25ème dimanche du temps ordinaire B (Homélie)
Abbé Jean Compazieu | 12 septembre 2021« Si quelqu’un veut être le premier,
qu’il soit le serviteur de tous »
Textes bibliques : Lire
Chacun des trois textes qui nous sont proposés en ce dimanche nous montre deux logiques qui s’opposent : l’une est animée par le désir de justice et de paix, par l’ouverture à l’autre et à Dieu ; l’autre cherche le pouvoir, la domination, le plaisir, la satisfaction immédiate. Chacun de ces textes ouvre des pistes pour nous interroger sur ce qui nous guide dans nos choix quotidiens.
La première lecture est un extrait du livre de la Sagesse. Elle nous renvoie au premier siècle avant Jésus Christ. Beaucoup de juifs sont partis à l’étranger. Dans le cas présent, il s’agit de ceux qui vivent à Alexandrie. Les grecs les tournent en dérision parce qu’ils disent avoir une connaissance particulière de Dieu ; ils se disent « fils de Dieu » et « mis à part ». Même parmi leurs compatriotes, beaucoup ont abandonné la pratique religieuse. Ils ont fini par renier leur foi. Ils ne supportent plus la fidélité des croyants car elle est devenue un reproche pour eux.
Les difficultés et les épreuves de ces croyants sont aussi les nôtres. Nous vivons dans un monde où beaucoup sont devenus indifférents ou hostiles à la foi. Les scandales qui ont été mis en évidence ces dernières semaines ne font qu’alourdir cette souffrance. Mais nous avons la ferme espérance que le mal et la haine n’auront pas le dernier mot. Toutes ces épreuves qui frappent l’Église sont un appel à nous attacher fermement au Seigneur. Nous pouvons toujours compter sur lui. Rien ne peut nous séparer de son amour.
Dans la seconde lecture, saint Jacques dénonce « la jalousie et les rivalités mènent au désordre et à toutes sortes d’actions malfaisantes. » L’apôtre nous recommande de nous attacher à « la sagesse qui vient d’en haut ». Cette sagesse « est d’abord pure, puis pacifique, bienveillante, conciliante, pleine de miséricorde et féconde en bons fruits, sans parti pris, sans hypocrisie. » Se laisser guider par la sagesse terrestre conduit au désordre et au mal. La soif de s’enrichir justifie emploi de tous les moyens, y compris la violence et le meurtre. C’est la convoitise qui est à l’origine des guerres, des violences et du mal. La vraie Lumière, nous ne pouvons la trouver que dans la Sagesse qui vient de Dieu ; elle est « droiture, paix, tolérance, compréhension, féconde en bienfaits ». Elle transforme notre cœur et fera de nous des artisans de paix.
L’Évangile de saint Marc dénonce une tentation qui divise l’Église ; selon l’expression du pape François, c’est « l’envie mondaine d’avoir le pouvoir », l’envie et le désir « d’aller plus haut ». Tout cela arrive au moment où Jésus parle « de service et d’humiliation ». Il annonce à ses disciples que « Le Fils de l’homme est livré aux mains des hommes ; ils le tueront et, trois jours après sa mort, il ressuscitera. »
En lisant cet Évangile, nous voyons bien que les apôtres n’ont rien compris ; Jésus vient de leur parler un langage d’humiliation, de mort et de rédemption. Eux, ils parlent « un langage d’arrivistes ». Leur seule préoccupation c’est d’aller le plus haut possible dans le pouvoir. Ils sont tentés par la façon de penser du monde. Pour Jésus, c’est l’occasion de faire une mise au point très ferme : « Si quelqu’un veut être le premier, qu’il soit le dernier de tous et le serviteur de tous. »
Cet enseignement de Jésus vaut aussi pour nous tous. Sur la route que Jésus nous montre pour aller de l’avant, le service est la règle : le plus grand est celui qui sert, celui qui est le plus au service des autres. Ce n’est surtout pas celui qui se vante ni celui qui cherche l’argent et le pouvoir. La vraie grandeur c’est l’accueil et le service des petits. Ce service est élevé au rang de service de Dieu.
