Homélie de la fête du Christ Roi de l’univers (24 novembre 2013)
Abbé Jean Compazieu | 16 novembre 2013
Fête du Christ Roi de l’univers
Textes bibliques : Lire
En ce jour, nous sommes dans la joie. Nous célébrons en effet la solennité du Christ Roi. Jésus est le roi de l’univers et cela doit nous réjouir. Mais la liturgie de ce jour est là pour nous éviter une confusion. Elle vient nous faire comprendre le vrai sens de cette royauté. Jésus n’est pas un roi à la manière des grands ce monde. C’est ce message que voudraient nous faire comprendre les lectures de ce dimanche.
Nous avons tout d’abord l’histoire de David, le petit berger d’Israël. Quand il est devenu roi, il a réuni le Royaume du Nord et celui du Sud. C’était déjà une annonce de ce que le Christ réaliserait lors de sa venue. Jésus s’est présenté comme un rassembleur. Mais cette mission ne s’est pas limitée au seul pays d’Israël. Elle est offerte à tous les hommes du monde entier et de tous les temps. Le Christ a réconcilié tous les peuples de la terre en livrant son Corps et en versant son sang. Ce qui est extraordinaire c’est qu’il nous appelle tous à cette œuvre de rassemblement. Il compte sur nous pour être des artisans d’unité, de justice et de réconciliation. “Là où est la haine, que je mette l’amour… Là où est la discorde, que je mette l’union.” (Saint François)
L’unité entre les hommes passe par une multitude de petites ententes. Et c’est toujours à refaire. Il nous appartient de voir ce que nous pouvons faire contre la rancune et pour favoriser cette entente dans nos divers lieux de vie. Cette unité à construire réclame des gens qui n’ont pas peur de payer de leur personne et de leur temps. Il y aura toujours des risques, celui d’être critiqué ou tourné en dérision. Mais nous ne sommes pas seuls : quand nous nous engageons sur ce chemin, le Christ est là, bien présent. C’est lui qui agit dans le cœur de ceux et celles qu’il met sur notre route.
Dans sa lettre aux Colossiens (2ème lecture), saint Paul nous parle aussi du Christ roi de l’univers. C’est par lui que tout existe. Il est le collaborateur du Père dans son œuvre de création. Il est le sommet et la fin de toutes choses : “Tout est créé par lui et pour lui.”. L’homme a pour mission de s’accomplir lui-même à l’image de Dieu. Il est capable d’amour libre et gratuit. Le Christ nous ouvre le chemin. Lui, le premier ressuscité, marche à la tête de l’humanité nouvelle. C’est avec lui et par li que nous allons au Père. C’est de cette foi et de cette espérance que nous avons tous à témoigner. Le Christ glorieux nous offre d’avoir part à sa victoire.
L’évangile nous montre la manière dont le Christ est devenu roi. Saint Luc nous présente le visage bouleversant de Jésus en croix entre deux malfaiteurs. Nous le voyons tourné en dérision par ses adversaires et abandonné par les siens. Il se trouve entre deux malfrats, également condamnés à mort. L’un d’eux s’est vu attribuer le titre de “bon larron”. Mais y aurait-il de bons assassins, de bons truands ou de bons voleurs ? ce qu’il faut voir dans ce récit c’est la miséricorde divine envers les mal aimés et les malfaiteurs.
Il y a un chant qui revient régulièrement dans nos liturgies : “Laisse-toi regarder par le Christ car il t’aime.” C’est là que nous voyons toute la différence entre ces deux condamnés : cette différence se révèle dans leur manière d’accueillir le regard du Christ. Le premier joue l’ironie. L’autre appelle Jésus par don nom ; il le supplie : “Souviens-toi de moi quand tu viendras inaugurer ton règne”. Cette attitude de confiance et d’abandon est à peine croyable de la part “d’un hors-la-loi, d’un hors-la-foi”. Dans l’Evangile de saint Luc, c’est la dernière parole de Jésus avec un confrère en humanité. Jésus lui annonce qu’en mourant ensemble, ils se retrouveront ensemble au paradis.
“Souviens-toi de moi…” C’est aussi cette humble prière que nous, pécheurs, nous faisons monter vers le Seigneur. Souviens-toi de ce monde ; souviens-toi de ceux et celles qui vont à la dérive. Souviens-toi des personnes éprouvées par la maladie, les infirmités, la précarité, l’exclusion. Souviens-toi de ceux et celles qui vivent sans espérance et sans amour. Tu es le Roi de l’univers. Tu veux rassembler tous les hommes dans ton Royaume. Nous avons la ferme espérance qu’un jour tu nous diras : “Aujourd’hui, tu seras avec moi dans le paradis”. Amen
Sources : Lectures bibliques des dimanches (A. Vanhoye), missel communautaire (A. Rebré) “Aujourd’hui s’accomplit pour nous l’Ecriture” (E. Bianchi). Revues Signes, Feu Nouveau, Dimanche en Paroisse.
