Homélie du 5ème dimanche du temps ordinaire (9 février)
Abbé Jean Compazieu | 1 février 2014
Envoyés pour porter la Lumière
Textes bibliques : Lire – Ecouter (temps de silence)
Les textes bibliques de ce dimanche nous révèlent un Dieu qui nous guide vers la vraie Lumière. Le prophète Isaïe (1ère lecture) s’adresse à un peuple qui revient d’une longue captivité. Il reste encore des douloureuses séquelles de cette terrible période. Malgré tout, la pratique religieuse s’est remise en place. Pleins de bonne foi, ces gens veulent plaire à Dieu. Mais il y a un problème ; et c’est là qu’Isaïe intervient. Beaucoup pensent que Dieu attend les plus somptueuses cérémonies et les meilleurs fruits de la terre. C’est normal qu’on veuille se prosterner devant le créateur du ciel et de la terre.
Mais le vrai Dieu n’est pas comme cela ; il n’exige rien pour lui ni pour sa gloire personnelle. Son bonheur c’est de voir que le droit et la justice animent les relations entre nous. Sa grande joie c’est que nous vivions ensemble comme des frères. Notre attention doit se porter vers les plus faibles et les plus pauvres : “Partage ton pain avec celui qui a faim…. Ne te dérobe pas à ton semblable.” Nous ne pouvons pas aimer Dieu sans aimer le prochain. Le Dieu de la Bible est un Dieu libérateur et miséricordieux. Ce qu’il nous demande c’est d’avoir le même comportement. C’est important car nous sommes faits pour être à l’image de Dieu.
L’apôtre Paul (2ème lecture) a lui aussi le souci de nous montrer celui qui est la vraie lumière. Son message n’a rien à voir avec la sagesse des hommes. Lui-même n’est pas un “accrocheur” à la parole convaincante. Contrairement aux gens de Corinthe, il n’a rien d’un tribun éloquent. II n’a aucun don pour manier les foules. Mais il croit en l’amour fou d’un Dieu qui se laisse crucifier. Pour les corinthiens, c’était inimaginable. Et pourtant, c’est de cela qu’il veut témoigner de toutes ses forces. Il ne cherche pas à convaincre les foules avec des arguments humains. Mais il croit en l’Esprit Saint qui agit en lui et par lui. Il a compris que la foi ne repose pas sur la sagesse des hommes mais sur la puissance de Dieu.
Que pouvons-nous retenir de ce texte ? On parle actuellement de nouvelle évangélisation. Le pape François nous invite à rejoindre les “périphéries”. Mais aujourd’hui comme aux premiers temps, il y a une chose que nous ne devons jamais oublier : ce n’est pas nous qui agissons dans le cœur des gens ; c’est le Christ qui agit en nous et par nous. Il nous envoie son Esprit Saint pour que notre témoignage porte du fruit. Ce qui nous est demandé comme à Paul, c’est de nous effacer devant celui que nous montrons. Si nous recherchons l’admiration, la considération et la popularité, nous faisons fausse route. C’est la foi qu’il s’agit de susciter en témoignant du Christ mort et ressuscité.
Dans l’Evangile, nous voyons des disciples rassemblés autour de Jésus sur la montagne. Il leur dit : “vous êtes la lumière du monde”. C’est aussi cela qu’il redit à chacun de nous qui sommes rassemblés autour de lui. C’est à nous, disciples du Christ, d’être des reflets authentiques de la vie e t de l’enseignement de Jésus. Il nous confie d’être ce qu’il est lui-même “lumière du monde”. C’est toute la communauté chrétienne qui est appelée à devenir “lumière des peuples”. Il s’agit pour nous de nous engager activement dans des actions de salut, de libération et de défense des pauvres.
En écoutant ce message, nous pensons bien sûr à ceux qui exercent un ministère dans l’Eglise. Ils sont amenés à proclamer explicitement le message de l’Evangile. Mais il y a une autre forme de témoignage qui peut se passer des mots de la foi : c’est celle du rayonnement de la vie. Avant d’écouter les chrétiens, on les regarde vivre. S’ils ont le sens de l’accueil, du partage et de la solidarité, leur vie parlera plus que leurs paroles. Dans son Evangile, Matthieu insiste très fortement sur ce point : que la vie des chrétiens, leurs actes et leurs “belles actions” aient une force d’attraction, de rayonnement et d’attirance.
