Homélie du 17ème dimanche du temps ordinaire
Abbé Jean Compazieu | 22 juillet 2012
Cinq pains et deux poissons
Textes bibliques : Lire ici
Quand nous lisons les textes bibliques de ce dimanche, nous sommes impressionnés par la place donnée aux chiffres : 20 pains d’orge pour cent personnes, cinq pains et deux poissons pour cinq mille hommes, douze paniers pleins de miettes… Et comment ne pas penser à d’autres chiffres qui en disent long : des centaines de milliers de tués dans les guerres, des millions d’affamés dans le monde, des dizaines de millions d’euros pour le transfert d’un footballeur. Ces chiffres nous dispensent de paroles ; ils deviennent parole. D’un côté c’est le cri d’admiration devant le miracle ; de l’autre, c’est l’horreur.
Ces chiffres nous en disent plus qu’un simple calcul mathématique. Dans les lectures bibliques de ce dimanche, ils nous montrent la disproportion entre la nourriture disponible et les besoins énormes : “Il y a là un jeune garçon qui a cinq pains d’orge et deux poissons, mais qu’est-ce que cela pour tant de monde ?” Nous aussi, nous sommes affrontés aux mêmes questions : devant toutes les catastrophes meurtrières, devant les guerres et les famines, nous nous sentons désemparés et impuissants : que pouvons-nous faire?
Et c’est là qu’il nous faut revenir à l’Evangile et regarder ce que fait Jésus. En ce jour, il nous propose de revoir d’une autre manière notre table de multiplication. Tout d’abord, il accepte le modeste goûter d’un enfant. Rien n’aurait été possible si cet enfant n’avait accepté de tout donner. Dieu a besoin de nos gestes de partage pour réaliser de grandes choses. C’est ainsi que les cinq pains et les deux poissons ont servi à nourrir cinq mille hommes. Une précision : le pain d’orge c’est celui des pauvres. C’est avec ce pain des pauvres qu’il nourrit toute cette foule. Il fait totalement confiance à Dieu. Il sait que tout est possible pour Dieu.
Cet évangile nous renvoie à l’actualité de notre monde Comment ne pas penser à la famine qui ravage une grande partie de l’humanité ? Beaucoup se posent la question : Où est Dieu dans le Sahel ? Et même dans nos pays occidentaux, beaucoup n’ont pas le minimum pour survivre. Alors, nous nous sentons désemparés et impuissants devant l’immensité des besoins. Mais la parole de Jésus est toujours là dans l’évangile de Marc : “Donnez-leur vous-mêmes à manger !” Il suffit du peu que nous avons, un peu d’amour, un peu de biens matériels et un peu de disponibilité pour vaincre la faim, celle du corps et celle du cœur. Ce peu, nous le remettons entre les mains du Seigneur. C’est avec cela qu’il peut réaliser de grandes choses.
Une autre question se pose : Jésus a nourri les foules un jour. Mais le lendemain, elles continueront à avoir faim. Elles se retrouveront dans une situation tout aussi misérable. Alors pourquoi Jésus a-t-il fait de tels actes sans rien changer aux situations ? Quand on veut lutter contre la famine, on ne se contente pas de donner à manger. On agit, en lien avec les organismes de solidarité, contre les causes qui provoquent la famine. Mais le but de Jésus n’est pas de changer les situations ; il est de changer le cœur les hommes. C’est aux hommes renouvelés par l’Evangile d’opérer les redressements nécessaires. Quand on est imprégné du message d’amour du Christ, plus rien ne peut être comme avant. L’important c’est que nous donnions le meilleur de nous-mêmes en lien avec ceux qui organisent la solidarité, Secours Catholique, CCFD et autres. Ce sont nos gestes d’amour et de partage qui font la valeur de notre vie.
En voyant Jésus devant ces foules, nous pensons à Moïse face au peuple des Hébreux. Nous nous rappelons qu’il l’avait conduit à travers le désert pour le guider vers la Terre promise. Jésus conduit l’humanité toute entière de l’autre côté du lac, vers le Père. Il nous appelle à le rejoindre sur la montagne pour vivre de l’alliance nouvelle et devenir enfants de Dieu. Il se présente à tous comme le vrai libérateur. Il est Celui qui nous fait passer de l’esclavage du péché à la vraie liberté, des ténèbres à la Lumière, de la mort à la Vie. C’est ainsi que la multiplication des pains est bien plus qu’un miracle ; c’est un signe qui nous parle de Dieu.
En lisant cet évangile, nous ne devons pas nous limiter au pain matériel. Bien sûr, ce pain est nécessaire pour notre vie. Mais le Christ voudrait nous inviter à faire un pas de plus. Il nous dit que Dieu est présent dans toutes les réalités et les événements de notre vie. C’est dans la foi que nous le rencontrons. Nous vivons de son amour. Autrefois, il a multiplié les pains. Ce geste est le signe de la multiplication de l’amour qu’il continue à réaliser en nous. Il nous envoie pour le distribuer à tous ceux et celles qui ont faim d’amour. Ainsi, il dépend de nous que le miracle ne s’arrête jamais, le miracle de l’amour entre les hommes.