Solennité du Christ-Roi C
Les trois lectures de la fête du Christ-Roi nous invitent à vérifier les racines, à la fois humaines et éternelles, ainsi que la vraie royauté de Jésus. Par ses parents, Jésus est de race royale. Il descend du second et du plus prestigieux des rois de Jérusalem, de ce petit berger de Bethléem que Dieu devait se choisir pour en faire le pasteur de son peuple. Nouveau David, Jésus sera le dernier fleuron qui couronne l’arbre de Jessé (Isaïe 11/1-8).
Par son hymne à la Seigneurie universelle du Messie, Paul nous donne les dimensions éternelles de cette royauté. Il est « l’image du Dieu invisible ». Vers lui, tout est mystérieusement en marche, car rien n’échappe à ses énergies de résurrection. Il est celui qui réconcilie tout, sur la terre et dans les cieux, « en faisant la paix par le sang de sa croix ».
Rien que par cela, nous découvrons déjà la révélation paradoxale de la vraie royauté de Jésus. En affichant sur le bois de la croix « Celui-ci est le roi des juifs », les bourreaux ont cru fustiger une ambition politique qui, en fait, n’était pas celle de Jésus. Les provocations des chefs des prêtres et des soldats n’expriment qu’un défi lancé à un « imposteur ».
Les injures d’un de ses deux compagnons d’infortune sont d’une toute nature. « N’es-tu pas le Messie ? Sauve-toi toi-même, et nous avec ! » Jésus est ici très douloureusement tenté. S’il est crucifié, c’est pour aller jusqu’au bout de la solidarité avec les hommes souffrants, coupables ou torturés. La tentation porte précisément sur ce point. S’il peut accepter de ne pas user de son pouvoir pour son propre bénéfice, comment rejeter un tel appel, même crié dans la révolte ? Il se tait. Livré à ses frères, il s’en remet à eux.
Et c’est un d’entre eux qui va répondre pour lui. « Pour nous, c’est juste (…) Mais lui, il n’a rien fait de mal. » Et, dans l’humilité confiante, le larron poursuit : « Jésus, souviens-toi de moi quand tu viendras inaugurer ton Règne ». Jésus alors use de ses prérogatives royales qui est de gracier. Il répond au défi qui lui était lancé : « Aujourd’hui, avec moi, tu seras dans le Paradis ». Il sauve un homme, non en le préservant de la mort corporelle, mais en faisant de cette mort le passage à la vraie vie et au bonheur.
Le Royaume de Jésus est un royaume de pardonnés. La manière pour la Christ d’exercer sa royauté sur tous les hommes, y compris ses ennemis, y compris les monstres et les tortionnaires, c’est de leur offrir son pardon. Le pécheur y a toute sa place, à une seule condition : reconnaître sa culpabilité en accueillant le pardon toujours offert de Dieu.
Oui, Jésus est bien le « nouvel Adam » qui aide l’humanité à réintégrer le paradis perdu. Et ceci, dès « aujourd’hui ». Recueillons, durant la prière de la semaine qui vient, les signes de la venue discrète du Royaume de Dieu : amour, justice, vérité, pardon.
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LE CHRIST ROI – fin de l’année C – Dimanche 24 novembre 2013 – Evangile de Luc 23, 35-43
« FORT COMME LA MORT EST L’AMOUR »
(Cantique des Cantiques 8, 6)
Afin de choquer, bouleverser, émouvoir, la presse à sensation aurait rapporté la crucifixion de Jésus avec force détails – hurlements, claquements de fouet, coups de marteau, giclements de sang, visages tordus de haine…Tout au contraire les évangélistes, au risque de gommer l’horreur et le paroxysme des souffrances endurées par Jésus, écrivent des récits très sobres : ainsi Luc note : « Arrivés au lieu dit du Crâne ils le crucifièrent avec les deux malfaiteurs ».
En effet ce qu’il importe de communiquer, c’est le SENS qui a jailli de cet événement que les disciples ont d’abord vécu comme une horreur, un échec radical, une mort insensée. L’essentiel n’est pas de faire pleurer le lecteur, mais l’exhorter à CROIRE, à découvrir la lumière qui a jailli de ces ténèbres : la crucifixion de Jésus n’est rien moins que son couronnement, son intronisation comme MESSIE ROI. Après avoir été d’abord révulsé par ce fait, saint Paul écrira fièrement : « Nous prêchons un messie crucifié, scandale pour les Juifs, folie pour les païens, mais il est Christ, puissance de Dieu et sagesse de Dieu » (1 Cor 1, 23). Au cœur d’une histoire qui est un gigantesque affrontement de puissances qui cherchent à régner par la force, Jésus crucifié est le vrai ROI que notre haine a écrasé mais qui nous sauve par son amour ensanglanté. La force veut sauver et elle tue ; Jésus est tué et il sauve.