À travers ces trois lectures, c’est Dieu qui nous parle ; le juste qui souffre (1ère lecture) nous renvoie aux chrétiens persécutés qui sont obligés de fuir leur pays. Nous pouvons aussi nous reconnaître à travers l’intriguant dont nous parle saint Jacques. Le Seigneur veut nous libérer de cette recherche de nous-mêmes. Et dans l’Évangile, il nous rappelle que les vrais grands ne sont pas ceux qui recherchent les premières places et les honneurs mais ceux et celles dont le cœur est ouvert aux autres.
Nous sommes donc appelés à être une Église « au service » des autres, en particulier des plus fragiles. Nous nous rappelons ce que Jésus a dit un jour : « Ce que vous avez fait au plus petit d’entre les miens, c’est à moi que vous l’avez fait ». Pour cette mission, nous ne sommes pas seuls. À chaque messe, le Seigneur est là pour nous nourrir de sa Parole et de son Corps. Cette rencontre avec lui c’est vraiment LE moment le plus important de la journée. Le Christ est présent avec nous tous les jours, jusqu’à la fin du monde. Il veut nous entraîner à sa suite jusqu’au bout de l’amour. Son Pain Eucharistique nous est distribué pour nous donner la force d’aimer comme lui et avec lui. Prions-le qu’il nous donne force et courage pour rester en « tenue de service ».
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Sources : Revue Feu Nouveau – Guide Emmaüs des dimanches et fêtes – Missel des dimanches et fêtes des trois années (Bayard) – François selon saint Marc Dossiers personnels…
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« Le Fils de l’homme est livré aux mains des hommes ; ils le tueront et, trois jours après sa mort, il ressuscitera. » (Mc 9:31) Dans un contexte confidentiel, Jésus vient d’annoncer à ses disciples le point culminant de sa mission sur terre. Une révélation pesante et grave !
« Mais les disciples ne comprenaient pas ces paroles et ils avaient peur de l’interroger. » (Mc 9:32) Pour eux, comme pour le peuple juif à ce moment-là, l’avènement du Messie reste dans le domaine de la reconquête du pouvoir : Redorer l’image de la grandeur d’une nation ! C’est pour cette raison que, depuis longtemps, la pensée d’occuper un poste à haute responsabilité dans ce royaume n’est pas étranger à leur esprit. Et ce jour-là, durant tout le trajet avec Jésus, un débat apparemment passionné s’anime au sein du groupe. Ils se demandaient qui parmi eux pouvait occuper le premier rang. Chacun rêvait d’être meilleur que l’autre, le préféré du Maître. Une bonne place au soleil !…
« Ils arrivèrent à Capharnaüm, et, une fois à la maison, Jésus leur demanda : ‘De quoi discutiez-vous en chemin ?’ » (Mc 9:33) Gênés, « ils se taisaient ! » Mais, connaissant le cœur de l’homme, Jésus sait de quoi ils discutaient. Sans reproche et à leur grande surprise, Il place un enfant au milieu d’eux et leur dit : « Si quelqu’un veut être le premier, qu’il soit le dernier de tous et le serviteur de tous. » (Mc 9:35) Pour être au plus près du Maître, il faut savoir se faire petit comme un enfant ! Jésus leur enseigne que le plus grand dans le Royaume des Cieux est celui qui sait accueillir le plus petit d’entre eux. « Quiconque accueille en mon nom un enfant comme celui-ci, c’est moi qu’il accueille. Et celui qui m’accueille, ce n’est pas moi qu’il accueille, mais Celui qui m’a envoyé. » (Mc 9:37) Les disciples étaient certainement interloqués et ne saisissaient sans doute pas toute la profondeur et la portée d’un tel geste. Car, à l’époque de Jésus, l’enfant n’était pas adulé comme il l’est souvent aujourd’hui et n’occupe pas le devant de la scène. En demandant à ses disciples d’accueillir l’enfant, Jésus leur montre le chemin du service et crée un contraste cinglant avec leur rêve de grandeur. ‘Accueillir un enfant’, c’est porter l’attention aux plus petits, c’est aller à la rencontre des plus faibles sans rien attendre en retour. C’est mettre l’amour au service de ceux qui n’ont rien à offrir !