“Nous sommes là, au cœur de la vie avec Dieu, au cœur de la vie de Dieu.” En ce dimanche, c’est lui qui nous rassemble autour de la table du Christ ressuscité pour partager son pain. Nous le supplions : “mets en nous ton Esprit Saint pour que nous entrions dans ton amour.” Amen
Sources : Revues Signes et Feu Nouveau ; La Parole de Dieu pour chaque jour (V. Paglia) ; lectures d’Evangile d’un vieux prêtre de Montpellier ; Pensées sur l’Evangile de Marc (C. Schonborn) ; Homélies pour l’année B (Amédée BRUNOT) ; dossiers personnels…
Intention de prière : Je voudrais recommander à vos prières le Père Louis Quintard, Père Blanc, qui a passé 62 ans en Afrique, d’abord à Bujumbura puis à Goma. Il vient de nous quitter cette semaine à l’âge de 88 ans.
que notre Amour accompagne Louis auprès de Notre Père.
Que Dieu le tout puissant accueil son ame dans son royaume . Amen
La mort pour nous les chrétins est le passage de la vie à la Vie. Qu’il repose en paix.
Restauration ! – 17ème Dimanche 2012 – 29 juillet
Dimanche passé nous parlions de Jésus comme d’un « bon berger » qui aime infiniment son troupeau de brebis pour le conduire aux verts pâturages. Reconnaissons, là, l’humanité que le Christ est venu sauver pour la conduire, à sa suite, dans le chemin de l’amour.
Aujourd’hui, sans quitter l’enseignement précédent, l’Eglise, dans sa liturgie dominicale, précise son enseignement sur les pâturages, disons sur ce qui doit faire vivre l’humanité. Sans famine les vacances font souvent penser à la recherche de bonnes restaurations !
En 1ère lecture le prophète Elisée, « l’homme de Dieu », fait face à « une famine dans le pays ». Grâce à une offrande de vingt pains d’orge et de grain frais il indique à un serviteur de donner à manger à cent personnes. « Ils mangèrent, et il en resta, selon la parole du Seigneur ».
C’est une évocation de Jésus dans l’Evangile qui suivra. Mais comment ne pas signaler les famines si nombreuses présentement en Afrique et autres territoires. Auront-elles un Elisée, un prophète, qui peut restaurer ?
Le Psaume 144 apporte une réponse : « Tu ouvres la main, nous voici rassasiés ». Nous l’avons chanté en pensant au Seigneur. « Les yeux sur toi, tous, ils espèrent » : Nombre de gens aspirent à une restauration ! « Tu leur donnes la nourriture au temps voulu » : Dieu saura calmer la faim. « Tu rassasies avec bonté tout ce qui vit » : Non seulement l’humanité mais également le monde animal et végétal, grâce à Dieu, sont pourvus d’une alimentation nécessaire à la vie.
L’Evangile (Jean 6, 1-15) vient ouvrir notre esprit et notre cœur aux dimensions divines. Jésus et ses disciples ont quitté le territoire d’Israël pour se rendre de l’autre côté du lac de Tibériade. « Une grande foule le suivait », gagnée pat les signes de guérisons qu’il opère. « Il gagne la montagne » : montagne de Dieu où il veut conduire. C’était « un peu avant la Pâque » juive où il donnera sa vie sur la croix. Jésus interroge Philippe, un apôtre : « Où pourrions-nous acheter du pain pour qu’ils aient à manger ? » Impossible répond Philippe : la foule qui a suivi est « d’environ cinq mille hommes » !
C’est alors qu’ « André, frère de Simon-Pierre, lui dit : il y a là un jeune garçon qui a cinq pains d’orge et deux poissons, mais qu’est-ce que cela pour tant de monde ? » Jésus fait asseoir la foule dans l’herbe. Il prend les pains, rend grâce, et « distribue pains et aussi du poisson, autant qu’ils en voulaient » Il en reste pour remplir 12 paniers. Quand Dieu donne c’est en surabondance.
Ce miracle de Jésus demande à être décrypté. Avec une toute autre dimension il rappelle celui d’Elisée. Dieu peut restaurer ce que les hommes seuls ne peuvent assurer. Notons cependant qu’il sollicite la collaboration humaine : d’un jeune garçon (les jeunes ont une attention spéciale dans l’Eglise) – d’une offrande, si petite soit-elle (pensons à celle du Denier de l’Eglise). La nécessité d’œuvrer pour restaurer les pays de la faim est une action humaine, et évangélique !
Toutefois ne faut-il pas s’interroger ? Quelle restauration Jésus est-il venu apporter ? N’est-ce pas avant tout celle de l’Amour ? L’Esprit d’amour doit remplir les cœurs humains pour mieux vivre le temps présent, travailler à répandre plus d’unité et de paix et nous faire rencontrer le Père éternellement. Sur la croix Jésus a ouvert son cœur à toute l’humanité !