En ce dernier dimanche de l’année liturgique, l’Eglise nous appelle à confesser : « Pour moi, jamais d’autre titre de gloire que la CROIX de notre Seigneur Jésus Christ » (Gal 6, 14). – – – Lisons le texte du jour :
On venait de crucifier Jésus, et le peuple restait là à regarder.
Ces hommes, espèrent-ils un miracle de dernière minute, une manifestation de puissance ? Pendant les jours précédents, « le peuple, suspendu à ses lèvres, écoutait » Jésus prêchant sur l’esplanade du temple (19, 48 ; 21, 38) mais lorsque le mécanisme de l’arrestation s’est enclenché, personne n’a réagi pour défendre son innocence et rappeler ses bienfaits et ses guérisons. A présent, au Golgotha, « le peuple regarde ». Et lorsque Jésus sera mort, « les gens s’en iront en se frappant la poitrine » (23, 48) c.à.d. en montrant les premiers signes de conversion.
C’est la croix seule qui signe la vérité de la Parole et qui éveille le repentir authentique.
Mais où sont les apôtres choisis par Jésus, qui le suivaient depuis la Galilée, qui voyaient ses miracles, qui l’écoutaient, qui l’acclamaient lors de sa joyeuse entrée ? Ils ont disparu, terrés quelque part, figés de peur. Seuls, jusqu’à la fin, quelques familiers de Jésus et les femmes regardent (23, 49).
Il en va encore ainsi de nous : le chrétien écoute l’Evangile puis il contemple longuement la croix. Alors il peut manger le Pain du Ressuscité, parler de sa foi et témoigner de la joie pascale.
Les chefs ricanaient en disant : « Il en a sauvé d’autres : qu’il se sauve lui-même, s’il est le Messie de Dieu, l’Élu ! » — Les soldats aussi se moquaient de lui. S’approchant pour lui donner de la boisson vinaigrée, ils lui disaient : « Si tu es le roi des Juifs, sauve-toi toi-même ! »
—— Une inscription était placée au-dessus de sa tête : « Celui-ci est le roi des Juifs. »
L’un des malfaiteurs suspendus à la croix l’injuriait : « N’es-tu pas le Messie ? Sauve-toi toi-même, et nous avec ! »
Si les croyants se taisent, les ennemis, eux, se déchaînent ; comme cela est odieux de ricaner devant un homme en train de mourir ! Et comme cette dérision doit ajouter aux souffrances de Jésus ! « On dit qu’il a sauvé des malades et voilà maintenant qu’il est incapable d’échapper à son destin ! ». Or Jésus n’échappe pas à sa vocation, au contraire il l’accomplit jusqu’au bout ; il ne refuse pas la mort, il la traverse pour la vaincre. Ainsi devient-il Roi. Le psaume du juste souffrant se réalise :
« Je suis un ver, non plus un homme, injurié par les gens, rejeté par le peuple.
Tous ceux qui me voient me raillent, ils ricanent et hochent la tête :
« Tourne-toi vers Dieu : qu’il te libère, qu’il te délivre – puisqu’il l’aime ! ».
Ils m’ont percé les mains et les pieds, je peux compter tous mes os.
Des gens me voient, me regardent ; Ils se partagent mes vêtements et tirent au sort mes habits…
Mais toi, Seigneur ne sois pas loin ! A l’aide ! Fais vite !
Et tu m’as répondu ! Je redirai ton Nom à mes frères, je te louerai dans la grande assemblée »
Jésus termine sa vie comme il l’a commencée : comme cible de la triple tentation. Au désert, après son baptême, le satan lui soufflait : « S’il est vrai que tu es le Fils de Dieu, transforme les pierres en pains, jette-toi du haut du temple, conquiers le monde ». Jésus avait refusé d’utiliser sa puissance filiale à son profit et satan « s’était écarté jusqu’au moment fixé » (4, 13). Ce moment est venu de la tentation exacerbée. Mais Jésus résiste : on ne sauve pas l’humanité par des miracles qui subjuguent la liberté d’autrui mais par l’amour qui va jusqu’au bout, la mort. En refusant de descendre de la croix et en appelant les hommes à le suivre jusque là, Jésus devient la plus grande puissance pour sortir l’humanité de sa haine et de sa boue et pour la faire monter vers Dieu.