Nous vivons dans un monde de laïcité, de sécularisation et d’indifférence. Dans beaucoup de pays, les chrétiens sont persécutés bien plus qu’aux premiers siècles de l’Eglise. Dans ces conditions, il est difficile de parler explicitement du Christ et de l’Evangile. Mais nous pouvons témoigner par “la beauté et la bonté de nos actions”. Cet appel nous rejoint dans notre vie de tous les jours : appel à refuser la colère et la haine dans nos relations humaines, appel à nous réconcilier avec nos frères, volonté d’aimer ses ennemis et de prier pour eux. Le Seigneur n’attend pas de nous de belles paroles mais une “belle conduite”, un comportement ” bon et beau “.
C’est notre façon de vivre et de “bien agir” qui doit poser question à tous ceux et celles que nous rencontrons. En venant à l’Eucharistie, nous sommes accueillis par celui qui est la Lumière du monde. C’est parce que nous sommes rassemblés autour de lui “sur la montagne” que nous pouvons devenir à notre tour Lumière du monde. C’est lui qui nous envoie pour être ses témoins dans ce monde qui en a bien besoin. En ce jour nous le supplions : “Toi qui est lumière, Toi qui est l’amour, mets dans nos ténèbres ton esprit d’amour.” Amen
Sources : revues Signes et Dimanche en paroisse, l’intelligence des Ecritures (Marie Noëlle Thabut), plaquette du dimanche de la santé
> Témoignage de Lee Ok Soon
Dans mon pays, il est interdit aux chrétiennes de donner naissance. C’est pour cela que dans les camps, on injecte un poison aux femmes enceintes. Après 24 heures de souffrances atroces, l’enfant meurt dans leur ventre. Si elles accouchent d’un enfant vivant, les gardes le tuent immédiatement sous leurs yeux.
Dans mon pays, on envoie des familles entières dans des camps. Les chrétiens ont un traitement spécial, ils travaillent davantage, 18 heures par jour, et on leur réserve les travaux les plus pénibles. Ils n’ont pas le droit de lever la tête ou de regarder le ciel. Ils ne reçoivent pratiquement pas de nourriture et ont de l’eau sale à boire. Contrairement aux prisonniers politiques, ils n’ont aucun espoir de libération.
Dans mon pays, les chrétiens ne renient jamais leur foi. J’étais impressionnée de les voir se tenir par la main et chanter avec beaucoup de joie autour des mourants. Un jour, j’ai vu les gardes, les ayant surpris, leur marteler le visage à coups de pied pour les défigurer. Leurs cris déchirants résonnent encore en moi « Seigneur ! Seigneur ! ».
Dans mon pays, la propagande prétend que les chrétiens sont des malades mentaux. Je servais le régime, et je croyais cela. Un jour j’ai désobéi aux ordres, et pour cela j’ai passé 7 années en camp. J’y ai rencontré des chrétiens pour la première fois.
À ma sortie, bien que courbés, ils m’imploraient des yeux « cette liberté n’est pas seulement pour toi, tu as été libérée pour parler de nous ». Non, je n’oublierai jamais cette lumière dans leurs yeux.
Aujourd’hui, grâce à eux, je crois en Jésus et je veux témoigner de ce que j’ai vu : Il n’y a pas d’endroit plus terrible sur terre pour les chrétiens que mon pays.
Mon pays, c’est la Corée du Nord. »
Des propositions pour animer la messe du dimanche de la santé
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Quel douloureux témoignage de LEE Ok Soon; quelle femme courageuse.
Merci, Père Jean pour tout ce que vous nous faites vivre. Pour vos belles homélies, reçues à l’avance pour nous permettre de mieux comprendre les textes. Je pars à la messe, je prierai pour vous, pour tous nos frères chrétiens qui subissent des maltraitances, l’emprisonnement, la mort dans de nombreux pays. Que le Seigneur leur vienne en aide et que nous ne les oublions pas dans nos prières.