre devant Jésus en lui rendant grâce ». Bénéficiaire de la Puissance et de la Bonté de Dieu, il adore ce Jésus en qui il reconnaît sa présence. Chanter cette découverte lui apparaît plus essentiel que d’aller accomplir les rites de purification. Jésus passe avant le temple car il est la nouvelle Présence de Dieu, le Prêtre qui offre la guérison. On le voit : la démarche de l’homme est bien davantage qu’une simple « reconnaissance » au sens de gratitude, de remerciement d’un malade à son guérisseur mais une profession de foi, une « reconnaissance » de l’homme Jésus comme Seigneur.
Et c’est un « samaritain », « un étranger » ! Mais déjà, dans sa prédication inaugurale à la synagogue de Nazareth, Jésus n’avait-il pas rappelé que jadis, seul, Naaman, le général syrien, avait été guéri de sa lèpre (4, 27) ? Mais ici un saut immense est accompli : le 10ème homme n’est pas seulement « purifié » d’une maladie corporelle mais il est « sauvé ».
Parce qu’il s’est prosterné devant Jésus, celui-ci peut lui proclamer : « RELEVE-TOI (c’est le verbe qui sera employé pour la Résurrection !) : TA FOI T’A SAUVE » c.à.d. t’a introduit dans la guérison totale de ton être.
Jésus avait dit la même Bonne Nouvelle à la pécheresse au parfum (7, 50), à la femme souffrant d’hémorragies venue toucher son manteau (8, 48) et il le redira encore à l’aveugle de Jéricho (18, 42).
La guérison d’une maladie ou d’un handicap corporel est renvoyée aux efforts de la médecine : mais seule la foi en Jésus, homme et présence de Dieu, peut libérer le cœur de la lèpre du péché et « re-susciter » le croyant.
Et pourquoi cet homme est-il « sauvé » ? Parce que Jésus, à sa place, s’est rendu, lui, à Jérusalem, il est allé se montrer aux grands prêtres et ceux-ci, au lieu de le reconnaître, l’ont rejeté et condamné. Sur la croix, pauvre loque sanglante et défigurée, Jésus était semblable à un lépreux, horrible à voir et excommunié. Mais, tel le Serviteur souffrant d’Isaïe, il s’offrait pour que tous les hommes abîmés par la lèpre du péché soient réintégrés dans l’Amour du Père.
C’est pourquoi, à chaque Eucharistie, nous aussi, nous supplions comme le lépreux : « Eleison ! – Aie pitié » et, comme lui, nous « rendons gloire à Dieu », nous « adorons le Serviteur crucifié reconnu comme notre Seigneur ». Nous ne sommes plus des étrangers ni des parias mais des Enfants de Dieu vivant dans la communion de l’Amour unique.
Serons-nous désormais des assemblées qui chantent leur jubilation et témoignent de leur Salut ?
Raphaël D, dominicain
Dieu n’exclut personne dans son oeuvre salvatrice en Jésue Christ. Puisque le salut est offert à tous, Le Christ nous appelle à la tolérance, au partage gratuit du don gratuit de Dieu. aux yeux de Dieu, il n’y a pas d’exclusion: pécheur-juste, paiens- gentils, lépreux-purs tous nous sommes rachetés par l’unique corps et l’unique sans du Christ ressuscité d’entre les morts. merci mon père pour ce message à considérer les marginaux comme faisant partie de la famille de Dieu notre Amour
28e dimanche dans l’année C
Le récit de Luc est construit sur une distance qui devient une proximité. Distance des 10 lépreux qui ne peuvent pas s ‘approcher d’un homme en bonne santé. Distance de ces hommes qui doivent se comporter comme s’ils étaient déjà guéris de ce mal qui les détruit à petit feu. Ils ont à se rendre, encore malades, vers les prêtres, seul habilités à constater officiellement leur guérison. Dernière distance qui est celle qui sépare le Samaritain, l’étranger, l’ennemi d’Israël, donc de Jésus. Eh bien, toutes ces distances vont être franchies par la foi.
Premier degré de foi, que franchiront les dix lépreux : la foi consiste à anticiper. « La foi est le moyen de posséder déjà ce qu’on espère, et de connaître des réalités qu’on ne voit pas » (Hébreux 11, 1). Sur une simple parole, ils se mettent en route pour aller trouver les prêtres, alors qu’ils n’ont encore aucune preuve de leur guérison. Mais leur confiance en une parole entendue leur suffit pour les mettre en route. Ils vont retrouver la santé. C’est déjà remarquable, n’est-ce pas, de croire sur parole ! Si seulement nous en étions là !
Par contre, le Samaritain va plus loin. Il franchit l’étape décisive de la foi. Il supprime toute distance entre lui et Jésus.
Pour ses neuf camarades, Jésus n’est que l’instrument de la guérison, alors que lui, Jésus est sort de la guérison pour accéder à la relation. Il « glorifie Dieu » et « rend grâce à Jésus ». Dieu et Jésus sont confondus, réunis, dans un même remerciement. C’est pourquoi, si les dix sont « guéris », un seul est « sauvé ». Ce Samaritain, le voici maintenant « aux pieds de Jésus ». Toutes les distances sont abolies. Seul celui qui était le plus loin (l’étranger) saura se faire vraiment proche. Il va dépasser l’interdit de la Loi, puisqu’il s’avance près de Jésus avant d’avoir fait constater sa guérison par le prêtre.
Et Jésus va le « relever », cet homme prostré devant lui. Le mot « relever » est un des deux mots grecs employés par les premiers témoins pour dire la résurrection du Christ. Dans le contexte pascal qui est celui de notre récit, il me semble que Jésus, relevant l’étranger, nous signifie combien il veut que l’homme, tout homme, soit un « homme debout », un vivant. « La gloire de Dieu c’est l’homme vivant », a dit superbement saint Irénée. La foi de ce Samaritain ne l’a pas seulement amené à la santé, mais déjà à la vraie vie, la vie divine, dans une étroite proximité avec le Dieu qu’il sait reconnaître en la personne de l’homme-Jésus qui l’a remis sur pied. Tous les hommes – vous, moi – crient souvent leur détresse vers Dieu, même s’ils ne nomment ni Dieu ni le Christ. En tout homme, il y a si souvent une protestation contre le mal. Dieu entend ce cri, qui est comme le premier degré de la foi. Mais beaucoup ne vont pas plus loin dans la démarche de foi. Ils ne vont pas au bout, qui est reconnaissance aux deux sens du terme.
Reconnaissance, parce qu’on tient à dire merci. Reconnaissance parce qu’on sait reconnaître l’origine du don reçu. Ne sommes-nous pas, souvent, comme les neuf lépreux qui n’oublient pas de se plaindre de leurs difficultés, mais n’ont pas la louange facile lorsque tout va bien… Ayant obtenu ce qu’ils voulaient, ils se referment sur leur santé recouvrée, sans un mot de gratitude.
Heureusement , à d’autres moments, nous savons vivre l’attitude si belle du Samaritain de l’évangile : ces parents qui apprennent à leurs petits à dire merci dans leur prière ; ces chrétiens qui vont à la messe non « pour que ça leur rapporte », mais déposer leur « eucharistie », leur reconnaissance hebdomadaire. Heureusement que nous savons dire merci à nos vieux parents sans attendre qu’ils soient morts…
Soyons de ceux qui remettent debout les autres par un mot de « merci » et des gestes de gratitude.
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