St Paul (2ème lecture) vient enseigner les qualités de cet amour. Il demande « beaucoup d’humilité, de douceur et de patience ; de nous supporter les uns les autres avec amour » ; « de garder l’unité dans l’Esprit par le lien de la paix ». Cela nous conduit à « une seule espérance », à former « un seul Corps et un seul Esprit » car « Il n’y a qu’un seul Seigneur, une seule foi, un seul baptême, un seul Dieu et Père de tous, qui règne au-dessus de tous, par tous, et en tous »
Soyons joyeux et rendons grâce ! Ressuscités comme Jésus nous serons incorporés au Seigneur pour vivre éternellement en enfants de Dieu. Et notre joie sera aussi de contempler et aimer Marie qui a tant fait pour l’amour de ses milliards d’enfants … dont nous sommes !
« Donne-leur à tous ces gens pour qu’ils mangent » ordonne Elisée. Jésus, à son tour, se demande comment faire « pour qu’ils aient à manger ». Nous sommes devant la nécessité humaine la plus simple et la plus nécessaire : se nourrir. Recevoir d’autres de quoi manger. L’être humain nait, et grandit, en devant recevoir sa nourriture d’autres êtres que sont ses parents. Ce qui vaut du nourrisson vaut aussi d’une autre manière de l’adulte : nous sommes faits pour recevoir et pour donner, pour manger et pour donner à manger.
Mais remarquons que Jésus comme Elisée ont besoin qu’une personne offre généreusement ce qu’elle a … « Quelqu’un offrit à Elisée vingt pains et du grain frais. » Dans l’Evangile, un jeune garçon, offre « cinq pains d’orge et deux poissons. » L’anonyme d’Elisée et le jeune garçon ont tous deux fait confiance à l’homme de Dieu – en fin de compte à Dieu. Ils n’ont pas retenu jalousement ce qu’ils avaient, ils ont partagé de leur nécessaire, sans compter, et cela a porté du fruit. Ils ont offert quelque chose qui n’est pas extraordinaire, quelque chose qui est à la portée de tout le monde. Là est peut-être ce qui est à retenir pour nous. Il est si facile de se dire : je ne suis ni Jésus ni Elisée, comment puis-je donner à manger aux foules ? La question n’est pas là. Elle est : que puis-je donner de ce que j’ai ? Quel pain, quelle parole puis-je offrir ?
Ce n’est pas le côté miraculeux de le multiplication des pains qui importe. Non pas qu’il faille en rejeter la possibilité. Dans la vie de saints, comme Jean-Marie Vianney ou Don Bosco, on trouve attesté de tels faits. Le plus important à retenir, c’est que Dieu a besoin de notre libre collaboration. En réalité ; c’est bien Dieu qui prend soin de son Peuple à travers notre consentement : « tu leur donnes la nourriture au temps voulu ; tu ouvres ta main : tu rassasies avec bonté tout ce qui vit », chantions-nous dans le psaume. Dieu fait l’impossible avec notre possible. Il nous aide à franchir la peur de manquer lorsque comme nous y invite saint Paul, « ayez beaucoup d’humilité, de douceur et de patience, supportez-vous les uns les autres avec amour. »
Les deux récits de multiplication montrent qu’après avoir donné de son nécesszaire, voici que ce nécessaire produit un reste qui est l’intérêt de ce qui a été investi sous forme de don N’est-ce pas à un tournant de cette nature que notre société devra réfléchir et négocier pour sortir de ses impasses économiques et financières ?
Cela nous renvoie enfin à nos eucharisties. A la messe, le pain que nous rompons et que nous mangeons, s’il ne dit rien de ce que nous avons à donner et à partager, il a beau être consacré, il ne nous nourrira pas.
Mais si nous acceptons de partager, le texte de saint Jean nous le montre de manière impressionnante, nous entrons dans le mystère de Dieu:
Jésus PREND (les pains qu’on a accepté de lui donner)… REND GRÂCE (verbe grec : « eucharistein « eucharistie ») LES DONNE sans mesure et apaise notre faim de vérité, de confiance, de solidarité, de sens, de liberté, de joie, de paix.
Retrouvons l’esprit d’enfance pour donner ce que nous pouvons donner et recevoir le Don sans mesure qu’est Dieu.
Les homélies sur kerit.be
À qui de droit,
J’apprécie grandement les commentaires de S. Claire Patier pour lesquels, je la remercie.
Ils m’aident beaucoup à préparer mon Évangile du dimanche.
Je ne sais jamais où les trouver.
Serait-il possible de les recevoir à mon adresse, s.v.p.
ou sur YouTube?
Je vous remercie à l’avance
Cécile (Québec)
Elles sont sur son site
Mais en période d’été, elle n’a rien publié