‘Être le dernier de tous et le serviteur de tous.’ Un discours franchement sévère ! Le message de Jésus est délibérément fort pour marquer les esprits. Toutefois, il ne s’agit pas d’être un larbin mais c’est plutôt une attitude humble et bienveillante de la part d’une personne au pouvoir. L’autorité conférée à un responsable lui réclame un devoir de service mais ne lui offre pas un pouvoir dominateur. S’investir pour les autres et non pas faire passer son intérêt au détriment d’eux. Une nouvelle conception du pouvoir. Et Jésus lui-même a donné l’exemple en lavant les pieds des apôtres lors du dernier repas : « Vous m’appelez ‘Maître’ et ‘Seigneur’, et vous avez raison, car vraiment je le suis. Si donc moi, le Seigneur et le Maître, je vous ai lavé les pieds, vous aussi, vous devez vous laver les pieds les uns aux autres. C’est un exemple que je vous ai donné afin que vous fassiez, vous aussi, comme j’ai fait pour vous. » (Jn 13:13-15) Jésus demande à ses disciples un don de soi, généreux et désintéressé. Un message important !
Dans une société en ébullition, la compétition fait partie intégrante de notre quotidien. Personne ne peut y échapper. Une émulation permanente. Depuis notre premier jour à l’école jusque dans la vie professionnelle, on nous classe et juge nos performances. Le côté positif de cette compétitivité, c’est qu’elle nous force à mettre en valeur nos capacités. Cela donne du dynamisme et de l’enthousiasme. Dans cette perspective, il vaut mieux être fort que faible, être admiré que blâmé. Mais, si on ne fait pas attention, le revers de la médaille de cette âpre compétition c’est la première place, les honneurs, le profit, la considération… Ces critères de la réussite sociale s’imposeront comme règle de conduite et feront des millions de victimes. Pour gagner, pour être le premier et le plus grand, il arrive que cela se fasse au détriment des plus faibles, de ceux qui n’ont aucun moyen de se défendre. Dans une société régentée par la loi du plus fort, souvent les plus fragiles sont laissés au bord du chemin. Pour parvenir à l’objectif convoité, tous les moyens sont bons : la violence, la méchanceté, la tricherie… Nous-mêmes, nous sommes des fois habités par des idées véhiculées par cette culture environnante. Nous avons tendance à vouloir nous mettre en avant, à imposer nos idées au dépend des autres.
Jésus nous invite à entrer dans un autre dynamisme, celui d’accueil et de service. Il nous invite à nous mettre en toute modestie au service des plus petits d’entre nous. La valeur d’une vie n’est ni dans le pouvoir ni à la première place. Sur ce modèle, Mère Térésa nous montre sa belle voie. Elle a choisi de vivre dans une ville où règne la plus grande misère du monde, Calcutta. Elle se met au service des plus malheureux, ceux dont personne ne s’occupait : les mourants, les lépreux, les enfants abandonnés… On raconte le propos émouvant de cette pauvre personne recueillie dans un des mouroirs de Mère Térésa. Sur le point de mourir, il déclarait : « J’ai vécu toute ma vie comme un chien, mais au moins je meurs comme un homme. » Mère Térésa a su redonner la dignité à un laissé-pour-compte. Elle l’a fait au nom de cet Amour résidé en elle ! Un amour humble et désintéressé envers les plus petits et les plus malchanceux. À travers eux, c’est Jésus qui est là ! « Amen, je vous le dis : chaque fois que vous l’avez fait à l’un de ces petits qui sont mes frères, c’est à moi que vous l’avez fait. » (Mt 25:45)
Faisons en sorte que ce message d’Amour et de service soit bien présent dans notre cœur. Faisons nôtre cette magnifique prière de saint Ignace de Loyola : « Seigneur Jésus, apprends-nous à être généreux, à te servir comme tu le mérites, à donner sans compter, à combattre sans souci des blessures, à travailler sans chercher le repos, à nous dépenser sans attendre d’autre récompense que celle de savoir que nous faisons ta volonté ! »
Nguyễn Thế Cường Jacques
Concernant le 25 ème dimanche
On ne peut pas traiter les disciples “d’arrivistes”. Nous aurions fait pareil
Il faut rester très humble pour donner un jugement sur le passé.
C’est une citation du pape François