Les Romains ne comprenaient pas le mot juif de « messie » et ils l’interprétaient comme chef politique – d’où l’écriteau imposé par Pilate, et que Luc a eu soin de placer en plein milieu de son récit : Jésus est crucifié pour s’être présenté comme un révolutionnaire, un chef qui voulait rétablir l’indépendance d’Israël. Mais de fait il devient ROI de l’humanité et jusqu’à la fin des temps: vêtu de pourpre (son sang), couronné (d’épines), contemplé (par le peuple), affiché (par l’écriteau), dressé sur son trône (la croix).
LE PREMIER SAINT AU PARADIS
Mais l’autre lui fit de vifs reproches : « Tu n’as donc aucune crainte de Dieu ! Tu es pourtant un condamné, toi aussi ! Et puis, pour nous, c’est juste : après ce que nous avons fait, nous avons ce que nous méritons. Mais lui, il n’a rien fait de mal. ».Et il disait : « Jésus, souviens-toi de moi quand tu viendras inaugurer ton Règne. »
Jésus lui répondit : « Amen, je te le déclare : aujourd’hui, avec moi, tu seras dans le Paradis. »
Les deux malfaiteurs devaient être des résistants, partisans de la lutte armée, et qu’on appellera bientôt des sicaires, des zélotes. De part et d’autre de Jésus, ils représentent les deux attitudes antagonistes devant la mort : celle de la révolte et celle de l’espérance. Le second admet son sort de combattant : ayant opté pour la violence, il est exécuté par la violence. Mais il comprend que Jésus est victime innocente de l’injustice et il semble croire qu’il est le messie, injustement mis à mort, mais qui, à la fin du monde, viendra instaurer son règne.
Non seulement Jésus confirme solennellement sa foi (« amen … ») mais il l’assure que ce Règne messianique commence aujourd’hui. En ne voulant pas que Jésus le préserve de la mort, mais en croyant qu’il va mourir pour lui, le pauvre malfaiteur accède au bonheur éternel qu’évoquait la Bible à sa première page : ce paradis, ce jardin où l’arbre de Vie, enfin retrouvé, est l’arbre de la croix.
Qu’est « le paradis » ? Rien d’autre qu’ « être avec Jésus ». Dans son discours d’adieu, Jésus consolait les siens : « Je vais vous préparer une place, je reviendrai et je vous prendrai avec moi, si bien que là où je suis, vous serez vous aussi » (Jn 14, 1-3). Quand les premiers chrétiens s’interrogeaient déjà sur le sort des défunts, Paul, dans sa première lettre, disait l’essentiel : « …Et ainsi nous serons toujours avec le Seigneur » (1 Thess 4, 17). Plus tard, dans son cachot, pressentant son exécution, il écrivait : « Pour moi, vivre c’est le Christ et mourir m’est un gain…J’ai le désir de m’en aller et d’être avec Christ » (Phil 1, 21).
Il est enfantin d’imaginer un lieu de délices : ce serait un retour au sein maternel. L’essentiel qui seul comble, c’est la communion : « être avec le Seigneur Jésus ».
Nous terminons l’année dans la joie avec cette espérance à vivre et cette foi à proclamer :
JESUS SEUL SEIGNEUR
Raphaël D, dominicain
Christ Roi de l’univers cette fête occupe une place de choix de notre vie de Chrétien. c’est le dernier dimanche du temps ordinaire qui nous plonge déjà dans le temps de l’avant.Oui avouons donc que Jésus est le Roi. “Roi” avec majuscule. Personne ne sera jamais à l’hauteur de sa puissance. Le Règne de Jésus n’est pas de ce monde. C’est un Règne où l’on entre par la conversion chrétienne. Un Règne de vérité et de vie, Règne de sainteté et de grâce, Règne de justice, d’amour et de paix. Un Règne qui est naît du Sang et de l’eau qui jaillirent du côté de Jésus-Christ.
Le Règne de Dieu fût le sujet principal du prêche du Seigneur. Il invitait tout le monde sans cesse à y entrer. Un jour, dans le Sermon sur la montagne, Il a proclamé «bienheureux les pauvres d’esprit, parce qu’à eux appartient le royaume des cieux».
Origène, en glosant ces paroles de Jésus «En effet, voilà que le Règne de Dieu est au milieu de vous» (Lc 17,21), explique que «celui qui prie pour que vienne le Royaume de Dieu prie avec raison qu’en lui s’élève, fructifie, s’achève le Règne de Dieu». Et il ajoute que «le Royaume de Dieu en nous, alors que nous progressons toujours, atteindra sa perfection, quand s’accomplira la parole de l’apôtre: lorsqu’il aura soumis tous Ses ennemis, le Christ remettra le Royaume à Dieu le Père, afin que Dieu soit tout en tous». L’auteur nous exhorte à dire toujours «Que ton nom soit sanctifié, que ton Règne vienne».